Actualités :: Bourse du travail de Ouagadougou : Un symbole dans la cité

Nombre de grands acquis qui ont amélioré la vie du travailleur burkinabè ont été mûris en terme de réflexion à la Bourse du travail, avant d’être posés comme revendications aux autorités nationales. Repère de chômeurs ? territoire indépendant ? Faites plutôt connaissance de ce lieu symbole.

A l’angle de la rue Joahny Thevenoud, jouxtant la rue du travail, une bâtisse rouge noir trône, morne, avec une apparence de maison inhabitée. De ce qui sert de clôture, un mur de un mètre de haut environ sert en réalité de siège (tabouret) pour nombre de personnes et ce, des trois côtés du bâtiment. L’ombre procurée par les caïlcedrats, les acacias et autres grands arbres dont la taille donne une idée sur l’âge y est certainement pour quelque chose. Aussi, vendeurs ambulants exténués, oisifs ou simples passants à la recherche de répit s’y installent, qui, regardant les va-et-vient des usagers de la route, qui, enfoui dans les bras de Morphée, roupillant sans soucis. En somme il y a du tout, même la restauration : gâteaux, jus, mets traditionnels, café vendus â la criée.

Du spectacle, il y en a en ces lieux, situés en plein centre commercial de Ouagadougou. L’affluence y est quasi permanente aux alentours et pour cause : le bâtiment est limité à l’Ouest, par un hôtel d’où rentrent et sortent et des clients, au Nord, par la brigade des sapeurs pompiers dont la sonnerie de l’alarme et les sirènes de l’ambulance sortant en toute vitesse crée une animation et fait comprendre à chacun qu’une vie est en danger quelque part. A son côté Sud une clinique dont les patients stationnent sur le pavé, faisant du coup de certains oisifs, des parkeurs circonstanciels. Ils proposent leur service alors qu’ils vaquent à d’autres occupations pendant l’absence des propriétaires et se présentent dès que ces derniers réaparaissent pour tendre la main et réclamer les “jetons”. Quant à la partie Est, en plus de la direction régionale de l’Environnement et du Cadre de vie, des boutiques de marchandises divers avec évidemment une clientèle variée. Vrombissements de moteurs, tintamarre de Klaxons, cris, interpellations rythment le quotidien.

A l’intérieur de la cour, en plus du bâtiment central composé d’un haIl au milieu, auxquels sont rattachés de part et d’autres comme des ailes, des salles servant de bureau. On peut y voir également un conteneur apparemment inusité, mais est en réalité un bureau, avec toutes les commodités y afférantes. Des hommes et des femmes, en groupes ou individuellement, assis sur des bancs ou en mouvement, visage radieux ou mine serrée animent le coin. Réunions par-ci, jeux de société par-là, chacun est là ; pour un but précis. On pourrait donc se demander comment une bâtisse dont l’esthétique architecturale semble étre le dernier souci, a pu survire et défier le temps et les velléités territoriales des opérateurs immobiliers de notre temps. Quel est cet espace où tout semble permis et où tout le monde est la bienvenue ?

Le fil de l’espoir

“En général les travailleurs viennent ici lorsqu’ils ont des problèmes, a indiqué M. Tiendrébéogo, président du mois des centrales syndicales et ceux qui ne travaillent plus sont les plus fidèles. C’est peut être la raison qui motive les mauvaises langues à traiter la Bourse du travail de “coins des aigris de la République”. A bien d’égard, des syndicalistes sont également ainsi qualifiés, à cause de leur verve acerbe et de leur prise de position. Avec “le bradage” des sociétés comme le dit M. Namou Nana, du l’Union syndicale de travailleur du Burkina (USTB), des pères et mères de famille se sont retrouvés au chômage et certains sans paiement des droits. Alors, ils ont plus d’un motif d’être présents à la Bourse du travail qui abrite non seulement le siège des organisations syndicales mais également sert de lieu de rencontre et d’espoir.

La douleur du chômage se lit dans le regard sur la physionomie et à travers les propos amers de certains déflatés. La Bourse du travail apparaît comme ce lien qui les lie à l’univers du travail. En effet, ils reçoivent conseils et soutiens pour mieux faire valoir leurs droits, a expliqué M. Tiendrébéogo.
“Mieux nous les accompagnons à l’Inspection du travail pour régler leurs différends avec leur employeur”, a-t-il signifié. En plus de l’assistance juridique les centraies syndicales, qui organisent le suivi des dossiers, avec pour but de veiller à ce que les engagements soient tenus. Aux dires de M. Tiendrébéogo, “leur présence régulière favorise le suivi de leur dossier”. Même si les syndicats n’ont pas vocation à prendre des avocats, chaque structure dispose d’un conseil à cet effet.

La Bourse du travail, offre souvent opportunités d’emploi. “Ils sont nombreux, ceux qui sont restés là et qui ont par la suite obtenu un boulot”, déclare M. Nama.
“Nous avons des canaux d’information, de recherche sur l’emploi et lorsqu’il y a des offres des dans un domaine donné chaque organisation trouve les voies et moyens pour placer les siens”, ajoute-t-il.
M. Cyprien Nanema est ex-employé de la BRAKINA. Pour lui, la Bourse du travail est un symbole. Cet espace “n’est pas né par philanthropie, c’est la lutte des travailleurs à travers leurs syndicat qui a abouti à cette institution”, soutient-il.

