Actualités :: Système sanitaire burkinabè : Ces agents si loin d’Hippocrate

Parce que tout le monde ne peut pas l’être, certains d’entre nous ont eu la chance d’être des agents de santé. Infirmier, attaché de santé, pharmacien, médecin, sont autant d’intitulés de fonction que confère la médecine à ses initiés partout dans le monde.

Domaine très sensible, car ayant pour objet la santé et le bien-être de l’homme, la médecine est une branche prestigieuse du savoir qui exige certaines compétences de la part de ses pratiquants. Des compétences qu’on met au service de la santé publique selon une ligne de conduite professionnelle codifiée par une déontologie. Au Burkina, ils sont des milliers d’hommes et de femmes, formés en médecine dans diverses écoles

aux plans national et international qui ont choisi de soigner leurs compatriotes dans la vie. Malgré tout, les ressources humaines en la matière manquent, les besoins des populations étant multiples et sans cesse croissants. Aussi, les infrastructures et équipements sanitaires ne sont pas en nombre suffisant, malgré les grands efforts déployés par nos dirigeants qui sont conscients que le pari du développement ne peut être gagné sans une population en bonne santé. Malgré les difficultés inhérentes à notre statut de pays pauvre et sous-développé, il y a des agents de santé qui se donnent corps et âme pour soulager chaque jour des patients.

Des pratiques médicales inquiétantes

Non contents d’être dévoués à la tâche, ces braves agents comme ils l’ont si bien appris ne foulent pas aux pieds l’éthique et la déontologie de leur métier. Mais à chaque domaine ses brebis galeuses. La médecine est un domaine, socioprofessionnel qui n’échappe pas à cette triste règle. Il est également dans cette branche d’activité des agents qui ne font pas honneur au corps d’Hippocrate, le père grec de la médecine dont le serment s’érige en bible pour les pratiquants du domaine.
Les exemples des bas faits de ces agents si loin d’Hippocrate ne manquent pas au « pays des Hommes intègres ». La scène aberrante qui s’est produite au Centre de santé et de promotion sociale (CSPS) de Colma, un quartier de Bobo-Dioulasso, début août 2008, marque encore les esprits. Figurez-vous qu’un infirmier indigne y a amputé sans anesthésie et sans l’avis de ses parents, l’orteil d’une fillette du nom de Nouriana Sankara, âgée seulement de 4 ans.

Inutile de revenir sur les souffrances endurées par la suite par la petite et sa famille qui ont manqué de peu de porter l’affaire en justice n’eut été la médiation des premiers responsables dudit CSPS. Cet acte peu digne de foi médicale, l’histoire le retiendra comme
« une grave bavure médicale », de l’avis d’une personne scandalisée. Les actes ignobles de la part d’agents de santé peu recommandables qui ont provoqué des pertes en vies humaines sont indénombrables au Burkina. Au rang de ces faits, il y a les nombreuses morts en couches de femmes. Des morts qui auraient pu être évitées si certains praticiens de la santé n’étaient pas cupides, alternant fausses prévisions d’accouchements et prescriptions médicales insignifiantes et onéreuses. Et en de pareilles situations, c’est surtout la négligence de ces agents qui sont certainement venus dans le métier sans la moindre vocation, qui est regrettable. Sinon comment comprendre le décès de cette femme cette année suite à un accouchement par césarienne à Orodara.

Intervenant sans poches de sang nécessaires en cas d’hémorragie pour une telle opération, les infirmiers sont sans doute à l’origine de ce drame. Toujours affligés par ce qui leur est arrivé, les parents de Rihanata Ouédraogo, cette jeune femme morte en couches, au mois d’août 2008, à Ouagadougou, ne se remettront pas de sitôt de l’indifférence des infirmiers qui a occasionné cette perte en vie humaine. Dans le registre des illustrations, nous ne pouvons nous empêcher de relater une scène pas pour le moins insolite à laquelle nous avons assisté au mois de juillet dernier au Centre hospitalier universitaire-Sanou Souro (CHUSS) de Bobo-Dioulasso. Cette nuit-là en service de pédiatrie, une infirmière a bavé sans trouver la veine d’un bébé d’un an. Elle a piqué l’enfant à l’aide de l’intraveineuse dans tous les sens et face à son impuissance un de ses collègues a volé à son secours…

No comment ! Pire encore est ce cas qui s’est produit début septembre 2008 dans le Kénédougou, précisément à Banzon. Un infirmier a refusé d’administrer des soins à un enfant parce qu’il en voulait au père de celui-ci avec qui il a eu des altercations lors d’une séance de vaccination. Malgré les supplications des uns et des autres, cet agent de santé est resté campé sur sa position et il a fallu l’implication du commissaire de police de la localité pour l’amener à de meilleurs sentiments. Tellement l’infirmier a mis du temps et fait preuve d’entêtement avant d’agir, l’enfant a rendu l’âme après qu’il l’eût consulté…

Autre pratique de ces « parasites » du système sanitaire burkinabè : le vol et le « deal » des médicaments destinés ou appartenant aux patients. Ils sont nombreux, ces « faux » agents qui volent volontiers les médicaments de certains patients dont ils ont à charge la surveillance. Après coup, ils les stockent en cachette et les revendent à leur rythme et à vil prix (même si cela arrange !) à d’autres…patients. N’oublions pas aussi ces agents de santé qui s’empressent de divulguer le statut sérologique de certaines personnes en petit comité, le secret professionnel ayant disparu de leur vocabulaire.

Quel système sanitaire ! Voilà donc des pratiques qui portent atteinte à la crédibilité du corps de la santé burkinabè, un cadre qui a pourtant besoin d’être compétitif pas seulement en termes d’infrastructures et d’équipements, mais aussi sur le plan des ressources humaines. Déjà que les populations n’ont pas droit à proprement parler à des soins de qualité et à moindre coût (des progrès sont faits, mais le reste vaut des travaux d’Hercule), il ne faut pas en rajouter avec des pratiques aux antipodes de la médecine. En attendant de gagner le combat de la santé publique, nos autorités doivent mettre l’accent sur deux aspects importants. Il faut tout d’abord nettoyer les écuries d’Augias dans nos structures sanitaires dans lesquelles un certain laisser-aller se fait sentir, ne serait-ce que pour sauver le caractère prestigieux de cette branche d’activité qu’est la médecine.

Le deuxième aspect sur lequel nos dirigeants doivent redoubler de rigueur et de compétitivité, c’est le volet formation qui, de plus en plus, s’effrite en qualité. On en veut pour preuve les prestations médicales approximatives de ces agents de santé, généralement des nouveaux dans le métier. A propos de formation, il faut aller à l’évidence avec ces récriminations des pensionnaires d’Ecoles nationales de santé publique (ENSP) qui le plus souvent redoutent la qualité de la formation qu’ils reçoivent. N’aiment-ils pas à répéter que leurs écoles constituent des « sacs à problèmes ? ».

Kader Patrick KARANTAO (stkaderonline@yahoo.fr)

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