Actualités :: Chronique : Un retour si hésitant des jeunes à la terre

Tremper les pieds et les mains dans la boue et sentir la terre. Se prendre d’affection pour elle, en tomber amoureux au point de s’y attacher pour l’éternité et de s’y investir toute la vie. Si les choses étaient aussi simples que cela, les organisateurs de la Journée nationale de la jeunesse (JNJ) auraient gagné un grand pari l’année dernière. Celui de réunir des milliers de jeunes sur les berges du barrage de Bagré pour les convaincre de jouer pleinement leur rôle dans le développement du pays en retournant à la terre.

Les promoteurs d’une caravane dans la région du Centre-Est au cours de la saison hivernale écoulée ont eu la même idée de cultiver le goût de la terre chez les jeunes. Cette nouvelle philosophie en faveur de la souveraineté alimentaire pourrait amener l’agriculture burkinabè, qui peine à nourrir les citoyens bien qu’elle occupe plus de 80% de la population, à gagner en performance et en productivité. Ainsi, la revalorisation de la terre constituerait un véritable débouché pour notre jeunesse.

Car représentant plus de 50 % de la population nationale, cette frange est en proie à des difficultés réelles d’embauche. Du fait que le système éducatif met chaque année sur le marché de l’emploi des milliers de cadres moyens et supérieurs pour peu de postes à pourvoir. Sans compter la horde d’enfants précocement déscolarisés. Le retour des jeunes à la terre, serait à plus d’un titre, un salut pour la nation et ses habitants : résorption du chômage des diplômés, contribution à la sécurité alimentaire et amélioration du rendement agricole grâce à une nouvelle catégorie d’exploitants.

Malheureusement, ce vœu est difficilement réalisable aujourd’hui, étant donné que les jeunes n’arrivent pas à se convaincre que l’agriculture peut nourrir son homme au Faso. Ce pessimisme ambiant s’enrichit des expériences infructueuses qui se content de bouche à oreille. Par exemple, le cas décevant du Sourou constitue encore un cauchemar chez les jeunes qui y ont osé à l’époque. Tant et si bien que ceux qui vivent dans la hantise de ce découragement face à l’aventure agricole, font fi des exemples réussis.

Aussi, ceux qui incitent les jeunes à croire à la terre, ne montrent pas bien souvent la voie à suivre. Les modèles de réussite agricole cités en exemple sont très souvent des hommes et des femmes dont la plupart œuvre officiellement dans le monde des affaires ou appartient à la haute sphère de l’administration. Pour ces gens-là, le champ n’est pas le gagne-pain principal. Car ils ont déjà bâti leur vie et assuré leurs « arrières ».

L’activité agricole intervient, juste par le plaisir ou, à tout le moins pour « mettre du beurre sur le pain ». Si bien que ces images d’hommes d’un certain rang social, affichant une mine radieuse sur un tracteur au milieu d’épis verdoyants n’incitent guère à s’engager. Alors que ces modèles devraient être une preuve d’humilité et un puissant stimulateur pour les générations montantes. C’est pourquoi, il faut œuvrer à dépoussiérer les mentalités et décomplexer les termes.

Si les opérateurs- modèles souhaitent vraiment voir leurs descendants se consacrer à l’agriculture, ils prendront le soin de les préparer et de les former à s’adonner à cette tâche. La réalité est là. En envoyant son fils à l’école, le paysan nourrit d’abord l’espoir de le voir exercer une fonction confortable en accédant au cercle des décideurs. A tort ou à raison, il n’espère pas retrouver sa progéniture en haillons, puant le foin ou la boue.

Cette vision est malheureusement celle partagée par de nombreux enfants qui pensent mieux faire que les parents en devenant « quelqu’un ». Elle est d’autant plus ancrée dans les esprits qu’un paysan n’a jamais accédé à un poste de ministre ou à un quelconque poste de responsabilité dans l’administration pour ses performances dans la production agricole. L’école est devenue un ascenseur social et tout le monde veut accéder au piédestal. Légitime ! C’est de cette même école que viendra la grande solution.

Montrer aux jeunes que tous les secteurs d’activité se valent pour peu que l’on y croit et qu’on s’y mette à fond avec dévouement. Il n’y a aucun complexe à sentir le foin ou la bouse de vache. C’est pourquoi, ils sont nombreux, les paysans burkinabè qui sont fiers de la place qu’ils occupent dans le développement de notre pays. Depuis la nuit des temps, ils vivent dignement du fruit de leur labeur et s’occupent de leur famille du mieux qu’ils peuvent, y compris la scolarité de beaucoup d’enfants devenus aujourd’hui de grands responsables.

Etant sortis d’une école, munis d’un savoir-faire, les jeunes d’aujourd’hui, avec des moyens et techniques innovants, peuvent s’épanouir dans l’agriculture et même créer des emplois. Le secteur agropastoral allant de l’exploitation à la commercialisation en passant par la conservation, le transport et la transformation génère des activités connexes toutes aussi rentables les unes que les autres.

C’est donc un domaine transversal. Sur ce terrain, la formation professionnelle a du pain sur la planche : donner le savoir, le savoir-faire, le savoir-être, inculquer l’esprit d’entrepreneuriat agricole à la génération montante.

La jeunesse de notre population doit être une chance, un atout pour le développement du pays et non un fardeau. Il appartient à celle-ci de prendre son destin en main en misant fortement sur la terre. Car qui ne risque rien n’a rien ! dit-on. L’économie nationale reposera encore longtemps sur l’agriculture. Et la prééminence des importations à coup de milliards de F CFA de denrées tels le riz, le lait convainc qu’il y a de bonnes affaires à faire en s’investissant dans la terre .De toute façon, l’histoire retient que dans toutes les entreprises humaines, il y a eu des pionniers.

Assetou BADOH (badohassetou@yahoo.fr)

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