Actualités :: Université de Ouagadougou : « Le fameux cadeau fait aux enseignants-chercheurs en

Nous avons reçu du Syndicat national des enseignants-chercheurs (SYNADEC) un écrit à propos de l’offre de solution au problème de logement. Analysant ce cadeau du gouvernement, le syndicat pense que c’est « un véritable leurre ».

“Depuis bientôt deux décennies, les enseignants-chercheurs ont posé leur préoccupation relative à la résolution du problème de logement. Jusqu’en 1983, l’Etat consentait à louer des villas à concurrence de 120 000 fcfa pour y loger les Assistants débutant dans l’enseignement supérieur. Cette situation devait radicalement changer avec l’avènement du CNR. La Révolution démocratique et populaire, estimant que les enseignants-chercheurs coûtaient trop cher à l’Etat pour des commodités de logement, remplaça la formule par l’institution d’une indemnité forfaitaire de 50 000 fcfa, elle-même rabattue de 50% au titre de la participation à l’Effort populaire d’investissement (EPI).

Au début des années 1990, au moment de la transition démocratique, les enseignants posèrent le problème crucial du logement directement au Président du Faso, lors de sa visite à l’Université de Ouagadougou. Celui-ci promit, à l’époque, d’y trouver une solution.

Depuis lors, la question du logement des enseignants-chercheurs devint un véritable serpent de mer. Une décennie après la promesse de 1990, plusieurs formules furent préconisées sans succès : il en est ainsi de l’initiative du Chancelier Alfred Traoré, qui avait pris des contacts avec des sociétés immobilières de la place. Mais le système de paiement, très rigide, exigé par celles-ci fut dissuasif pour les enseignants. Le dossier fut repris par le Président Paré sans succès.

Puis ce fut le tour de Madame le Président Nacoulma, qui initia des négociations avec la société immobilière BTM. A cet effet, elle avait chargé feu le Professeur Nurukyor Claude Somda du suivi du dossier. C’est cette initiative qui a été poursuivie par le Président Koulidiati. Le protocole signé est l’aboutissement d’un long processus. Une première formule issue des négociations imposait les exigences suivantes au souscripteur : verser à l’entreprise immobilière BTM un apport personnel équivalant à 20% de la valeur de la maison, puis de cotiser jusqu’à atteindre 80% de la valeur de la maison avant que cette dernière ne s’engage à la construire et à la lui livrer dans les six mois suivants.

En analysant attentivement les conditions ainsi posées par BTM, il ressortait l’impossibilité pour l’enseignant-chercheur d’y faire face. En effet, pour verser les 20% dans des délais raisonnables, celui-ci serait obligé de contracter un prêt bancaire et de continuer de payer le loyer de son logement actuel. Pour atteindre les 80% de la valeur de la maison, il lui fallait cotiser pendant près de dix ans, si l’on s’en tenait, en 2008, à l’indemnité de logement de 55 000 fcfa qui lui était servie. Les villas en option finie étaient proposées au prix de 9 700 000 fcfa après d’âpres négociations.

Pour cette option de villa, l’apport personnel de 20% est de 1 940 000 fcfa. Si cette somme est versée par crédit bancaire, le contractant du prêt paiera près de 2 200 000 fcfa à la banque en tenant compte du taux d’intérêt moyen de 13% appliqué par la banque. Il fallait 30 à 36 mensualités pour payer ce crédit. Par la suite, il resterait à cotiser les 60% pour atteindre les 80% exigés, avant que BTM ne s’engage à construire la maison. 80% de 9 700 000 fcfa font la somme de 7 760 000 fcfa. Les 60% représentent la somme de 5 820 000 fcfa. En partant de l’indemnité de 55 000 fcfa, il faudrait 106 mensualités, soit près de 9 ans pour combler le taux exigible.

De surcroît, cet argent, versé dans le compte de l’entreprise, constitue pour elle de l’argent frais d’investissement et d’épargne. Au bout des 106 mensualités, les 7 760 000 fcfa auront produit un intérêt dont le cumul avec le capital de départ dépasserait largement la valeur de la maison. Or, dans le projet de contrat, l’entrepreneur se réservait le droit de réévaluer le coût de la maison en fonction de l’évolution du cours des matériaux de construction. On était donc en face d’un problème délicat, où un client qui s’engagerait pour une somme initiale pourrait se retrouver en train de payer le double de la valeur de la maison, sinon plus.

La seconde formule, qui est celle aujourd’hui retenue, implique, désormais, trois institutions : l’Université, BTM et la Banque de l’Habitat. Il n’est pas possible pour le client qui relève de l’Université de traiter avec une autre entreprise que BTM, ni avec une autre banque que celle de l’Habitat. Le client ouvre un compte d’épargne logement à 3,3%. Dès qu’il atteint les 20% du prix de départ de la villa sollicitée, la banque complète le reliquat de 80% pour permettre à BTM d’engager la construction de sa villa, qu’il livrera dans les 6 à 8 mois suivants. La démarche ainsi proposée est excellente et la mieux pensée de toutes les propositions précédentes.

