Actualités :: Mgr PHILIPPE OUEDRAOGO (Nouvel archevêque de Ouagadougou) : « Je ne sais (...)
Mgr Philippe Ouédraogo

Nommé archevêque métropolitain de Ouagadougou le 13 mai 2009 par le pape Benoît XVI, Mgr Philippe Ouédraogo (évêque de Ouahigouya jusqu’à sa nomination) ne comprend pas ce qui lui arrive. Surpris par une telle grâce, il dit, à travers les lignes qui suivent, ses premiers sentiments après l’annonce de la nouvelle. Nous avons pu lui arracher cette toute première interview en tant qu’archevêque au téléphone, alors qu’il rentrait de Koubri où il s’était « réfugié » depuis le jour de l’annonce de sa nomination. Il parle de ce qui l’attend, de ses ambitions pour l’archidiocèse de Ouagadougou, des rapports qu’il aura avec les autres communautés réligieuses et les autorités politiques. L’homme d’Eglise qui sera investi dans ses nouvelles fonctions le 13 juin prochain et qui recevra son palium à Rome le 29 juin 2009, est tout ému.

Le Pays : Que ressentez-vous après l’annonce de votre nomination à la tête de l’archidiocèse de Ouagadougou ?

Mgr Philippe Ouédraogo (archevêque de Ouagadougou) : Je ne sais pas ce qui m’arrive, encore moins ce qui m’arrivera. Mais une chose est certaine : le champ dans lequel le Seigneur m’envoie ne m’appartient pas du tout. Il appartient au Seigneur lui-même, l’unique et bon Pasteur. S’il a permis cette nomination, que sa volonté soit faite ! A l’instar d’un bon nombre d’appelés de la Bible tel le prophète Jérémie, j’aurai de quoi tergiverser. Il n’est pas aisé de rentrer dans le point de vue de Dieu. Et pourtant, à l’instar de la Vierge Marie, j’ai appris, depuis mon ordination sacerdotale en 1973, à dire oui. Je reste toujours dans cette disposition fondamentale de disponibilité et surtout d’abandon et de confiance totale dans le Seigneur. Je reste dans le sentiment que je suis un serviteur pauvre, humble, dans le sang du Seigneur. Je compte sur le soutien et la prière de tous, chrétiens ou non, pour assumer cette nouvelle tâche.

Avez-vous été surpris par cette nomination ?

C’est une véritable surprise. Je ne pouvais absolument pas imaginer que je me retrouverais là, au siège métropolitain de Ouagadougou. Il en est de même pour Ouahigouya. Même en rêve, je ne pouvais pas imaginer un seul jour, un seul instant que je me retrouverais au siège épiscopal de Ouahigouya. Et me voilà ! Volonté de Dieu ! La surprise est aussi grande pour l’intéressé que pour les témoins.

Que redoutez-vous le plus ? Ce qui vous arrive ou ce qui vous arrivera ?

Je ne sais rien de ce qui m’arrivera. Ce qui m’arrive, c’est cette nomination. Je dois partir. J’ai quitté ma terre natale, qui est le Sanmatenga, en 1996 pour Ouahigouya. J’étais très bien intégré dans ce diocèse, tant au niveau des chrétiens qu’au niveau des non chrétiens. On vivait en famille et on essayait de faire quelque chose de beau pour le Seigneur. Voilà un nouveau départ. Abraham est parti, les apôtres ont dû partir. Ce mouvement de foi inévitable m’anime et je suis prêt à partir. Je viens pour un champ nouveau avec beaucoup d’inconnues et probablement avec beaucoup de défis qu’il faudrait déjà identifier.

Où étiez–vous et que faisiez-vous le 13 mai 2009 à 10h pendant que le nonce rendait publique votre nomination à Ouagadougou ?

