Actualités :: Joseph Yaméogo : Le spleen d’un prêtre burkinabè dans une France en crise de (...)

A 53 ans, l’abbé Joseph Yaméogo entame en juin prochain sa troisième année sabbatique au diocèse de Lille alors qu’il n’en avait demandé qu’une. Presque smicard avec 122 euros de loyer, il réfute l’idée que ses avantages financiers soient un signe de bien être dans une société française en perte de valeur humaine.

La croix pendante au cou. Une alliance de chasteté à l’annulaire gauche. Ce décor ne réussit pas à cacher ce personnage en guerre intérieure de choc culturel. Le père longe la rue qui va de la station du métro à son appartement. Tête baissée. Il ne regarde que ses orteils. Jusqu’à ce que le bruit des pas d’une personne arrivant en face lui fassent lever la tête. C’est pour éviter de heurter la personne. Dans le métro, il s’abstient de dire bonjour à ceux qui sont à côté de lui. Même si sa conception burkinabè des rapports humains est bien différente. L’abbé y met du sien pour s’adapter dans une France en perte de valeur.

Le bonsoir désemparant !

Ce vendredi soir, c’est dans la salle à manger du rez-de-chaussée au 78 rue des Ecoles à Hellemmes que je m’entretiens avec l’abbé Joseph Yaméogo. Pour commencer, il philosophe : « Les occidentaux ont leurs modes de vie et il faut faire avec ! » Pourtant, dans son être intérieur, le prêtre vit mal ses années sabbatiques occidentales : « Il a fallu que je me fasse violence par rapport aux mœurs de cette société », avoue-t-il. Avant de poursuivre : « Ce soir même, j’ai dit « bonsoir » à une dame à la poste que je croyais avoir rencontrée dans ma paroisse. Elle en était désemparée. Parce qu’elle se demandait pourquoi je la saluais. »

Michel Giraudot, un de ses vieux amis français et connaisseur du Burkina, savait que cela lui arriverait. « Ce n’est pas les mêmes rapports avec le prêtre au Burkina qu’en France. Ici, il est un homme ordinaire comme tout le monde. Et même les communions sont beaucoup plus des occasions du manger et du boire, mais au fond elles n’ont pas autant de sérieux que là-bas. », rapporte t-il.

L’histoire de son exil commence en Juin 2007. L’abbé Joseph Yaméogo arrivait au bout de vingt ans de sacerdoce à Koupéla. Il demande alors une année sabbatique à son évêque. Destination le nord de la France. Parce qu’à La Madeleine, dans la banlieue lilloise, le père s’était lié d’amitié avec une famille. C’est cette famille madéleinoise qui coordonne les démarches entre les deux diocèses : celle de Lille et celle de Koupéla.

Tout faire tous les jours

A l’arrivée du père, l’archevêque de Lille le nomme vicaire de la paroisse Sainte Thérèse de l’enfant Jésus à Hellemmes, toujours dans la banlieue lilloise. Sa mission est bien définie : la célébration des mariages, des baptêmes et des messes pendant la semaine. Seul bémol pour les unions sacrées : « Je suis choqué de voir que lors de la célébration d’un mariage, les participants ne savent même pas dire : Amen ! Cela signifie qu’on vient au mariage juste pour se faire voir. », se morfond le père. Il s’occupe aussi des enterrements et des réunions de paroisse. Tout cela en secondant le père Emile Reims, curé principal.

Après plus d’un an de service à Hellemmes, et à la fin de son année sabbatique demandée, il rempile pour une autre année. L’archevêque Séraphin Rouamba, son évêque burkinabè lui en a accordé le droit. C’était selon le père Joseph, « pour vivre véritablement ce que j’ai commencé à expérimenter », fait-il valoir. L’évêché de Lille en profite pour le nommer curé de Fives, une autre paroisse de la banlieue lilloise. C’est là que sa tête commence à se remplir de mille et une choses à faire en même temps. Ce n’est pas comme au Burkina, où il exécutait les tâches au jour le jour, selon la « volonté du Seigneur ». En France, on tient à tout faire tous les jours. Conséquences, conclu le prêtre : « On ne sait même plus si on a fait quelque chose de bien utile. Mais j’essaie de marcher à leur rythme. » En fin aôut 2010, ce sera sans appel : « Je rentre au pays. Parce que les fidèles de là-bas ont plus besoin de moi. », assure le père Joseph.

Par Bruno Sanogo à Lille
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