Mais la formule retenue reste au-dessus du pouvoir d’achat des enseignants-chercheurs du Burkina Faso, dont la pauvreté a été mise à nue par cette opération immobilière. Madame Kaboré, Directrice de BTM, a bien raison de signaler qu’elle a l’expérience dans la construction de logements sociaux pour pauvres. Les enseignants-chercheurs se révèlent ainsi les pauvres des pauvres, puisque les prix étudiés pour les pauvres selon Mme Kaboré sont loin d’être à leur portée, eux qui s’évertuent à négocier difficilement une revalorisation de leur statut.

Après la signature du protocole d’accord, monsieur le ministre des ESSRS a insisté sur le fait que cette opération fait partie de la revalorisation du statut de l’enseignant-chercheur, laissant croire que ce point de revendication est résolu. Malheureusement, les faits sont têtus, et la réalité est toute autre. Des informations précises que le SYNADEC a obtenues du service immobilier mis en place à l’Université de Ouagadougou par la Banque de l’Habitat, il ressort les éléments suivants :

- BTM propose ses villas, toutes options confondues, à partir de la souscription de clients ayant un salaire minimum de 250 000 fcfa. A partir de ce salaire, ceux qui sont le plus dans le besoin, c’est-à-dire les assistants avec un salaire initial de 122 544 fcfa pour compter de janvier 2009 et les maîtres-assistants avec un salaire initial de 160 839 fcfa pour compter de la même date, sont carrément exclus de l’opération ;

- le taux d’intérêt appliqué par la Banque de l’Habitat est de 9% auxquels il faut ajouter la TVA au taux de 1,6% pour une durée maximum de 15 ans. L’apport personnel de 20% exigé doit être payé avant le 14 mai 2011.

Passée cette date, les clauses changent ! Après paiement de cet apport personnel, la BHBF fournit la contrepartie du montant sous forme de prêt au client et l’ensemble du montant initial de la villa (apport personnel + prêt) est viré dans le compte de BTM, à charge pour elle d’engager les travaux pour une durée de six mois. Ensuite le client paie, en fonction des types de villas, par mensualité sur 15 ans maximum, le prêt que la BHBF lui a fait ;
- à cela s’ajoutent les frais d’assurance du crédit et les frais domaniaux à payer à l’issue de l’acquittement du prêt bancaire.

Le tableau ci-dessous permet de visualiser les coûts réels de la formule retenue. Voici le très beau cadeau que le gouvernement a fait aux enseignants-chercheurs pour, selon lui, liquider définitivement leur problème de logement. Le Directeur de la Banque de l’Habitat, Monsieur Pierre Zerbo, affirme que c’est l’indemnité de logement et non le salaire qui servira à payer les mensualités du prêt.

Au regard du niveau de l’indemnité actuellement servie, 60 000 fcfa par mois, il apparaît impossible de faire face à l’encours de la dette auprès de la banque. Il en résulte que pour que ce scénario soit plausible, il faudrait une revalorisation conséquente de l’indemnité de logement des enseignants-chercheurs. Chose qui montre que la somme de 200 000 fcfa revendiquée par le SYNADEC reflète bien la réalité et ne relève pas de la surenchère contrairement à ce qu’a tenté de faire croire monsieur le ministre des ESSRS lors de son point de presse du 9 avril 2009.

De façon plus précise, il y a lieu de faire remarquer que la traite mensuelle de la villa la moins chère est de 84 931 fcfa : il s’agit d’une villa F3 économique option 2 semi-finie, qui coûtera à l’issue des 15 ans la coquette somme de 16 813 625 fcfa. La traite mensuelle de la villa la plus chère, la villa F4 de type 2, option finie, est de 171 569 fcfa pour un coût total de 33 965 845 fcfa ! Or c’est ce type de villa qui offre les commodités idéales pour l’enseignant-chercheur.

Malheureusement, la traite mensuelle de ce type de villa est supérieure au salaire initial du maître-assistant ! Ce qui n’est pas non plus à la portée du Maître de conférences ou du Professeur titulaire, puisque la traite mensuelle équivaut à 61,3% du salaire initial du premier et à 56% du salaire du second. Cette opération logement, fièrement annoncée par le gouvernement par la voix du Ministre des ESSRS, est une preuve supplémentaire de la situation peu reluisante du statut de l’enseignant du supérieur du Burkina Faso.

Le fameux cadeau, présenté à grand renfort de tapages médiatiques, s’avère un véritable leurre, car inaccessible à la plupart des enseignants-chercheurs. Il ne leur reste plus qu’à se confondre en salamalecs pour remercier le magnanime gouvernement de leur avoir fait miroiter leur rêve de logement. Oh misère, quand tu nous tiens !

Le Bureau national du SYNADEC

L’Observateur Paalga

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