Je m’étais « réfugié » à Koubri (ndlr, à 15 km de la capitale, chez les moines). Pourquoi Koubri ? Comme je l’ai dit, il n’est pas évident d’épouser les points de vue de Dieu. Je suis donc allé à Koubri pour me mettre à l’ombre des grands priants, les moines et moniales. Dès qu’ils ont appris ma nomination, j’ai dû céder à leur invitation pour célébrer une Eucharistie avec eux. C’était vraiment un climat de prière salutaire pour réaliser que je ne suis ni le premier ni le dernier dans cette tâche. Je voulais être branché au Seigneur pour savoir ce qu’il veut de moi et ne rien vouloir que ce que lui il veuille de moi, et de ne rien chercher d’autre que ce qu’il veut de moi.

Et puis, une pluie de messages de félicitations et d’encouragements. Une surprise aussi à ce niveau ?

Effectivement, j’en ai reçu beaucoup, des centaines. Je me demande comment faire pour répondre à tout ce merveilleux monde. Ils ont été nombreux, chrétiens ou non, au nom de la parenté, de la foi, de la connaissance, de l’amitié, qui se sont réjouis de ma nomination, à mon grand étonnement. Et me vint à l’esprit l’attitude de David : « Qui suis-je, Seigneur pour que tu m’aimes jusque-là ? ». Je reste plein de gratitude envers tout ce monde.

Cela dénote du fardeau qui vous attend …

Ces réactions m’ont effectivement permis de réaliser que ce n’est pas quelque chose d’anodin. Je voyais toute une série de réactions dans votre journal que je lisais. Un certain nombre d’attentes sont exprimées. Pourrais-je répondre à ces attentes ? Le Seigneur y pourvoira.

Quels sont vos projets pour l’archidiocèse de Ouagadougou ?

Il est prématuré pour moi de tracer un plan pastoral. Mais il y a une chose qui est clair : au seuil du 3e millénaire, le pape Jean-Paul II a lancé l’ensemble de l’Eglise sur une piste pastorale inédite. Partant de l’épisode de Jésus qui demandait aux apôtres d’aller au large, je souhaiterais que ma présence au milieu de ce peuple de l’archidiocèse de Ouagadougou puisse nous permettre de rêver ensemble. Martin Luther King disait que lorsque "Je rêve tout seul, c’est un rêve, mais lorsque ensemble nous rêvons de la même chose, c’est une réalité". Ensemble, nous devons rêver de continuer cette œuvre missionnaire et donner Jésus à notre monde. Rêvons d’accueillir et de vivre à fond l’Amour de Dieu et de le manifester autour de nous.

Il doit y avoir un embarras à Ouahigouya : joie pour votre nomination et tristesse de vous voir partir…

Je suis absent de Ouahigouya depuis ma nomination. Les avis peuvent être partagés. Ce qui est certain, j’ai vécu une expérience forte avec ce diocèse que j’ai servi et aimé, et qui m’a adopté. Nous avons eu beaucoup de chantiers dans ce diocèse. Nous avions beaucoup d’ambitions pour ce diocèse. Je souhaite que cela puisse continuer. Je dois ma nomination à Ouahigouya. Il y a 12 ans et 6 mois que je suis dans ce diocèse. Je pense que cette expérience pastorale est pour quelque chose dans ma nomination. Je rends donc grâce à Dieu et remercie le Yatenga et tous ceux du diocèse de Ouahigouya, chrétiens ou non, qui m’ont soutenu.

Qu’attendez-vous comme appui de votre prédécesseur, Mgr Jean-Marie Compaoré ?

Mgr Compaoré est un évêque émérite qui a droit au repos. Mais il a encore de la vigueur et il aime l’Eglise. C’est une chance. Pour moi, c’est un aîné que je ne peux pas contourner. J’entends profiter de son expérience. Il connaît bien la maison et il saura m’aider de plusieurs manières par son engagement concret.

Comment entendez-vous collaborer avec les autres confessions religieuses et les autorités politiques ?

