Actualités :: Manifestations de militaires : Les retraités menacent, le Moogho tempère, le (...)

Dans la nuit du jeudi 6 décembre 2007, des centaines de militaires à la retraite se sont massés à côté du stade du 4-Août à Ouagadougou, plan d’occupation de la ville en main. Au même moment, dans son palais, le Moogho naaba Baongo a entamé une ultime médiation entre les délégués des revendicateurs et le ministère de la Défense, représenté par son secrétaire général et le chef d’état-major de la gendarmerie.

Vers 22 heures, le pied de guerre est levé pour « éviter toute entrave à la médiation du chef suprême des Moosé ». Mais s’ensuivra, la même nuit, une vague d’arrestations dans le milieu des soldats manifestants.

« Trahison ! Ils ont utilisé le Moogho naaba pour nous poignarder dans le dos », dit indigné le soldat de première classe Rakiswendé Kaboré, un des délégués des militaires à la retraite. Au stade du 4-Août, où il s’était rendu très tôt ce samedi 8 décembre 2007 pour annoncer à ses camarades de lutte la nouvelle des arrestations, le porte-parole des croquants s’est montré particulièrement méfiant. Dans un « six-mètres », où il nous a précédé, poussant son vélo, le jusque-là rescapé de la purge au sommet du mouvement de contestation ne se fait guère d’illusion : « Bientôt, ce sera mon tour. Mais je ne chercherai pas à me cacher.

Qu’ils nous arrêtent ou même qu’ils nous tuent, nous allons nous faire entendre », jure le sursitaire, à l’anxiété bien palpable mais à la détermination intacte. S’achemine-t-on vers un durcissement du bras de fer qui a longtemps opposé le gouvernement à un groupe de troufions, dont la principale revendication est, il faut le rappeler, l’augmentation de quatre ans de l’âge du départ à la retraite ? Tout semble l’indiquer.

Jeudi 6 décembre 2007 dans la soirée. Des centaines de soldats sont sur le pied de guerre au côté ouest du stade du 4-Août, à quelques encablures du camp militaire Lamizana. Depuis que la contestation a été portée sur la voie publique, on voit, pour la première fois, un manifestant porter un fusil, une arme de poing accrochée au ceinturon. Un autre porte des jumelles de combat au cou tandis qu’un troisième laisse pendre ostensiblement un énorme gourdin sur les épaules. Des groupes d’actions sont constitués et les rôles sont vite attribués. Mission : faire parler, cette nuit, la poudre sur plusieurs artères de Ouaga. « Les fumistes et les femmelettes », allusions faites aux frères d’arme en fin de service qui ont accepté l’offre gouvernementale (1), sont tournés en dérision.

Le Moogho naaba dans la danse

Vers 20 heures 30, les partisans de la solution expéditive rongent leurs freins pendant que quelques modérés essaient de les calmer en attendant l’issue de la médiation secrète que mène, à ce moment dans son palais, le Moogho naaba Baongo. Au cours de ces tractations les porte-parole des « laissés pour compte de l’armée », le soldat de première classe Karim Bikienga, le sergent en congé libérable Clément Ouédraogo (tous deux aux arrêt depuis respectivement vendredi et samedi derniers) ainsi que Rakiswendé Kaboré et les représentants du gouvernement, à savoir le secrétaire général du ministère de la Défense, Mamoudou Barry, et le chef d’état-major de la gendarmerie, le colonel Martin Zongo, seraient parvenus à un accord de principe : « Lorsque le Moogho naaba m’a fait appeler au téléphone à 14 heures 56mn, c’était pour me faire savoir que nos doléances ont été acceptées. Mais une fois au palais, nous nous sommes rendus compte que ce n’était pas le cas.

Il a été promis à sa majesté que les salaires qui nous seraient accordés dans le cadre du redéploiement dans la Fonction publique seraient amputés de quatre ans de cotisation sociale au profit de la pension militaire. Chose que nous avons rejetée », a annoncé le sergent Clément Ouédraogo lors de son compte rendu. Colère dans les rangs. Une voix tonne : « C’est mieux de secouer le pays-là dès cette nuit ». Acquiescements dans les rangs. Une autre ajoute : « Chassez les civiles [parlant des journalistes présents sur les lieux] ». La désapprobation est unanime.