M. Nanema connaît l’importance de ce lieu, pour avoir dirigé le Syndicat national des travailleurs des brasseries. Aujourd’hui déflaté, il y revient avec des camarades ayant connu le même sort pour tenir des réunions périodiques sur l’état d’avancement de leur dossier qui selon eux, traîne en justice. Bien qu’épaulé par un délégué de la CGTB à laquelle est affilié son ex syndicat, M. Nanema et ses camarades avouent leur déception devant “la lenteur” de leur dossier. Ils ont même le sentiment d’avoir été déroutés à un certain moment. Mais l’espoir maintient le moral et ces ex travailleurs “gardent espoir” que leur sort connaisse un dénouement heureux, à l’instar de bon nombre de travailleurs déflatés. “Nous échangeons entre nous, mais aussi avec d’autres travailleurs qui sont dans la même situation que nous”. Ils disent s’inspirer de l’exemple des ex employés de l’ONBAH qui ont eu gain de cause. Ces exemples heureux donnent courage et M. Nanema d’affirmer “Nous sommes là, essayant de garder le moral haut et convaincu que c’est en luttant que nous allons gagner”.

A qui appartient la Bourse du travail ?

La Bourse du travail aurait-elle donc pour mission de gérer les problèmes ? Non, réplique M. Tiendrébéogo de la Centrale forces ouvrières “La Bourse du travail est une maison commune de tous les travailleurs, qu’ils aient des problèmes ou pas”.

Il regrette que ceux qui sont en fonction y soient rares. Ils devraient pourtant y aller, s’informer et animer leur bourse. Vu par les responsables syndicaux comme un “repère des travailleurs”, c’est dans ce cadre de liberté et de démocratie que s’organisent les luttes, les ripostes, où se tiennent les assemblées générales, les conventions, les meetings et d’où partent la plupart des marches de protestation.
“I’idéal serait qu’un travailleur en fonction vienne de temps en temps pour s’informer”, a souhaité Mamadou Nama de l’USTB. En plus des travailleurs qui se donnent rendez-vous, la Bourse du travail a lui aussi son personnel, il s’agit notamment des veilleurs de nuit dont la gestion est commune à toutes les centrales syndicales présentes.

Il en ait de même des factures de certaines commodités telles que l’eau et l’électricité et des biens mobiliers (banc, sonorisation...). Outre ces biens communs, chaque organisation fonctionne comme une administration et prend en charge son personnel.

Il est connu que les travailleurs ne sont pas prompts en matière de cotisation, alors les moyens proviennent des legs, dons, de la subvention de 150 millions que l’Etat octroie annuellement aux syndicats et au patronat. Quand au patrimoine immobilier, il appartient à l’Etat burkinabè et M. Nama en fait l’historique en ces termes : “Après le congrès de Cotonou, le climat politique était monté d’un cran en Afrique. A l’époque, les deux centrales syndicales Union syndicale des travailleurs burkinabè (USTB) et la Confédération des travailleurs burkinabè (CNTB) ont jugé, compte tenu de l’évolution du monde du travail, que les organisations syndicales disposent d’un siège. Après des négociations avec le gouverneur de Haute-Volta, les maires de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso ont affecté des bâtiments aux organisations syndicales.

C’est ainsi a ajouté M. Nama que l’Union syndicale des travailleurs confédérés avec Michel Béré et Frédéric Guirma de la CNTB ont signé en 1957, un accord qui fixe des principes. En réalité, a précisé M. Nama, le terme Bourse du travail s’entend par un service de placement une institution dotée de moyens adéquats en vue de procéder soit à l’analyse des postes de travail ou à tout ce qui a trait à l’emploi. II doit normalement pouvoir donner le baromètre de l’emploi : offre, chômage...

Malheureusement, l’usage en est autrement au Burkina Faso. “Ici le terme Bourse du travail signifie permanence des centrales syndicales”. Mais dans le temps, compte tenu des problèmes de statistiques, l’office de la main d’œuvre partageait les informations avec les centrales syndicales sur le mouvement des travailleurs émigrés. “Le domaine a pris le nom Bourse du travail et fonctionnait comme tel, car des employeurs venaient y recruter du personnel”.

La Bourse du travail est certes gérée par les syndicats, mais reste propriété de l’Etat burkinabè. Cependant, les occupants sont unanimes à dire que le gouvernement ne peut le leur retirer. Mieux, ils demandent que le bâtiment soit restaurés à l’image de la capitale. Ils tiennent à rester sur ce site, au centre de la capitale. Des promesses leur auraient été faites de satisfaire cette doléance. Autant les travailleurs disposent de cet accord de siège, autant il se doivent d’entretenir un minimum de comportement. Alors, les activités politiques y sont interdites et la mairie ne tarde pas à brandir les textes au cas où. Du reste, les hommes politiques peuvent participer aux activités en tant que citoyens, mais ne peuvent tenir de meeting. La Bourse du travail que la plupart des travailleurs côtoient au quotidien avec indifférence a toute sa raison d’être selon les délégués syndicaux dans un Etat de droit où les libertés doivent s’exprimer.

Assétou BADOH (bado has se tou@yahoo. fr)

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