Actualités :: PROCES CONTRE UN GYNECOLOGUE ET DES SAGES-FEMMES A BANFORA : La justice a (...)

Le 9 février 2010, quatre agents de la maternité du CHR de Banfora comparaissaient devant le Tribunal de grande instance de Banfora pour répondre de la mort d’une patiente du nom de Sita Traoré sur la table d’intervention. Il s’agit du gynécologue, le docteur Dao Yissou, l’unique médecin spécialiste de la région des Cascades et de trois sages-femmes. Le chef d’accusation qui pesait contre eux était la non-assistance à personne en danger et homicide involontaire.

Lorsque le président de séance a porté le verdict à la connaissance du public en disant que les quatre prévenus était relaxés pour infraction non constituée, les agents du CHR de Banfora fortement mobilisés au palais ont poussé des cris de joie et de victoire. Personne ne voulait se faire conter l’événement. C’est à croire qu’ils ont suspendu leur activité ce jour ou qu’ils ont obtenu une autorisation pour se rendre au palais où ils entendaient soutenir leurs collègues dans l’affaire ministère public contre docteur Dao Yissou et 3 sages-femmes que sont Mme Sanou/ Zerbo Haffioussatou, Mme Koné/ Soulama Mariam et Mme Sogné/ Palm Judith pour non-assistance à personne en danger et homicide involontaire.

Tout a commencé le 18 novembre 2009 lorsque la victime Sita Traoré dont la grossesse était à terme a été reçue à la maternité du CHR. Elle avait été référée dans ce centre par le CSPS de Kankounandéni pour une meilleure prise en charge. Les premiers examens à la maternité ont révélé que le bébé qu’elle portait était sans vie. Le 20 novembre 2009, elle est admise au bloc opératoire avec à son chevet Dr Dao Yissou et l’équipe de chirurgiens. Un peu plus tard, son mari, Barnabé Ouédraogo, s’est vu dire que sa femme n’a pas survécu à l’intervention qui, pourtant, était presque finie.

Ce dernier a difficilement accepté la situation, d’autant plus que face à la souffrance de sa femme, il avait supplié les agents de santé de procéder rapidement à une intervention pour extraire le fœtus mort et sauver ainsi sa femme. Cette requête, il la formulera plusieurs fois, selon sa déclaration que le président du Tribunal a lue publiquement dans la salle d’audience. Pour lui, sa femme est morte parce que l’intervention qui, selon lui, devait la délivrer est arrivée avec beaucoup de retard. De plus, il trouve que les trois sages-femmes qui ont assuré la garde et la permanence durant le séjour de sa femme à la maternité ont toutes négligé son épouse. C’est pourquoi, il a porté plainte au palais de justice. Quelques jours plus tard, Barnabé Ouédraogo y est reparti mais cette fois pour retirer sa plainte. Bien qu’étant le mari de la défunte et premier à se plaindre dans cette affaire, il n’a pas été aperçu dans la salle du procès. Les raisons qu’il a avancées sont qu’il était sous le coup de l’énervement le jour où il a perdu sa femme et avec le recul, il reconnaît être allé vite en besogne. Il venait, a-t-il dit, de se rendre compte que c’est la volonté divine qui s’était manifestée.

Le mari retire la plainte...

Le retrait de la plainte par le mari n’a pas pour autant éteint l’action publique. Le procureur du Faso près le Tribunal de grande instance de Banfora, Mamadou Traoré, s’est auto-saisi de l’affaire. Après plusieurs mois d’instruction, elle a été vidée le mardi 9 février 2010. Dr Dao et ses agents ont donc comparu devant le Tribunal. Pour leur avocat, Me Ambroise Farama, l’infraction reprochée à ses clients, à savoir non- assistance à personne en détresse et homicide involontaire, n’est pas constituée. Il en veut pour preuve leurs déclarations et réponses aux différentes interrogations du Tribunal. Selon ceux-ci, la patiente, dès son arrivée à la maternité, a bénéficié de tous les actes et examens que son cas nécessitait. Ce qui leur a du reste permis de se rendre compte qu’elle a déjà subi au moins une césarienne et que de surcroît, le bébé qu’elle avait en son sein ne vivait plus.

