Actualités :: 7 novembre 1982 : Quand l’histoire s’accéléra

A écouter les observateurs, aucun régime n’a bénéficié d’un soutien populaire franc et massif comme celui du Colonel Saye Zerbo. Pourtant, son régime n’a vécu que deux ans. Il a donné au peuple ce que le régime Compaoré lui refuse : la transparence dans la gestion de la chose publique. Même si ce n’était pas le cas, certaines mesures laissaient y penser. Au départ, tous les membres du régime ont fait une déclaration de leurs biens devant un notaire. Une commission d’épuration chargée d’enquêter sur les détournements de fonds publics a été créée. Le CMRPN a essayé de combattre l’absentéisme dans les services ; et ce qu’il appelle l’émigration abusive. Les traitements des directeurs de société sont plafonnés. Il veut frapper les esprits des Burkinabè (Voltaïques à l’époque).

Ce qui va suivre se passe de commentaire. Les griefs contre le régime des colonels se sont vite accumulés. Les observateurs les plus critiques parlent de fascisation à outrance. Il leur est reproché de se lancer dans un enrichissement illicite à grande vitesse dont les manifestations sont les malversations, les détournements de fonds publics, l’étalage d’un luxe insolent, l’achat de voitures luxueuses, etc. Le régime des colonels a eu ses prisonniers politiques. Les dignitaires du Rassemblement Démocratique Africain (RDA) ont fait les frais de la répression. Il n’hésita pas à mettre en résidence surveillée certains militaires. De ceux là, étaient les Capitaines Thomas Sankara, Henri Zongo et Blaise Compaoré. C’est dans ce contexte que surviendra le troisième coup d’Etat militaire avec l’avènement du Conseil du Salut du Peuple (CSP) du médecin-commandant Jean-Baptiste Ouédraogo. A quelques variantes près, l’on se croirait dans le Burkina du XXIè siècle. Ce qu’il faut reconnaître aux colonels, c’est qu’ils n’ont jamais céder à commettre des liquidations physiques.

Partout où l’on parle de pouvoir, les camps sont retranchés. Le CMRPN a-t-il exacerbé les clivages ? Il semble que pendant la IIIè République que les colonels ont renversée, c’était le RDA contre le RDA. Que dire d’autre ? En effet, à la présidentielle de 1978 Sangoulé Lamizana était le candidat du RDA.

Le Premier ministre à l’époque était Issouf Conombo pendant que Gérard Kango Ouédraogo occupait le perchoir. Nous étions dans la même configuration que celle d’aujourd’hui. Malgré tout, le RDA a perdu le pouvoir. En fait à l’époque, l’on soupçonnait Gérard Kango Ouédraogo, président de l’Assemblée Nationale de détenir à la fois le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif et de bloquer le vote des lois que son parti soumettait au Parlement. L’opposition était mise à la touche comme aujourd’hui. Cela va créer une situation explosive dont hériteront les colonels. Les colonels mirent sous coupe réglée l’opposition et les syndicats. Les civils ne semblaient constituer à leurs yeux un danger pour leur pouvoir. C’est au sein de l’armée qu’ils accentuèrent les clivages. Des privilèges pour les officiers supérieurs et la marginalisation pour les autres. Les colonels craignaient-ils que des commandants les renversent ? Toujours est-il que leur attitude donna le prétexte à un troisième putsch militaire.

Au lendemain de ce coup d’Etat, l’on pouvait dénombrer quatre clans dans l’armée. Il y avait deux courants conservateurs dont on dit qu’un serait animé par le Général Marc Garango, alors ambassadeur à Washington et l’autre par le Colonel Yoryan Gabriel Somé. Un troisième courant était porté par le Médecin-colonel Jean Baptiste Ouédraogo et le quatrième par le Capitaine Thomas Sankara. Ce fut le point de départ d’une escalade meurtrière. Le pays sombra dans une ère de violences politiques avec son cortège de morts. Aujourd’hui, ces morts se chiffrent par centaines. C’est un passif que personne ne veut assumer. La parodie du 30 mars dite Journée nationale de pardon n’y changera rien. Dès lors, la société est divisée entre ceux que le statu quo arrange ; ils se donnent les moyens de contrôler la justice et ceux qui attendent la vérité, et plus tard la justice sur ces crimes.

La solution a consisté pour les bénéficiaires de cette escalade à ramener un ordre néocolonial dans lequel, certains espéraient trouver le salut pour la Nation. Ainsi, sommes-nous tombés dans une sorte de IIIè République bis. Il n’y a pas eu de réponses aux aspirations du peuple. Les tenants de la IVè République ont simplement opéré une simple exhumation des maux que le peuple a combattus en renversant d’abord le régime de Maurice Yaméogo, en apportant son soutien à presque tous les régimes militaires pare qu’il les voyait comme des pouvoirs de libération. La IVè République a porté à la perfection, toutes les anciennes méthodes répressives dont usaient les régimes précédents. Après tant de sacrifices, le peuple n’a eu droit à aucun changement. Il est évident que le peuple n’a rien à attendre de la IVè République. L’échec est structurel. L’ordre colonial ne peut pas développer un pays.

Aziz Vincent LEGMA

L’Indépendant

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