Le porte-parole, après un moment d’interruption, peut enfin poursuivre son briefing : « Face à notre intransigeance, ils [le SG du ministère de la Défense et le chef d’état-major de la gendarmerie] ont finalement accepté l’augmentation de quatre ans de l’âge du départ à la retraite. Reste maintenant sa date de prise d’effet. Réfléchissez-y bien d’ici à dimanche pour qu’ils ne nous fassent pas un bébé dans le dos ». Sitôt le groupe dispersé, une colonne de véhicules remplis d’hommes en treillis et armés de fusils arriva en trombe sur les lieux. Quelques heures plus tard, on apprenait l’arrestation de deux soldats de première classe, Basile Sawadogo et Hamidou Bafo. Le lendemain vendredi 7 décembre, c’était au tour du sergent-chef Louambo Dédougou Coulibaly et du soldat de première classe Karim Bikienga de tomber dans les filets de la gendarmerie. Alors qu’il était rentré la veille du palais du Moogho naaba, où il s’était rendu pour, dit-on, rendre compte de la nouvelle situation au médiateur, le sergent Clément Ouédraogo a été épinglé à domicile très tôt le matin du samedi 8 décembre par un groupe de pandores.

Domonique Diendéré et Simon Compaoré dans la ligne de mire

Jointe au téléphone hier dimanche 9 décembre, où elle disait être toujours sans nouvelles de son époux, Mme Ouédraogo Fatimata relate : « Précédés de quatre individus en tenue civile sur deux motos, des gendarmes armés à bord d’une bâchée sont venus toquer à la porte. Quand mon mari a ouvert, ils lui ont demandé de les suivre. Il a juste eu le temps de se changer ».

Hier dimanche matin, où ils se sont rassemblés, les uns en treillis et les autres en tenues de civil, dans l’enceinte de l’hippodrome du quartier Hamdalaye en lieu et place du stade du 4-Août où devaient se dérouler des activités entrant dans le cadre de la commémorations de la fête nationale du 11-Décembre, les revendicateurs ont posé un préalable à toute reprise des négociation : la libération immédiate de leurs camarades. Arrivé sur les lieux à la surprise générale, Karim Bikienga, après un bref internement dans les geôles de la gendarmerie, tient la vedette. Et son récit assomme plus d’un : « Nous avons été arrêtés par la gendarmerie, mais celle-ci n’a fait qu’obéir à des instructions. C’est le colonel-major Dominique Diendéré et le maire Simon Compaoré qui ont donné l’ordre, m’a confié le chef d’état-major de la gendarmerie », affirme l’ex-taulard. Un homme tombe de tout son poids.

Quelques volontaires accourent à son secours. La rencontre se poursuit. Furieux, un manifestant se débat entre plusieurs bras qui l’empêchent d’aller rendre, illico presto, une visite, certainement pas courtoise, au maire de Ouagadougou. Sur ces entrefaites, Karim Bikienga annonce : « Le patron de la Gendarmerie m’a aussi informé que notre revendication pour l’augmentation de quatre de l’âge du départ à la retraite a été acceptée. Reste à déterminer les salaires qui nous seront versés durant la prolongation du service dans l’armée ». Mais une source émanant du cabinet du ministère de la Défense nous a informé, quelques heures plus tard, qu’il n’en était rien.

Au moment où nous bouclions la présente, nous avions appris que le délégué, Rakiswendé Kaboré, avait lui aussi été arrêté, à la gendarmerie alors qu’il s’y était rendu, en compagnie du soldat Bikienga, pour exiger la libération des embastillés. Quant aux quatre premiers détenus, ils ont été déférés le samedi 8 décembre à la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO). Ils sont solidairement poursuivis pour atteinte à la sûreté de l’Etat. A cela s’ajoute pour Basile Sawadogo, Hamidou Bafo et Louambo Dédougou Coulibaly la charge de port illégal de la tenue militaire du fait de leur statut de retraité. Appel a été immédiatement lancé à se rassembler de nouveau à 16 heures à l’hippodrome. Avec comme consigne : tous en tenue militaire. Nous y reviendrons.

Alain Saint Robespierre

(1) Il s’agit d’une offre de plus de 2700 postes de réemploi dans la Fonction publique

Observateur Paalga

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