Mieux, les sages- femmes reconnaissent être intervenues auprès de Dr Dao qui a fait subir à la patiente une échographie le dimanche 19 novembre 2009 bien que ce ne soit pas un jour ouvrable. Cette échographie a confirmé la mort du fœtus, déclarent-elles. De plus, la poche des eaux de la patiente était rompue et un traitement antibiotique pour éviter toute infection a été institué. « Dans le cas d’espèce, nous privilégions toujours l’expulsion du fœtus mort pour la voie basse », a expliqué Dr Dao. Selon lui, lorsqu’il y a mort fœtale, il n’y a plus d’urgence pour le bébé et cela ne représente aucun danger pour la maman. L’expulsion du bébé se fait de façon naturelle et pour ce faire, on peut attendre pendant 4 à 6 semaines. « Ce qui évite de cisailler la femme, de cicatriser son utérus et de lui faire courir les risques d’une intervention chirurgicale ». De plus, renchérit Dr Dao, "en tant que médecin, il n’appartient pas au mari de me dire les actes que je dois faire sur sa femme. Au bout de 48 heures d’attente, poursuit-il, nous n’avons vu aucune réaction.

Alors, nous avons décidé d’intervenir". Pour Me Farama, tous ces faits montrent que ses clients se sont occupés de la patiente. "C’est lorsque nous étions en train de faire la suture après avoir extrait le bébé mort, indique Dr Dao, que l’anesthésiste nous a informé que la patiente a fait un arrêt cardiaque". Pour Me Farama, seule une autopsie, que ses clients auraient demandée si la plainte du mari avait été formulée avant l’inhumation, aurait permis de savoir la cause exacte de la mort. Pour lui, le cas de Sita Traoré, puisqu’elle a déjà été césarisée, ne devrait pas passer par un CSPS. Elle devait se présenter dans un centre médical avec antenne chirurgicale avant le début du travail. Prenant l’exemple de la mort du musicien américain Michael Jackson, Me Farama a indiqué que l’équipe médicale a agi selon des prescriptions de la médecine. Elle n’avait pas à céder à la pression du mari lorsque celui-ci, à plusieurs reprises, a exigé l’intervention. Mais le parquet est resté ferme. Pour le procureur, l’intervention est arrivée avec beaucoup de retard.

Ce qui a pu causer la mort de la patiente dont le cas, selon lui, a été négligé par le gynécologue. Le procureur, dans sa réquisition a demandé la relaxe pour les trois dames pour infraction non constituée. Par contre, pour Dr Dao, premier responsable de la maternité, il a trouvé que l’infraction de non- assistance à personne en détresse est fortement caractérisée. Selon lui, il y a eu une négligence de la part du gynécologue. Par conséquent et bien que comprenant la difficulté dans laquelle se trouvent les prévenus, eux qui aident à donner la vie, il le juge coupable et demande qu’il soit retenu dans les liens de la prévention avec une amende de 600.000 F CFA assortie de sursis. Le procureur ne sera pas suivi dans sa requête par le président du Tribunal. Celui-ci a prononcé la relaxe pour tous les prévenus.

Une première pour Me Farama

Après le verdict, nous avons approché Me Ambroise Farama qui confie que c’est la première fois qu’il défend un tel dossier. selon lui, l’intérêt pratique de ce procès est qu’il interpelle les agents de santé.

"J’avoue qu’en tant qu’ avocat, c’est un sentiment de satisfaction qui m’anime. Je suis venu défendre des prévenus, lesquels, après un procès qui a été assez long, ont été relaxés pour infraction non constituée. Je tire également le chapeau au Tribunal qui a été suffisamment patient et qui a fait preuve de professionnalisme. Comme vous l’avez constaté à l’instruction, cela a permis aussi bien aux professionnels de droit que nous sommes d’être éclairés sur les circonstances dans lesquelles la défunte a trouvé la mort, mais cela a également permis aux justiciables qui étaient présents dans la salle de comprendre que s’il est vrai que la responsabilité des médecins peut être engagée, encore faut-il que cette faute soit au préalable établie et que cette faute ait pu conduire au préjudice. Dans la cas d’espèce, il n’a pas été démontré une seule faute imputable au gynécologue et aux sages-femmes encore que cette faute ait causé la mort. Je pense que c’est un procès qui a été éducatif pour tous, qui a interpellé les agents de santé sur leurs obligations et qui interpelle les patients potentiels que nous sommes que même si nous devons engager la responsabilité des médecins, nous devons avoir une juste mesure parce qu’ils ont une obligation de moyens et non une obligation de résultats".

Par Mamoudou Traoré

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