Actualités :: Kounkounfouanou, un village rasé

Kounkounfouanou, faut-il encore l’appeler village ? En tout cas, il n’est plus habité. Le constat a été fait le jeudi 2 juillet 2015 dans le cadre d’un reportage : habitations décoiffées et/ou incendiées, et aucun habitant sur place. Ce reportage fait suite à une conférence de presse animée le 17 juin dernier à Ouagadougou, et donnera lieu à une série d’articles.

Situé à environ 70 kilomètres de Fada N’Gourma (chef-lieu de la région de l’Est), le village de Kounkounfouanou se définit actuellement par des concessions en débris. Les maisons, si elles ne sont pas complètement détruites, elles ne peuvent en tout cas, être habitées car décoiffées et/ou incendiées. Et ceux qui les habitaient jusqu’à ce qu’elles soient mises dans cet état, sont introuvables. Du moins, ils ne sont plus dans le village. Mais où sont-ils alors ? Difficile de répondre avec entière exactitude à cette question.

Néanmoins, l’on sait que Pindima (un village voisin de Kounkounfouanou) en a accueilli. Là, une partie de la famille de Dahani Damiba a trouvé refuge … dans la nature. Sans doute que bien d’autres familles subsistent dans un tel environnement. Il y en a aussi qui ont trouvé un abri sérieux, mais loin, et même très loin de ‘’leur Kounkounfouanou’’.

Aux dires de M. Damiba, les familles qui habitaient dans le village, se sont dispersées. On en trouverait dans des localités comme Gonaba, Tagou, Nagré, Kikidéni, Bogandé, et même dans des villages du Benin voisin. Mais, c’est à Natiabouani qu’elles ont majoritairement trouvé refuge. C’est donc ce village situé à une vingtaine de kilomètres de Kounkounfouanou que nombre de ces populations ont rallié dans la débandade du 16 juin dernier. A la section-Fada de la Coalition contre la vie chère (CCVC), l’on exige le recensement intégral de ces « populations soumises au déguerpissement sous des flammes ».

Au gouvernorat, « pas possible » de parler du dossier Kounkounfouanou

Un déguerpissement conduit par les forces de défense et de sécurité (militaires, gendarmes, policiers, forestiers) en service dans la région de l’Est. Mais sur quelle base ? Et à quelle fin ? Un site d’accueil a-t-il été dégagé pour ces populations ainsi délogées ? Quels mécanismes d’accompagnement pour elles ?

Autant de questions qui devraient trouver des réponses auprès de la première autorité de la région de l’Est, en l’occurrence le gouverneur Péguy Hyacinthe Yoda. Mais au secrétariat particulier de ce dernier dans la matinée du 3 juillet 2015, et après avoir demandé à le voir au sujet de Kounkounfouanou, il nous a été lancé, « M. Paré, le patron dit que ce n’est pas possible ».

Le gouverneur Yoda a donc opté pour le silence face à cette situation qui a plongé de nombreuses populations dans la détresse, et qui suscite un tas de questions. Mais pourquoi ce silence, et jusqu’à quand sera- t- il maintenu ? En attendant, nous retenons de lui un silence sur fond de mépris. Un silence dont la charge accusatrice n’est pas des moindres dans un Burkina où ‘’plus rien ne sera comme avant’’.

La délimitation de la zone pastorale de Kabonga a-t-elle été modifiée ?

Néanmoins, il ressort de l’ordre de « déguerpissement de la zone pastorale de Kabonga » servi aux forces de défense et de sécurité, que l’intervention de la force publique vise à « empêcher la population irrégulièrement installée dans ladite zone d’entamer toute activité agricole et y faire cesser toute activité relative à une exploitation minière durant trente-trois (33) jours à compter du 13 juin 2015. » Dans ce sens, ces forces de défense et de sécurité avaient à « réduire toute résistance à l’exécution » de la « mission par une action en force », et de « mettre hors d’état de nuire toute personne prise en flagrant délit de voie de fait ».

Mais la zone pastorale dont il est question, ne s’étend pas sur le village de Kounkounfouanou habité depuis 1983. Rappelons que cette zone pastorale a été créée en 2004, et que son bornage est intervenu en 2006. Au regard de ce bornage, le village de Kounkounfouanou n’est pas inclus dans la zone pastorale de Kabonga, sauf si ladite zone a connu une extension officieuse.

Les concessions les plus proches de ces bornes se situent à des kilomètres. A titre d’exemple, de la cour de M. Damiba à ces bornes, il faut parcourir près de dix kilomètres. Comment alors comprendre qu’un rapport adopté en conseil des ministres le 18 février dernier et « portant réaffirmation de la vocation de la zone pastorale de Kabonga par le déguerpissement des exploitants illégaux », puisse justifier la mise en détresse de ces milliers d’habitants de Kounkounfouanou ? Mais, c’est ce qui a été fait : Kounkounfouanou rasé, ses habitants déguerpis !

Et comment ces populations ainsi déguerpies vivent-elles ? Y a-t-il vraiment eu la rébellion dont on accuse 36 de ces populations détenues à la Maison d’arrêt et de correction de Fada ? Ces populations, sont-elles victimes de la richesse aurifère de leur village ? A qui profitera donc ce déguerpissement ? Ce sont autant d’interrogations qui feront l’objet d’articles sur cette affaire ténébreuse de Kounkounfouanou.

Fulbert Paré
Lefaso.net

Liens utiles : Kounkoufoanou : une opération de déguerpissement sur fond de terreur ?

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