Actualités :: Route nationale 1 : Les concepteurs expliquent

Sous d’abord notre rubrique Humeur, puis le Forum des internautes, les travaux de bitumage de la sortie ouest de Ouagadougou en direction de Bobo-Dioulasso ont fait l’objet, dans nos colonnes ces derniers temps, de nombreuses critiques portant notamment sur l’aménagement des “Tourne à gauche”. Dans les lignes qui suivent, le mandataire du Consortium du cabinet conseil, Idossou Tchona, concepteur du projet et contrôleur des travaux d’exécution, propose des explications techniques sur la question et d’une manière générale les différentes finalités dudit projet.

“Depuis quelques semaines, principalement après la visite organisée à l’intention de monsieur le maire de Ouagadougou, visite conduite par monsieur le ministre des Infrastructures et du Désenclavement, et qu’a couverte une forte équipe des médias tant publics que privés du pays, tous les feux sont braqués sur le projet « Aménagement et bitumage du lot n°1 de l’interconnexion des routes nationales RN°1 et RN°4 ».

Il s’agit en fait de la sortie ouest de Ouagadougou en direction de Bobo-Dioulasso. En effet, il ne se passe plus de jour sans que quelque part, dans la presse écrite ou parlée ou audiovisuelle, des appréciations de tous genres ne soient faites sur les travaux en cours, et des interpellations, voire des propos discourtois ne soient adressés aux concepteurs du projet.

C’est ainsi que dans l’édition n°7793 du jeudi 06 janvier, du journal L’Observateur Paalga, le titre ci-après, « Nos ingénieurs ont tout simplement manqué d’ingéniosité », dans la rubrique « le forum des internautes » prête tout à fait à confusion, quand plus loin, on se rend compte que ce titre est tiré du site internet de l’Observateur Paalga (www.lobservateur.bf) du texte d’un internaute, texte qui ne remet nullement en cause l’aménagement de SAS de STOCKAGE » pour les « tourne à gauche ».

Mais avant de revenir à cet aspect « particulier » du projet, nous pensons qu’il est nécessaire de le représenter aux usagers de la route. Le projet en cours d’exécution, à savoir l’aménagement et le bitumage de la sortie ouest de Ouagadougou en direction de Bobo-Dioulasso, est un tronçon de la Route nationale n°01 (Ouagadougou Bobo-Dioulasso). Il concerne une partie du tronçon de cette route, dans l’agglomération de Ouagadougou. Du point de vue de sa conception et statut futur, il est constitué de deux sections :

- la section 1, partant du rond-point de la Bataille du rail et dont la fin est au début de l’échangeur de l’Ouest, au niveau de l’ancienne agence de la BACB de Gounghin. Elle a une longueur de 2255 m ;
- la section 2, partant de la fin de l’échangeur de l’Ouest et se terminant à quelques deux cent (200) mètres après la station SHELL. Elle a une longueur de 5061 mètres. Comme tout le monde le sait, la conception, puis par la suite la fabrication et l’utilisation de tout objet, par l’homme et pour l’homme, se fait sur la base de normes. La conception, la construction et l’exploitation d’une infrastructure routière n’échappe pas à ce principe de base.

Ces normes ne sont pas figées, bien au contraire, elles sont dynamiques et contribuent, chaque fois, à la résolution des problèmes que l’homme rencontre dans sa marche vers le progrès et le bien-être. Le projet « Aménagement et Bitumage du lot n°1 de l’intersection des routes nationales RN°1 et RN°4 » n’a pas échappé à ce principe. Ses concepteurs sont partis de réalités burkinabè en matière de trafic, réalités auxquelles ils ont appliqué, pour leur traitement, les normes locales (du Burkina) régionales (l’UEMOA et la CEDEAO) et internationales unanimement reconnues.

En 2000, une étude, commanditée par le ministère des Transports et du Tourisme, financée de la Banque mondiale, et relative à « l’Amélioration des conditions de déplacements dans l’agglomération de Ouagadougou », a été réalisée par le bureau d’étude canadien CIMA. Elle a passé en revue tous les problèmes de déplacements dans Ouagadougou : infrastructures routières, matériels et équipements des « déplacements », comportements des hommes, etc.

L’analyse de ces problèmes, de même que leur évolution dans l’espace physique et dans le temps, a permis de dégager des conclusions et de faire des recommandations. Cette étude a mis en exergue, entre autres, le fait que dans les accidents de la route qui se produisent à Ouagadougou, le pourcentage de ceux dans lesquels les « deux roues » sont impliqués avoisine les 45%, dépassant de très loin ceux des « quatre-roues » et des autres modes de déplacements (piétons, charretiers, etc.)

