Actualités :: Burkina : Et si on mettait fin aux coups d’Etat ?

Le pays est à la peine depuis huit ans face aux groupes armés terroristes qui cherchent le pouvoir. Notre pays est aujourd’hui en proie à d’énormes difficultés, parce qu’il n’arrive pas à assurer la sécurité de ses habitants (plus de 10 000 morts près de 2 000 000 de personnes déplacées internes). L’insécurité a entraîné deux coups d’Etat en un an. L’instabilité institutionnelle agit sur l’ensemble du corps social, politique et économique. Elle crée aussi une variation des stratégies de défense et de lutte contre nos ennemis.

Or les succès stratégiques s’obtiennent sur la durée. Si nous continuons avec les coups d’Etat incessants, nous changeons toujours de stratégie : c’est le perpétuel recommencement. Nous avons cru naïvement que les putschs militaires étaient la solution à cette guerre. Mais voilà un an que des militaires dirigent le pays et nous ne sommes pas sortis de l’ornière. N’est-il pas temps de réfléchir à des problèmes internes qui font aussi notre faiblesse ? Parmi ceux-ci, si on essayait d’éliminer le putschisme dans l’armée et les courants messianiques dans les partis politiques, l’opinion publique et la société civile ?

Sans verser dans le tropisme malien, prégnant aujourd’hui dans les sphères dirigeantes de notre pays, il faut signaler que la future constitution du Mali a déclaré le coup d’Etat comme un crime imprescriptible. Nous sommes tout à fait en accord avec cette partie du projet. Et dans notre pays, il serait bienvenu que l’armée, qui est la principale force capable de faire un coup d’Etat, refuse le coup d’Etat aujourd’hui et maintenant, sans attendre que cela soit gravé dans le marbre de la constitution.

Ce refus du coup d’Etat est une condition nécessaire à la victoire contre les multiples groupes terroristes, djihadistes et bandits armés coalisés contre notre pays. Pourquoi ? Laissons de côté l’opposition coups d’Etat, démocratie et observons calmement à l’aune de nos problèmes domestiques actuels et urgents quels sont les avantages et les inconvénients du coup d’Etat.

Pour qui habite Ouagadougou et passe parfois du côté de la nouvelle Présidence du Faso, l’ancienne Primature, il a comme certains éprouvé un malaise en ces lieux. Qu’est-ce à dire ? Que le centre du pouvoir, qui doit être protégé, sécurisé, se sent très menacé dans le centre du pays, dans sa capitale. Cela nuit à la sérénité du pouvoir et à la réponse qu’il peut donner à la menace nationale qu’est l’insécurité du pays. Si les désirs de captation illégale du pouvoir étaient bannis, inexistants dans l’armée, les préoccupations de protection anti putsch seraient réduites. Si les coups d’Etat sont absents dans l’armée, l’engagement des militaires est collectif, ils sont tous concernés par la guerre et leur participation est unanime, pleine et entière.

La lutte contre le terrorisme n’est pas l’affaire d’une junte, d’un groupe d’officiers, etc. Ce sont toutes les forces de défense et de sécurité qui réfléchissent, s’engagent et se battent ensemble comme un seul homme. S’il n’y a pas de coup d’Etat, le turning over des postes de direction militaire diminue. L’expérience guerrière des responsables augmente et ils apprennent de leurs erreurs. En valsant toujours les chefs, on court parfois le risque de répéter les mêmes erreurs.

Le coup d’Etat est une désobéissance, une révolte ouverte contre des ordres supérieurs, un acte séditieux et un complot. En temps de guerre, il affaiblit son camp. Cela ne veut pas dire que le pouvoir en place peut tout faire et n’importe quoi. C’est à lui de travailler à mériter la confiance et à réduire à néant par ses bonnes actions les oppositions. En acceptant par la tolérance, le respect, les opinions contraires, on fait du pays, une famille soudée.

Depuis le président Roch Marc Christian Kaboré, on parle de stratégie nationale de lutte contre le terrorisme, de politique nationale de sécurité et au dernier conseil des ministres du 10 mars 2023, on en était encore aux projets de loi et de décrets d’opérationnalisation.

L’arrêt des coups d’Etat peut aider à vaincre le terrorisme

Il faudrait que le pays en arrive en termes de défense et de sécurité à des constances intangibles qui ne dépendent pas du régime en place. Il doit y avoir un cœur de doctrine accepté par tous, qui crée la stabilité du système de sécurité. Pour qu’il n’y ait pas de coups d’Etat, il faut éliminer les causes de coups d’Etat, qui ne correspondent pas comme certains le pensent à l’élimination des potentiels putschistes. La pauvreté est une cause de coups d’Etat, parce que le putsch est un phénomène qui s’observe dans les pays les plus pauvres du monde.

Dans notre pays, les deux derniers coups d’Etat ont invoqué la mauvaise gestion de la crise sécuritaire pour prendre le pouvoir par la force. Donc le terrorisme est aussi une cause de coups d’Etat. Nous pensons que l’arrêt des coups d’Etat peut aider à lutter contre le terrorisme. Et pour cela, le pouvoir doit communiquer, mobiliser l’armée toutes les forces de défense et de sécurité, les volontaires pour la défense de la patrie, la population pour un changement qualitatif qui passe par la transparence, la bonne gouvernance, la participation citoyenne pour la victoire sur l’insécurité.

Il faut construire des piliers solides de confiance par la communication, l’écoute, l’exemplarité, au sein de toute la société, dans toutes ses composantes civiles, militaires, dans les secteurs sociaux et économiques pour la stabilité du pays. Ne pas écarter des professionnels compétents sur des a priori, nous ne gagnerons que si nous sommes unis, nous avons besoin de tous les bras et de toutes les intelligences, qui ont tous quelque chose de bon à apporter, et qu’il faut valoriser.

Au bilan, nous sommes à 10 coups d’Etat tentés et 9 réussis sans compter les complots déjoués. Nous sommes 3e ex-aequo avec le Ghana et la Sierra Leone selon le site de VOA https://projects.voanews.com/african-coups/french.html . Nous sommes devancés par le Burundi avec 11 tentatives et le Soudan avec 17 tentatives. Il faut remarquer que chez nous les coups d’Etat réussissent plus souvent que dans les autres pays africains. C’est l’une des faiblesses importantes de notre pays qui est accro aux coups d’Etat autant chez les civils que les militaires.

Beaucoup de gens ne croient pas à la capacité de mobiliser la population pour le changement. Ils ne voient le changement que par la médiation d’hommes d’exception, qui doivent se sacrifier pour le pays. C’est paradoxal pour un pays qui a réussi à chasser un dictateur qui a régné 27 ans par une insurrection populaire. Pourquoi la population a-t-elle perdu confiance en ses propres capacités en si peu de temps ?

Sana Guy
Lefaso.net

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