Actualités :: Commerce des grenouilles à Mogtedo : un mets prisé au Ganzourgou

Les grenouilles sont à Mogtédo ce que sont "les poulets mademoiselles" à Koupéla ou les "chitumus’’ à Bobo-Dioulasso. Un signe distinctif qui fait en même temps la fierté des uns et des autres.

Normal qu’on en parle avec beaucoup de délectation comme d’une denrée protéinique, pleine de calories et surtout, de richesse au double plan : sanitaire et économique.

La petite bourgade de Mogtédo, à quelques 80 km à l’Est de Ouagadougou, sur l’axe Ouaga-Koupéla a son charme. La ville met petit à petit en place les rudiments d’une cité moderne. Des boutiques, des points d’eau, l’électricité, le téléphone (même le cellulaire). Tout ce qui confère à une ville moyenne parmi les moyennes, un aspect de "vraie" ville. Ici, le marché à quelques encablures de la route bitumée est toujours achalandé. On y vend du tout : les filles, assiettes bien pleines, vous proposent une variété de produits. C’est dans cette floraison que des grenouilles ont leur place. Oui, comme qui vendrait des oignons ou des tomates, les "Mogtédolaises’’ vous proposent, sans sourciller les grenouilles qu’elles promènent en harcelant à force d’argument, les potentiels acheteurs.

En cet après midi, un soleil de plomb inonde le marché. Aux abords du bitume dans la province du Ganzourgou, l’activité commerciale est à son summum. Ici, le marché se tient chaque trois jours. A côté des filles qui se ruent sur les "étrangers" de passage pour proposer, qui, des oignons, qui des tomates, se tient discrètement, mais efficacement Zenabou Ouédraogo, une des vendeuses de grenouilles. Pour descendre du véhicule, pris d’assaut par les commerçantes, il faut user de fermeté.

A l’affût, elles n’hésitent pas à courir à perdre haleine pour vous accoster. Le refrain est toujours le même, chacune vante la qualité de sa marchandise, les vendeuses de grenouilles aussi.

Une grosse grenouille est à 100F et la petite à 50 F CFA. Les grenouilles sont achetées chez des jeunes enfants qui se les procurent dans le marigot situé à l’arrière du marché. Selon certaines vendeuses, les enfants peuvent aller jusqu’à des kilomètres pour les capturer. Ils ne se servent ni de cannes à pêche ni de filet mais, plutôt de leurs doigts, experts en la matière.

Habitués qu’ils sont à l’emplacement de ces batraciens dans le marigot, ils usent de rapidité pour prendre l’animal par surprise et le balancer de force hors de l’eau. Hors de son milieu naturel de vie, le batracien a du mal à s’échapper de son "pêcheur". Celui-ci le récupère et le met dans un sac. Lorsque la moisson de la pêche est abondante, les enfants peuvent s’en tirer avec des sacs pleins à craquer, selon les vendeuses. Et chaque matin, les "pêcheurs de grenouilles" les proposent vivantes aux femmes, en raison de trois grenouilles à 100 F CFA.

Après les avoir achetées, les vendeuses les font frire, afin de pouvoir les conserver longtemps sans qu’elles ne se décomposent. Cette année, Zénabou Ouédraogo, regrette que la pluviométrie ne soit pas abondante. Puisque, selon elle, le foisonnement ou l’abondance des grenouilles est fonction de la pluviométrie. Depuis plus de deux ans, Zénabou exerce dans le domaine de la vente des grenouilles. Elle a des fournisseurs potentiels en grenouilles pendant les périodes de vaches grasses comme de vaches maigres.