C’est une donnée fondamentale dont on doit tenir compte, dans la conception, la construction et l’exploitation des infrastructures routières dans Ouagadougou et d’autres agglomérations du pays : la séparation des différents modes de déplacements et le correct traitement des points de conflit doivent être une préoccupation permanente du concepteur, de l’aménageur et de l’exploitant. Sur cet aménagement, il est mis en œuvre le principe de la séparation des différents modes de déplacement de la manière suivante, dans le but évident du renforcement de la sécurité routière :
- un terre-plein central de 2,50 m ;

- deux chaussées de 7,00 m chacune de part et d’autre du terre-plein central (l’usage de ces chaussées, ayant deux voies de 3,50 m chacune, est exclusivement réservé aux quatre- roues). En principe, sur une chaussée de ce type en voies unidirectionnelles, même si deux véhicules peuvent circuler de front, la voie de gauche est réservée au dépassement. Ces chaussées sont interdites aux autres modes de déplacement (ex : « deux roues », piétons, charretiers, etc.) ;
- deux pistes cyclables, de 3,00 m chacune, sont accolées aux chaussées (une piste cyclable de chaque côté donc).

L’usage de ces pistes cyclables est exclusivement réservé aux deux- roues et strictement interdit aux autres modes de déplacement (ex : quatre-roues, piétons, charretiers, etc.) ;
- deux trottoirs de 1,00 m chacun, sont accolés aux pistes cyclables (un trottoir de chaque côté donc). L’usage des trottoirs est exclusivement réservé aux piétons et strictement interdit aux autres modes de déplacement (ex : deux roues, charretiers, etc.).

En plus de ces aménagements, il est prévu, et déjà en cours de réalisation, sur la section 2, des contre-allées de part et d’autre, bien après les trottoirs. Ces contre-allées ont chacune cinq (5) mètres de large et des accotements de 1,00m de part et d’autre. Il n’a pas été possible (par manque de place) de prévoir des contre-allées sur la section 1. Les contre-allées sont à l’usage exclusif des riverains et des véhicules de livraison.

Le drainage et l’assainissement des deux sections sont assurés par les dalots, ponts et caniveaux, dont une grande partie est déjà réalisée. Les équipements d’information aux usagers, du domaine de la signalisation (marquage au sol, panneaux de signalisation, signalisation tricolore) sont prévus et seront également mis en place. Ces équipements (principalement la signalisation) devront rendre plus lisibles les carrefours. L’éclairage public viendra compléter ces équipements.

Quant aux points de conflits, ils ont été différemment traités, sur chacune des sections, compte tenu de leurs statuts respectifs. Sur la section 1, l’accès est autorisé à partir des rues existantes ; ainsi des carrefours ont été aménagés à ces accès. L’insuffisance d’espace (les emprises de la route ayant été occupées par des bâtiments de divers ordres) n’a pas permis de traiter comme il se doit, les points de « conflit » que sont les carrefours, principalement pour ce qui est des « tourne à gauche ».

La section 2 a un statut de voie express. La particularité à ce niveau, c’est l’interdiction de l’accès partout. On ne peut donc y accéder ou en sortir qu’à des carrefours bien précis. Des contre-allées (bretelles) ont été prévues pour permettre aux riverains, à partir des carrefours en question, d’y accéder ou d’en sortir. Les véhicules de livraison utilisent eux aussi les contre-allées. Cette particularité de non-accès et de sortie à partir des carrefours précis contribue à la fluidité du trafic, autre particularité d’une voie express. Les points de conflit en termes de trafic sont ainsi réduits. Les carrefours, de par leur fonction, sont des points de conflits potentiels.

La gestion à l’optimale de ces points de conflit est conditionnée par leur correct traitement, et ce, à l’aide d’aménagements spéciaux. Dans un carrefour, les courants (trafic) qui posent le plus de problèmes de conflit sont les véhicules qui tournent à gauche. Pour ces derniers, des dispositions particulières sont prises, au niveau des carrefours, pour leur permettre de manœuvrer sans création de problèmes de conflit et principalement d’insécurité. Ces dispositions sont essentiellement la création d’une voie de TAG (tourne à gauche).

La voie de TAG est composée d’une section d’introduction, d’une zone de stockage et d’un îlot séparateur. La présence de l’îlot séparateur veut dire que la voie de TAG peut être aménagée à un carrefour d’une chaussée bidirectionnelle si les problèmes de conflits l’exigent. Dans le cas de notre projet, l’îlot séparateur est inclus dans le terre-plein central. Les voies spécialisées de tourne à gauche contribuent à la qualité de l’écoulement des flux de circulation. En matière de sécurité, elles permettent de limiter les collisions arrières.