L’Eglise est au cœur du monde. Jésus envoie l’Eglise dans le monde. Elle vit donc avec le monde et pour le monde. Dans ce sens, nous devons être très ouverts pour partager avec nos frères le trésor de foi déposé dans nos vies. Avec nos frères musulmans et protestants, nous continuerons de cultiver des liens d’amitié afin qu’ensemble, avec tous les croyants, nous nous donnions la main pour faire de ce monde un monde digne de Dieu, un monde toujours plus digne des Hommes, un monde toujours plus beau, un monde au service de l’humanité. Ensuite, je dirai que le bien commun est la raison d’être de tout pouvoir politique avec toutes ses ramifications. Et si l’Eglise n’œuvre pas pour le bien commun, le bien de l’Homme, ce n’est certainement pas l’Eglise de Jésus-Christ envoyé pour sauver l’Homme. Nous sommes donc prêts à coopérer avec tous les pouvoirs, avec tous ceux qui oeuvrent pour le bien de notre pays dans les limites de notre mission. Nous apporterons notre modeste contribution de façon indéfectible pour le bien de l’homme et de tous les Burkinabè.

Avez-vous un appel à lancer aux fidèles de l’archidiocèse de Ouagadougou avant votre installation ?

Je les remercie de m’accueillir. Je me donnerai au moins une année pour écouter, une année pour voir, une année pour découvrir et une année pour aimer avant de prendre certaines initiatives dans le domaine pastoral. Je souhaite seulement que l’unité et la communion soient au rendez-vous. L’Eglise ne peut progresser qu’en renforçant les liens de communion entre ses membres, en commençant par ses pasteurs. J’invite les uns et les autres à aller au large, en eaux profondes et à approfondir la foi. Le pape Jean –Paul II ne cessait de nous ramener à l’essentiel, c’est-à-dire la sainteté. C’est dans ce sens qu’il a laissé une phrase lapidaire qui est un phare pour ma vie : "Le véritable missionnaire, c’est le Saint". Si nous arrivons ensemble, en tant que baptisés, à vivre dans cette dynamique, nous ferons de cette Eglise de Ouagadougou, quelque chose de très beau à la gloire de son nom et pour le service de l’humanité.

Qu’est-ce qu’un évêque métropolitain ?

Le métropolitain est l’évêque de la métropole avec les villes satellites. C’est donc l’archevêque de la métropole qui n’est pas nécessairement la capitale, mais la ville la plus importante. Mais tous les diocèses ont le même pouvoir. Le métropolitain a une double mission : la vigilance (veiller à la fidélité à la foi, aux mœurs) et la suppléance (relever le défi quand il y a des défaillances). Chaque diocèse jouit d’une juste autonomie, mais il reste le symbole de l’unité de la province ecclésiastique.

En 2010, vous serez le premier archevêque africain à accueillir un Congrès mondial des Communicateurs, le congrès de l’UCIP. Qu’est-ce que cela suscite en vous comme commentaire ?

C’est un temps de grâces pour le Burkina et pour les médias d’Afrique. En effet, nous sommes heureux que ce grand congrès se tienne dans notre pays. Vous personnellement, votre rôle en tant que président de l’UCAP-Burkina et en tant que responsable de cette activité sera déterminant. Il faudra que l’ensemble de l’Eglise et du pays puisse se mobiliser pour accueillir ce congrès d’envergure mondiale. Cela sera un apport inestimable pour notre pays et pour notre Eglise. Je suis heureux d’être un instrument de la providence et je compte sur toutes les bonnes volontés et les médias pour qu’ensemble, nous puissions préparer comme il se doit cet événement majeur des hommes et des femmes de médias du monde entier. L’UCAP-Burkina qui a en charge cette organisation aura besoin de toutes les forces et de tous les soutiens pour qu’ensemble ce défi soit relevé pour l’honneur de notre Eglise, de notre pays et de notre continent.

Propos recueillis par Alexandre Le Grand ROUAMBA

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