Actualités :: Fadel Barro du mouvement Y’en a marre du Sénégal : « C’est faire un mauvais (...)

Parrain de la onzième édition du festival ciné droit libre, le journaliste sénégalais et coordinateur du mouvement citoyen Y’en a marre, Fadel Barro , est depuis quelques jours à Ouagadougou. On se rappelle que son mouvement était aux avant postes des actions qui ont pu barrer la route du palais présidentiel à Abdoulaye Wade (il voulait un troisième mandat). Convaincu du nouveau type africain (NTA) qui instaurera un véritable changement sur le continent, le journaliste engagé que nous avons rencontré se prononce dans cette interview sur le financement des mouvements sociaux. Il ne manque pas d’encourager le balai citoyen à poursuivre la lutte.

Fadel Barro, parrain de la 11ème édition du festival ciné droit libre, qu’est- ce que cela vous inspire ?

Il faut comprendre que ce n’est la personne de Fadel Barro,à qui, on a confié le parrainage de cette 11èmeédition du festival ciné droit libre. C’est plutôt à cette jeunesse africaine qui est en train de s’émanciper, qui est en train d’abattre un travail formidable que le festival rend hommage. A travers donc ma personne, c’est toute la jeunesse africaine qui est dans l’anonymat, hors des spectacles, des médias mais qui est en train de faire un travail remarquable pour un véritable changement en Afrique. Je suis très heureux et satisfait de parrainer cette édition post insurrectionnelle du festival. Et je dédie ce parrainage à toute la jeunesse africaine.

Le mouvement « Y’en a marre » a été d’une grande inspiration de nombre de jeunes africains. Sont de ces jeunes, ceux du Burkina à travers le Balai citoyen. Et on sait quel rôle le Balai citoyen a joué dans la chute de Blaise Compaoré. Vous devez en être fier ?

Je dirai plutôt que le mouvement « Y’en a marre » s’est inspiré du peuple burkinabè. Depuis la mort de feu Président Thomas Sankara, de Norbert Zongo, c’est un peuple qui n’a jamais lâché prise. Il s’est toujours battu. A cela s’ajoute la jeunesse nigérienne qui s’est aussi battue contre la modification de leur Constitution. Y’en a marre s’est donc inspiré de tous ces combats pour dire NON à Abdoulaye Wade lorsque celui-ci voulait briguer un troisième mandat.
Alors si en retour le Balai citoyen s’inspire de notre mouvement, si Filimbi s’inspire de « Y’en a marre » et du « Balai citoyen », si les « jeunes et forts » du Cameroun s’inspirent de toutes ces expériences, cela voudrait bien confirmer qu’il y a un boomerang en Afrique qui est en train de prendre forme. C’est donc une expérience africaine qui se dessine à travers ces mouvements citoyens pour un véritable changement dans nos pays.

Oui, ces mouvements ont certes fait leur preuve en matière de changement politique. Mais de plus en plus, ils sont « vomis » par une certaine frange de la société qui estime qu’ils reçoivent des financements pour troubler l’ordre social. Quels sont justement vos sources de financements ?

Il y a beaucoup de rumeurs sur cette question de financement des mouvements citoyens en Afrique notamment sur « Y’en a marre ». Mais je peux vous assurer que ce sont tout simplement des mensonges, des désinformations et des manipulations parce qu’il y a des gens qui cherchent à nous discréditer. Depuis le début de notre lutte, nous sommes restés indépendants - financièrement - en organisant la vente du tee-shirt de notre mouvement.
De la naissance du mouvement en janvier 2011 jusqu’au départ d’Abdoulaye Wade, on n’avait pas de projet à soumettre aux ONGs. On avait juste organisé des rassemblements, fait de porte-à-porte, organisé des concerts…. Mais cela n’engrangeait pas beaucoup d’argent.
Les moyens financiers que nous avons eus pour continuer le combat a été la vente de nos tee-shirts. Je rappelle que nous les vendons à 7000F parce qu’ils étaient de qualité et pendant toute la campagne, nous avons vendu près de 100 000. Et ce sont des sénégalais qui l’ont acheté, et, qui pouvaient s’unir commander des milliers qu’ils distribuaient à d’autres.

Et ensuite ?

Après le départ d’Abdoulaye Wade, pour maintenir l’existence du mouvement (parce qu’il n’y avait plus de défis, mais aussi, les gens ne s’intéressaient plus aux mouvements sociaux, et on ne pouvait continuer à réclamer), nous avons écrit des projets structurels que nous avons muris. Ces projets consistent à mettre en place des observatoires sur la démocratie et la bonne gouvernance partout dans le pays. Elle a constitué aussi, à avoir un site de monitoring ou les gens peuvent témoigner, à former les jeunes sur les mécanismes de gouvernance, à les familiariser avec les Institutions, à organiser les grands foras qu’on appelle les jurys populaires ou citoyens qui consistent à amener les députés et les élus locaux devant les populations pour rendre compte.
A Y’en a marre, nous avons un programme de société qui s’appelle TabakYelekl (en wolof) qui veut dire CONSTRUIRE l’AVENIR. Et ce sont des projets que nous avons soumis à des ONGs partenaires.
Des ONGs dont nous sommes sûrs que la provenance des fonds est licite, tels qu’Oxfam, Osiwa, la fondation Ford. Ils nous ont effectivement accompagnés dans la mise en œuvre du projet qui a duré un an et demi. Nous discutons actuellement avec la Fondation Ford pour la deuxième phase.

Ils vous ont financé à quelle hauteur ?