La capacité des carrefours de la section 2 a permis de concevoir des voies de TAG qui ne gênent en rien l’écoulement des flux de circulation. En effet, la largeur de 7,00 m des chaussées est maintenue pour les flux de circulation traversant les carrefours. Ces flux, précédemment en alignements droits, sont légèrement déportés à droite par des alignements courbes bien perceptibles par les usagers de la route. Cette perception se fait suffisamment à temps par les usagers, ce qui leur permet de faire leur choix et d’adapter leur conduite.

La largeur de la chaussée, précédemment de 7,00 m, passe à 10,00 m au niveau de l’implantation de la voie TAG, dont, comme dit ci-dessus, 7,00 m pour les flux de circulation traversant le carrefour, et 3,00 m pour ceux voulant tourner à gauche et qui viennent se positionner dans la zone de stockage en attendant les conditions propices pour leur manœuvre. Si ce type d’aménagement constitue peut-être une innovation dans notre environnement, il existe bel et bien un peu partout dans le monde, et même au Mali, pays voisin du Burkina (cf. photos ci jointes).

Le Burkina n’est pas seul au monde. Il ne vit pas en autarcie, bien au contraire. Il fait partie d’Organisations sous-régionales (UEMOA, CEDEAO) régionales (UA) et internationales (ONU, OMS, AIPCR, etc.). Depuis plusieurs années, toutes ces organisations se sont mobilisées pour la sécurité routière. Par exemple, l’OMS a décrété l’année 2004 comme année de la sécurité routière, et organisé en avril de la même année, à Paris, un Symposium sur cette question.

Elle revient, chaque année, sur cette question qu’elle considère comme une question de santé publique. L’ONU vient de déclarer la décennie 2011-2020, décennie de la Sécurité routière. Les décisions arrêtées par ces organisations, en matière d’infrastructures routières, pour contribuer à la sécurité routière, c’est que chaque pays membre conçoive, construise et mette en exploitation des voiries durables, privilégiant le confort et la sécurité des usagers, en un mot, des infrastructures routières plus sûres.

C’est aussi le lieu d’insister sur la nécessité, pour le Burkina, de se mettre aux normes internationales, notamment en matière de giratoires. Dans ces types de carrefours, la priorité doit être donnée aux véhicules engagés dans l’anneau pour les laisser sortir. Des panneaux « céder la priorité à gauche », pour les véhicules entrant, doivent être mis en place, et bien en évidence. En effet, la pratique actuelle à Ouagadougou déroute les conducteurs étrangers.

Le Burkina est membre de l’Association mondiale de la route (AIPCR) depuis 1991. Cette association, forum d’échanges de connaissances et de bonnes pratiques dans le domaine des routes et du transport routier, regroupe 118 pays, pays qui sont représentés par leurs gouvernements, parce que l’adhésion est faite par ces derniers. Trente-deux (32) pays africains y sont membres. Le Burkina y est très actif.

Plusieurs experts burkinabè, du domaine des routes et du transport routier, provenant du secteur public et privé, prennent une part active aux travaux des différentes structures de l’AIPCR (Comité exécutif, conseil, commissions, comités techniques et séminaires). La sécurité routière occupe une place importante dans les travaux de l’AIPCR. C’est ainsi qu’en 2003, à l’occasion de son XXIIe Congrès mondial de la route, elle a publié les résultats de ses travaux sur cette question, dans un document de référence : Le manuel de sécurité routière.

On y retrouve l’aménagement proposé pour les courants « tourne à gauche » de la section 2 de notre projet. Dans le cycle actuel de l’AIPCR (2008-2011), deux de ses comités techniques travaillent sur les questions de Sécurité routière : « Pour des infrastructures routières plus sûres », et « opérations de sécurité routière ». Des experts burkinabè sont membres de ces comités techniques. « Les accidents de la circulation font 1,2 million de morts chaque année et une cinquantaine de millions de blessés ou de handicapés.

Si des mesures immédiates ne sont pas prises pour améliorer la sécurité routière, on estime que le nombre des morts sur les routes des pays à revenu faible ou intermédiaire augmentera de 80% d’ici 2020. En plus des souffrances provoquées, le coût des traumatismes dus aux accidents de la route dans ces pays est estimé à US $65 milliards, ce qui représente plus que le montant total de l’aide au développement reçu par ces pays ». (cf. : Rapport OMS).

Cela devrait nous faire réfléchir et nous amener à prendre les mesures qui s’imposent, et qui passent par :
- la conception, la construction et l’exploitation d’infrastructures plus sûres ;
- la correcte et complète formation des usagers desdites infrastructures (il faudrait leur apprendre surtout à savoir lire lesdites infrastructures, et pas seulement la conduite des matériels roulants) ;
- l’application effective des mesures coercitives prévues par les textes.

Idossou Tchona
Directeur général du BICI
Représentant du mandataire du Groupement GIC – Mali / AACE/BICI

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