Actualités :: Inondation à l’Est : Manni et Pièla victimes de la furie des eaux

Les pluies diluviennes qui se sont abattues en cette fin du mois de juillet, essentiellement dans la province du Namentenga, n’ont pas fait beaucoup d’heureux dans cette partie du pays, de même que certaines localités de la région de l’Est. Des barrages endommagés ou débordés sous l’effet des eaux ont envahi des concessions et des champs. Manni et Pièla, des localités de la province de la Gnagna, où il n’a pourtant pas beaucoup plu, ont subi la fureur des eaux, à cause de leurs barrages qui ont fait le plein. Le bilan est lourd : des milliers de sans-abri, de nombreux dégâts matériels, des champs envahis et des pertes en vies humaines. Sur le terrain, les secours s’organisent tant bien que mal.

De mémoire de « Mannilais », une telle quantité d’eau n’avait été aperçue dans leur village. Quatre jours après le passage des eaux, Manni, paisible localité dans la Gnagna à deux cents trente km de Ouagadougou, se remet difficilement du sinistre. En cette matinée de mardi, les échoppes et autres hangars de mécaniciens, de vendeuses de légumes…ont repris tranquillement leurs activités.

Mais les marques sont toujours visibles. Le secteur n°1 de la ville, juste en bordure de la digue du barrage qui a cédé, est presque rayé de la carte de la commune rurale de Manni.

Des cases rondes, seules quelques chaumes en paille ont résisté et les autres maisons ne sont plus que des tas de débris de terre, de bois et de tôles froissées. Des habits, des canaris et des calebasses cassés jonchent le sol. Les quelques bâtisses qui ne sont pas encore à terre sont fendillées du toit jusqu’à la fondation, donc inhabitables.

A la compagnie de gendarmerie de la paperasse sèche toujours au soleil. « Toutes mes maisons se sont effondrées. Mes vivres et ma volaille ont été emportés par l’eau. J’ai tout perdu », explique le vieux Poané Mano, visiblement encore sous le choc. Dans la famille Komondi, aucun habitat n’a tenu. Ses dix concessions se sont écroulées coup sur coup, témoigne le chef de famille.

Un peu plus loin, en profondeur du village et toujours aux abords du barrage, au secteur n°2, les plants de maïs totalement jaunis ou asséchés à certains endroits, s’étendent à perte de vue. Preuve qu’ils ont séjourné pendant plusieurs jours dans l’eau. Les rizières ne sont plus que de vastes étendues de mare.

Hahadou Bourgou résidant dans les proximités l’a échappé belle : « Ce jour-là, je me suis retrouvé rapidement dans ma case avec de l’eau jusqu’au menton. Mes trois cases sont toutes tombées ». Le plus dur pour lui, avoue-t-il, est qu’en pleine saison pluvieuse, il n’est plus possible de confectionner des briques pour envisager une éventuelle reconstruction.

« Cela fait des jours que je reste impuissant. Je ne peux même pas cultiver », se plaint Hahadou Bourgou. Telle est la pâle physionomie de Manni, ce mardi 27 juillet 2010, en réalité victime collatérale des hallebardes tombées dans toute la région du Centre-Nord. La province du Namentenga, en particulier, a reçu dans la seule nuit du 21 juillet, plus de 230 mn d’eau.

Plus grave, sous l’effet des eaux, le barrage de Tougouri cède, vidant son contenu dans presque tous les cours d’eau de la région de l’Est. C’est en particulier le trop plein d’eau du barrage de Zéguédéguin qui a été fatal à Manni, sinon il n’a pas trop plu dans la région. « Nous avons été alertés de l’avènement d’une grande quantité d’eau en provenance du Namentenga.

Et nous avons invité la population, surtout les riverains du barrage, à prendre leurs précautions. Comme d’habitude, il y en a qui ont voulu voir avant de croire », explique le préfet de Manni, Kanfiagui Haro, précisant que c’est la digue rafistolée lors des grosses précipitations de septembre 2009 qui n’a pas tenu. Le bilan est lourd à Manni et ses départements : 33 villages inondés, 20000 personnes sinistrées, d’énormes dégâts matériels, plusieurs hectares de champs envahis et heureusement pas de perte en vie humaine.

« Ce ne sont que des données partielles parce que des villages comme Siédougou Gongourgou, Boudongou, sont toujours inaccessibles. Nous recevons les informations des conseillers et des présidents des Comités villageois de développement (CVD) », déplore le chef de département de l’action sociale du district de Manni, Emile Guida. Dans le « chef-lieu » du département, ce sont sept sites qui accueillent quelques 6000 sans-abri, essentiellement dans des écoles.

Des secours limités

Pour le chef de département de l’Action sociale, dès les premiers instants du sinistre, le Conseil national de secours d’urgence et de réhabilitation (CONASUR) a réagi en mettant à la disposition des sinistrés 50 tentes, 300 couvertures, 300 nattes, 100 sacs de maïs, 15 cartons de savons. Le siège de l’association Tin Tua, l’un des sept sites d’hébergement de Manni, abrite environ 100 ménages.

Il est 11h ce mardi 27 juillet. Dès la grande porte, des voix se font entendre. Un jeune homme se démenant au milieu de dizaine de femmes et d’hommes tente de faire régner l’ordre. C’est l’heure de la distribution des vivres et des couchettes. Dramane Tonrogho, l’agent de l’Action sociale, feuille et stylo en main, procède à l’appel. Un groupe de dix personnes se forme instantanément pour le partage d’un sac de maïs de 100 kg.

Cinq reçoivent des nattes et le reste se contente seulement d’une couverture. In fine, chaque sinistré s’en tire avec à peine une bassine de maïs, une boule de savon et une natte ou une couverture. « La répartition est difficile.

