Actualités :: Le groupe ethnique des Kassena au Burkina Faso

Les Kassena font partie des cultures fréquemment appelées " gourounsi ". Je ne vais pas adopter cette appellation, largement attestée par de nombreux documents depuis les récits des voyageurs de la fin du siècle dernier. Depuis le temps des linguistes Krausse et Chritaller, le terme a été clairement défini au niveau linguistique, et sa valeur distinctive réside seulement à ce niveau : il y a un groupe de langues qu’on appelle " langues gourounsi ", mais il serait faux de parler d’un groupe culturel gourounsi. La culture ou les peuples gourounsi n’existent que dans un sens négatif et celui d’une exclusion.

On nomme ainsi ceux qui ne sont pas des Mossi et qui ne possèdent pas le système des " naba " comme les Mossi et qui ne sont ni des Dagomba ni des Mamprussi. Jusqu’à présent, aucun aspect d’identification culturelle ou historique n’a été présenté pour justifier ce terme, sauf la parenté linguistique. La discussion menée par Nicolas (1952) et Zwernemann (1958) s’est limitée à montrer le sens pratique de ce terme, mais - à cette époque - on ne s’interrogeait pas trop sur l’identification culturelle des gens eux-mêmes.

Les Kassena, situés au sud du Burkina Faso, comptent parmi les anciens peuples du pays (Kiéthéga 1993a). St Jalmes (1972) a étudié une tradition orale qui raconte un mythe d’origine selon lequel les Kassena étaient des autochtones de la montagne de Tiébélé. Zwernemann (1969), par contre, suppose que l’origine est un village appelé Kassanga situé à une vingtaine de kilomètres de Pô, dans le Sud-Ouest. La chefferie de Tiébélé, quant à elle, se déclare être héritière d’un immigrant mossi, qui a su défendre les gens locaux au cours de plusieurs batailles et qui a été élu chef plus tard.

Pour l’instant on ne peut rien ajouter à ces informations, qui sont au moins partiellement contradictoires. Retenons de ces données la prétention des Kassena d’être des autochtones et l’influence des Mossi qui - malgré le processus d’assimilation - sont présentés comme l’origine de la chefferie locale. Grâce aux travaux de M. Gomgninbou (1989, 1994), une autre époque semble être beaucoup plus claire. Il s’agit de la pénétration de l’islam dans la deuxième moitié du 19e siècle. Elle a été au moins partiellement caractérisée par des razzis des bandes zaberma à la recherche d’esclaves vendus ensuite en pays dagomba, dans le sud. Plusieurs villages ont été pillés à cette époque sans pitié. Les notes de Binger (1892, II : 17) qui y passa en 1888 témoignent des dévastations et du dépeuplement causés par les Zaberma.

Une histoire précoloniale des Kassena devra également accorder un statut particulier à l’origine des Kassena de l’ouest, habitant entre autres les villages de Koumbili et Guiaro. Ceux-ci étaient exposés autrefois à une très importante influence des Mossi de Nobiri. Ensuite il y a les Kassena de l’Est, qui représentant, par l’effectif de leur population, le sous-groupe le plus important. Ils se distinguent des Kassena de Guiaro et Koumbili par une architecture différente (Bourdier et al. 1983, 1985) et - ce qui sera encore plus important pour la suite du présent exposé - par leurs techniques agricoles.

Déjà Tauxier (1912 : 201) avait signalé deux groupes différents dans la région : Kasson-Fra et Kasson-Bourra. Dittmer (1961) indique un troisième sous-groupe, les Kassena du Sud, résidant dans la région de Ghana dans l’actuel Ghana. Liberski (1991 : 82 ff.), qui a effectué tout récemment une enquête de longue durée chez les Kassena de l’Est, a raconté de manière fort colorée comment elle a cherché l’endroit où se trouvaient les " vrais " Kassena, avant de devoir conclure qu’il n’y en avait pas. Retenons, de ces différences locales, qu’on trouve plusieurs sous-groupes, qui n’ont pas les mêmes origines et qui varient selon la vie matérielle comme l’architecture et l’agriculture.

Les recherches de notre équipe (G. Miche, SFB 268 Université de Bayreuth) de linguistes ont eu comme résultat que les locuteurs de la ville de Pô sont très proches de la langue de Guiaro et de Koumbili. En général, le dialecte des Kassena de l’Ouest est beaucoup plus homogène que celui parlé à l’Est. Des différences très fines entre les parlers de Kampala, Tiébélé, Guenon et Kaya sont un indicateur permettant d’établir l’ancienneté de la population locale. Mentionnons, dans ce contexte, que plusieurs villages dans l’actuel Ghana dont les habitants revendiquent d’être des descendants des Kassena de l’Est se sont assimilés à la culture dominante des Nankana, y compris dans l’adoption de cette langue (Zajakowski 1967). En raison de l’ancienneté supposée et de l’importance de la population, nos recherches ont porté pour la plupart sur les Kassena de l’Est dans les cantons de Tiébélé et Kampala.

Source : Hans Peter Hahn, Cent ans d’histoire, 1895 - 1995, Tome 2.

Par Bendré

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