Actualités :: Pauvreté à Ouagadougou : Les "Gougani", une famille "sans domicile (...)

Un certain matin, derrière la haie vive qui entoure l’Université de Ouagadougou, une vieille femme et ses trois enfants grelottent autour d’un feu de paille. Leur travail, c’est le ramassage du sable et du gravier. Récit d’une bataille pour la survie d’une veuve et de ses orphelines "sans domicile fixe (SDF)".

"Il y a une espèce de honte d’être heureux à la vue de certaines misères", constate le moraliste français Jean de la Bruyère. C’est novembre, l’un des mois les plus rudes au Burkina Faso où les températures baissent. Mme Gougani, ses deux filles Salimata, Béatrice et sa petite-fille Aminatou Compaoré se chauffent avant l’entame de la lutte pour la survie à Ouagadougou : le ramassage de matériaux de construction. "Sans domicile fixe", Mme Gougani et ses deux orphelines Salimata et Béatrice s’adonnent quotidiennement à cette activité depuis la mort en Côte d’Ivoire par accident de la route de leur chef de famille, il y a plus de cinq ans. Chassées de leur maison en location dans le quartier Koulouba pour incapacité d’assurer le loyer, Mme Gougani et ses enfants errent de maison perdue en maison inhabitée et le plus souvent dans les arrêts de bus pour passer la nuit.

Tenaillée ce jour-là par un rhume caractéristique des périodes glaciales au Burkina, dame Gougani, âgée d’environ 50 ans est contrainte de rester sous la tente dressée à l’aide de quelques morceaux de bois et de tissus en lambeaux. Le regard perdu dans des pensées profondes, Salimata Gougani, la plus grande (15 ans) explique : "Nous vendons le sable et le gravier pour assurer le repas quotidien mais c’est difficile, il n’y a pas d’acheteurs. Nous voulons partir dans notre village à Garango et nous n’arrivons même pas à réunir les frais de transport".

Dans l’attente d’un éventuel client

Après plusieurs semaines de travail sans relâche, Mme Gougani et ses deux filles ont pu réunir un tas de gravier qu’elle vendront entre deux mille (2000) et trois mille (3000) francs CFA. Mais, point de demandeur. L’attente est difficile.

Dame Gougani ne dispose plus de moyens pour assurer la pitance. Elle a accès aux robinets de l’Université où elle peut obtenir de l’eau potable mais pas au restaurant universitaire situé à quelques mètres de son lieu de travail.

"Je ne sais pas combien de fois nous avons passé la journée ici sans manger. Parfois, nous avons payé le repas à crédit dans l’espoir de pouvoir rembourser lorsque nous aurons vendu le tas que voici", témoigne Salimata Gougani presqu’au bord des larmes. La vieille Gougani à la peau blanchie et fendillée par le froid et la poussière porte sur sa tête une marque indélébile due au poids de gravier et de sable convoyé çà et là pour en faire des tas.

La voix complètement enrouillée, elle se débat pour apporter des soins corporels à sa petite fille, Aminatou Compaoré âgé de 3 mois. Avec des ustensiles de cuisines qui rappellent l’époque protohistorique (période marquant l’usage réel du fer dans la civilisation nubienne), Mme Gougani chauffe l’eau et les repas rares pour sa progéniture. Presque déguenillée, elle essaie de remplir son rôle de mère et de grand-mère.

Devenue mère à 15 ans

Salimata Gougani, âgée seulement de 15 ans, est la mère de Aminatou Compaoré. Petite en 1999 et rôdant aux portes du restaurant universitaire avec les enfants dans la rue en quête de miettes, Salimata a très vite grandi, attirant de fait le regard des apprentis amoureux. Début 2003, Salimata Gougani tomba enceinte pour des raisons peut-être de non-maîtrise des méthodes de prévention des grossesses non désirées.

Après 9 mois de lutte pour la survie, elle mit au monde une fillette du nom de Aminatou Compaoré, dont le géniteur serait à la Patte d’Oie au secteur 15. Pourquoi Salimata Gougani et sa fille Aminatou ne l’ont-elles pas rejoint ?

"Je ne sais pas, posez la question à ma mère, elle pourra peut-être vous répondre" déclare Salimata Gougani. Mais Mme Gougani n’a pas de voix pour expliquer la situation de sa fille.

Cependant, Salimata rassure qu’elle reçoit de temps à autre, un appui financier et matériel de son copain. Ce qui lui permet de soigner son bébé en cas de maladie et d’assurer sa layette. Son propre habillement n’est pas une préoccupation.

Cela fait environ deux mois que la famille Gougani a quitté l’Université de Ouagadougou. Le tas de gravier sur lequel elle comptait n’est plus là, probablement acheté par un client. Mme Gougani et ses enfants ont-elles tout simplement changé d’endroit ou sont-elles parvenues à réaliser leur rêve qui était de regagner le village de Garango ? Quelle vie y mèneront-elles ? Vont-elles connaître le même calvaire que celui vécu à Ouagadougou ?

Enok KINDO
Sidwaya

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