Nous avons au total plus de 120 millions FCFA. Cela a servi à financer nos projets et ce sont les cellules de « Y’en a marre » dans les différentes localités du Sénégal qui en ont le plus bénéficié. En effet, le projet les a aidées à avoir des sièges, du matériel, à financer leur formation.
Ce sont des personnes malintentionnées et qui ne pensent pas que les jeunes africains sont capables de s’émanciper, de conceptualiser et d’organiser dans le temps et dans l’espace, qui passent leur temps à croire qu’il y a forcément une main invisible qui soutient nos luttes.
Je tiens alors à préciser que les seules personnes qui sont derrière nous sont les peuples. C’est idem pour le balai citoyen, c’est idem pour Filimbi, idem pour les Sofa….
Je connais la détermination de ces jeunes parce que je travaille avec eux depuis un certain moment et ce qui nous motive, ce n’est pas de l’argent. Si c’était le cas, on aurait travaillé avec les chefs d’Etat que nous combattons parce que non seulement ils sont riches et ils sont prêts à mettre des milliards pour qu’on leur foute la paix. C’est simplement malheureux pour ces personnes qui pensent que l’Occident notamment la France, les USA nous financent. Nous, nous sommes des sankaristes.
Il faut certes poser le débat sur le financement des mouvements, mais des gens sont manipulés pour que nos voix ne soient plus crédibles. Et nous, nous n’avons pas peur des critiques.

Des mouvements citoyens, on en compte des centaines qui ont aujourd’hui des accointances politiques. Vous ne craignez pas une transformation ?

En tout cas, a Y’en a marre, ce n’est pas le cas. Certes, à la rencontre des mouvements citoyens les 29 et 30 juin à Ouagadougou, un militant du mouvement « Jeunes et forts » du Cameroun qui n’a pas engagé ledit mouvement estimant qu’il faut franchir, d’abord une étape en créant un parti politique. Mais ça, c’est au Cameroun. On en a discuté mais cela ne veut pas dire que désormais nos mouvements peuvent devenir des partis politiques. Ce n’est pas notre ambition.

Vos militants ne peuvent donc pas militer dans une formation politique ?

Nous sommes en démocratie. Des gens peuvent adhérer à Y’en a marre, à Filimbi, à Balai citoyen et ensuite faire autre chose après. Je pense qu’il faut accepter les mobilités. Le plus important est de garder l’identité de nos mouvements et d’éviter surtout que des gens l’utilisent à d’autres fins. En tout cas, notre objectif n’est pas d’accéder au pouvoir, encore moins d’aider quelqu’un à accéder au pouvoir.

Il est aussi question de la mise en place d’une plateforme panafricaine pour les mouvements citoyens. Qu’en est-il exactement ?

Il est urgent de mette en place cette plateforme pour qu’on puisse s’informer. La plateforme existe déjà mais elle est informelle puisque, nous, nous sommes connectés avec les autres et ce n’est pas pour rien qu’on a été arrêté au Congo. Ce n’est pas pour rien qu’on vient au Burkina pour rencontrer les cibals (les membres du Balai Citoyen, ndlr). Mais l’idée est de mettre en place un site web qui nous permettra de publier simultanément des informations.

Après cette bataille menée contre Abdoulaye Wade, quel est le bilan que vous pouvez faire de la gestion du nouveau régime ?

Cette question revient très souvent. Mais je pense que les gens ne comprennent pas notre démarche. Avant même la venue de Macky Sall, on n’à jamais pensé qu’un parti politique ou une coalition va apporter un changement dans le pays. On ne le croit pas. Le changement que nous souhaitons viendra des jeunes. J’en suis sûr. Quand on amorcera ce changement de mentalité, de comportement, quand la jeunesse va atteindre cette qualité de citoyenneté qui est un ensemble de valeurs que nous appelons le nouveau type africaine (NTA), nouveau type de Burkina, de sénégalais, le véritable changement pourra s’opérer. C’est pourquoi il faut donc continuer à mettre la pression sur les chefs d’Etat africains.

C’est dire que Macky Sall ne satisfait pas les besoins des sénégalais ?

Non ! C’est non parce que nous sommes toujours pauvres. Il a certes fait de bonnes choses sur certains points, mais sur d’autres, il n’a absolument rien fait de bon. A nous donc, de continuer à exercer la pression afin qu’il prenne en compte la préoccupation des sénégalais.

Beaucoup de burkinabè avaient fondé leur espoir sur le Balai citoyen au regard de certaines actions citoyennes. Mais depuis la chute de Blaise Compaoré, ils sont accusés à tort à ou à raison d’avoir installé les militaires au pouvoir. Avez-vous un message.

C’est faire un mauvais procès au Balai en pensant que c’est eux qui ont amené les militaires au pouvoir. Ce n’est pas vrai. On a suivi de très près ce qui s’est passé et nous avons échangé avec les camarades. Nous sommes convaincus que ce n’est pas le Balai qui a amené les militaires au pouvoir. C’est l’incapacité des partis politiques à s’organiser qui a amené les militaires au pouvoir. C’est l’inorganisation des partis politiques, qui après avoir achevé un travail se sont mis à vouloir régler des crises de Chapelles.
Aucun d’entre eux n’a voulu s’assumer pleinement. Le Balai, aujourd’hui subit beaucoup de critiques certes ! Mais personne n’a demandé à ces jeunes de créer le mouvement. Ils ont pris leurs responsabilités, ils se sont battus pour mobiliser les jeunes. Maintenant qu’ils sont en train de prendre de l’importance, on veut les faire taire en leur faisant un mauvais procès. Le Balai ne doit pas se laisser distraire par ces critiques. Tout homme à un moment donné passe par cette période d’incompréhension. Mais ce n’est pas parce qu’on ne vous comprend pas, qu’on doit lâcher prise, au moment où vous vous sentez incompris, vous devez rester constant en redoublant d’effort. Tôt ou tard, les masses finiront par comprendre.

Propos recueillis par Bassératou KINDO
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