Par jour, Zénabou écoule 1000 à 1500 F CFA de grenouille. Avec son foulard noué à la "va t’asseoir", elle détecte facilement ses clients. Mariam Ouédraogo, une autre vendeuse, vient d’étaler les grenouilles pour attirer le regard des passants. Elle les pose en tas de deux petites grenouilles ou des grosses grenouilles. D’une trentaine d’années, Mme Ouédraogo exerce cette activité commerciale, faute de mieux, selon elle. "Les ventes des grenouilles me procurent seulement l’argent de la bouillie" avance-t-elle, le visage sérieux, grave. Elle indique les tas de grenouilles qu’elle vient d’étaler pour prouver que le commerce des batraciens tourne au ralenti en ces temps-ci.

Pour pallier le manque à gagner, des vendeuses ont trouvé l’astuce de vendre des poissons et des écrevisses, en plus des grenouilles. Tandis que sa fillette grignote des petits poissons, debout derrière sa table de vente, Mariam Ouédraogo fait savoir qu’il y a trois ans de cela qu’elle pratique ce commerce. Le hic dans ce genre de commerce "inhabituel" voire, "inconnu" c’est, que les vendeuses n’ont pas de clients fidélisés à l’achat des grenouilles.

Mode d’emploi

La grenouille on le sait est un batracien herbivore. Il n’en demeure pas moins que sa cuisson requiert de tenir compte des paramètres d’hygiène. Mariam Ouédraogo, tout en chassant "les invités indélicats" (les mouches) des grenouilles exposées, explique le mode d’emploi."Après avoir acheté les grenouilles chez les enfants, je les rince à l’eau, j’extrais les déchets avant de les laver au savon en vue de les rendre plus propre."

Enfin, vient la cuisson où les grenouilles sont frites en entièreté comme le poulet rôti. Une cliente venue s’en procurer, compare le goût de ce mets à la viande de poulet. Pour elle, la recette la plus appropriée est la soupe de grenouilles, affirme-t-elle, avec un brin de rictus, comme pour saliver, rien qu’à penser à ce "bon souvenir de son palais". En un mot, "c’est délicieux" lance-t-elle en tournant le dos pour vaquer à ses occupations.

Pendant ce temps, Zénabou Ouédraogo essaie tant bien que mal, de mettre de l’ordre et de la propreté, dans le tas de grenouilles, éparpillé dans l’assiette. Avec délicatesse, elle balaie d’un éventail les mouches indélicates qui tiennent mordicus à avoir leur part du "gateau’’.

Après cet exercice couronné de peu de succès, elle met l’éventail sous son aisselle et s’échine à placer et à déplacer les grenouilles, selon la grosseur et le prix. Occupée à cette activité, elle établit saus sourciller "la carte d’identité" de ses clients. "Les clients que nous recevons généralement viennent dans de grosses voitures et là, à les voir, nous savons tout de suite qu’ils sont riches".

L’occasion faisant le larron, les prix flambent au vu de ces "gros bonnets". Et en ce moment, ils (les prix) sont établis à la tête du client. Mariam Ouédraogo : "Quand ce sont les "riches", les prix peuvent aller jusqu’à 200 F l’unité", sans commentaires. A ce prix, les "gourous" peuvent s’acheter pour 2000 à 5000 Fcfa de grenouilles, affirment Mariam droite dans "ses sandales’’. Du coup, le bénéfice engrangée dépasse de loin, "l’argent de la bouillie".

A cette remarque, un grand rire déchire l’air en guise de réponse.
Ainsi donc, que ce soit assises sous un hangar de pailles ou, la vente à la criée portant sur la tête l’assiette des grenouilles, les vendeuses bien que que souvent, elles passent par perte et profit, poursuivent ce commerce qui fait bien des heureux à travers le Burkina.

Pour preuve, quand on évoque le plat de grenouilles dans un recoin du Burkina, l’on se réfère foncièrement à la ville de Mogtédo avec un léger décalage sur Zorgho. Ces contrées sont les "bastions" du commerce de ces batraciens au goût "enjolivé" et "ravageur". Selon certaines sources, "qui goutte une fois, ne peut plus s’en passer’’. Mythes ou réalités ? Faites un tour à Mogtédo.

Daouda Emile Ouédraogo (ouedro 1@yahoo.fr)
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