Distribuer un sac de maïs de 100 kg à 10 personnes n’est pas chose aisée », parvient à dire Dramane Tonrogho tout en sueur. Le vieux Poané Mano, le sinistré du secteur n°1, arrivé à ce centre d’hébergement avec pour seuls bagages, quelques effets ainsi qu’une porte et deux fenêtres, s’inquiète pour sa famille. « J’ai neuf personnes à ma charge et je ne sais pas ce que je ferai avec une boule de savon et quelques grains de maïs » , s’agace-t-il.

Le besoin de tentes et de produits de première nécessité sont bien réels à Manni. Pour le chef du département de l’Action sociale de cette localité, Emile Guida, les dons reçus jusqu’à présent, sont largement en-deçà des attentes, si bien que la priorité est accordée aux sinistrés les plus durement touchés.

« Les salles de classe ne suffisent plus à accueillir tout le monde. De nombreuses personnes dorment dans la cour sous des hangars protégés par des imperméables », renchérit le 1er adjoint au maire de Manni, Hubert Tindano. Le prefet du département a rassuré qu’un SOS a déjà été lancé lors du passage de la délégation gouvernementale, le dimanche 25 juillet. « Il nous faut urgemment des tentes pour reloger surtout les sinistrés de la périphérie » , relève-t-il aussi.

Pièla pleure ses fils

Manni n’a pas été la seule victime des trombes d’eau qui sont tombées dans la province du Namentenga. A 65 km de là, la commune de Piéla n’a pas été épargnée. Le cours d’eau traversant la localité, la Sirba, a aussi fait le plein. Un peu trop même, à en croire un habitant à proximité du fleuve : « je n’avais jamais vu autant d’eau de ma vie ». Tout comme à Manni, les dégâts sont énormes. Des hectares de champs de maïs et de rizières sont envahis. Des concessions, des boutiques et des habitats ont été détruits.

En somme, les inondations ont fait moins de sinistrés dans cette région qu’à Manni. Mais l’atmosphère, en cette après-midi du 27 juillet, est toujours lourde, des jours après le triste dimanche du 25 juillet. Les visages sont graves et une foule rassemblée sur les rives du fleuve, scrute l’horizon sous le « rugissement » de l’eau. Un tracteur tentant de faire traverser des gens qui revenaient de Ouagadougou, s’est renversé dans le fleuve avec à son bord, plus d’une vingtaine de personnes.

Seules 13 personnes ont été sauvées ce jour-là. L’un des sauveteurs, Sibiri Dayamba se souvient : « Un car en provenance de Ouagadougou ne pouvant pas traverser le pont à cause de l’eau, a déposé ses passagers. Le tracteur qui venait de Bilanga a embarqué un certain nombre d’entre eux. Au milieu du pont , l’on a senti que le véhicule glissait vers le déversoir et on l’a vu se renverser par la suite.

C’est en ce moment que nous avons plongé dans l’eau pour essayer de les secourir ». L’eau s’étant un peu retiré, le tracteur était maintenant visible au bas du déversoir. Les recherches pour retrouver les victimes se poursuivaient encore ce mardi 27 juillet. Huit corps ont été retrouvés par les sapeurs-pompiers et leur inhumation se déroulait à notre arrivée. « C’est pénible. Depuis le jour du drame, 11 corps ont été repêchés.

Ce qui est grave, nous ne savons pas exactement le nombre de personnes que le tracteur transportait », s’inquiète le maire de Pièla, Baanhanla Tankoano, la voix émotive, un peu noyée par le vrombissement du moteur des canaux de sauvetage des sapeurs-pompiers toujours à la recherche d’éventuelles victimes. Elle affirme être un peu apaisée pour l’instant, car aucune famille n’est venue encore notifier la disparition d’un des siens.

Tout compte fait, le bilan des inondations dans les départements de Manni et de Pièla est lourd. Les différents ouvrages hydrauliques ayant été fortement endommagés, les populations craignent le pire pour la suite de la saison.

A preuve, à Manni, certaines parties de la digue ont été fortement touchées et tiendront difficilement face à de nouveaux assauts de vagues. Aussi, à quelques kilomètres de là, dans le village de Dakiri, le barrage ayant reçu une grande partie de l’eau de Tougouri, voit son déversoir se dégrader dangereusement. La prudence est donc recommandée dans ces localités, surtout que certains quartiers, pourtant lotis, sont presque dans le lit des barrages.

Sié Simplice HIEN


Inondations au Centre-Nord et à l’Est : Le CDP exprime sa compassion aux populations sinistrées

Le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) à travers ce communiqué, exprime sa compassion aux populations sinistrées des régions du Centre-Nord et Est, suite aux inondations de la semaine écoulée.

Suite aux inondations qui ont frappé les régions du Centre-Nord et de l’Est, faisant un mort et environ soixante mille sinistrés, la destruction d’infrastructures socioéducatives et économiques ainsi que d’importants dégâts matériels, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) exprime sa compassion aux populations sinistrées des deux régions.

Le CDP salue, d’une part la solidarité agissante des autorités politiques et administratives régionales et des bonnes volontés, qui ont déployé d’importants moyens humains et matériels pour le relogement des sinistrés en attendant que des solutions définitives soient trouvées et d’autre part, les mesures idoines que le Gouvernement a prises avec promptitude pour faire face à la situation.

Au nom de la Direction Politique Nationale et de l’ensemble des militants du CDP, je témoigne notre solidarité et notre soutien aux populations sinistrées en ces moments difficiles et j’adresse nos encouragements et nos félicitations aux autorités locales pour leur diligence.

Démocratie-Progrès-Justice

Ouagadougou, le 27 juillet 2010

Le président du Parti, président du bureau politique national

Roch Marc Christian KABORE

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