Actualités :: Me Apollinaire Joachimson Kyelem de Tambèla : Un Premier ministre (...)

Le 21 octobre 2022, le Mouvement pour la sauvegarde et la restauration (MPSR II) nommait celui qui aura la lourde tâche de diriger le gouvernement. L’heureux élu de ce jour n’est pas un illustre inconnu. C’est un homme habitué aux projecteurs de la télévision, qui aime commenter l’actualité, l’analyser, la disséquer et en tirer des leçons pour éclairer ceux qui dirigent le pays. Il aimait véritablement cet exercice qu’il pratiquait avec humour et taquinait ses compères du plateau. Le récipiendaire de ce jour-là est un homme de droit ; il l’enseigne, il en vit, car son métier est le noble métier d’avocat, défenseur de la veuve et de l’orphelin.

Comment cet homme qui met en avant les valeurs et les idéaux se retrouve-t-il à la tête d’un gouvernement ? Ce sont les mystères de la politique au Burkina.

Plus de trois mois après avoir pris les rênes du gouvernement, quel bilan peut-on faire de son action ? Y a-t-il des indications que l’homme est bien outillé pour le boulot et que le costume de Premier ministre n’est pas trop ample pour ses frêles épaules ? Examinons un peu cet exercice du pouvoir hors des sentiers battus du sankariste (sans être encarté dans un parti) et fédéraliste, Me Apollinaire Joachimson Kyelem de Tambela.

On a reproché au président Roch Marc Christian Kaboré de rechercher ses Premiers ministres et ministres parmi nos compatriotes travaillant à l’international, méconnaissant le pays réel. Le MPSR I et II ne sont pas allés chercher ailleurs leur Premier ministre. Ce sont des hommes bien de chez nous, qui travaillent au Faso, que les militaires putschistes ont recrutés. Laissons Albert Ouédraogo, le Premier ministre du MPSR I qui est retourné à ses études. Parlons du Burkinabè qui a un nom à particule comme les aristocrates français. C’est moins un homme d’action que de paroles. Normal, les avocats sont aussi quelque part des maîtres de la parole par leurs plaidoiries.

Me Apollinaire Kyelem de Tambèla, en plus de ses dossiers à plaider, a ajouté les plateaux de télévision aux tribunaux pour nous montrer ses talents oratoires. Il a été avant sa nomination un fidèle invité de BF1 où il commentait avec délectation l’actualité politique.

L’homme ne semble pas avoir mesuré toute l’importance de ses nouvelles fonctions et de ce qu’il représente pour le pays et sa population. On se demande parfois si c’est le Premier ministre du Burkina Faso qui parle ou l’étudiant immature qui adore son idole Thomas Sankara ?

Lors de sa prestation devant l’Assemblée législative de transition, c’est dans un costume Faso danfani qu’il a paraphrasé le capitaine Thomas Sankara à une des assemblées de l’Union africaine ou des nations unies où il vantait le port du danfani de chez nous, fait par nos tisseuses. Il en est resté là, de la transformation de notre coton, notre Premier ministre. Développer une industrie textile, exporter des vêtements made in Burkina ne lui viennent pas à l’esprit. Lui il est un homme de lettres il reste collé à la lettre du discours sankariste.

Le 19 novembre 2021, habillé de son beau Faso danfani dont on parlait plus haut, Me Apollinaire Joachimson Kyelem de Tambèla est venu présenter à l’Assemblée législative de transition son Discours d’orientation politique comme son idole Thomas Sankara. Peu lui importe, que le président Thomas Sankara, fut le président du CNR (Conseil national de la révolution), et qu’il a adressé ce discours à la nation, au nom de l’organe d’orientation politique qu’il dirigeait, le CNR. Me Kyelem, est-il le Premier ministre choisi par le MPSR II, ou celui qui donne les orientations ? Quel est l’organe politique, le MPSRII, ou le Premier ministère ? Ces considérations n’ont nullement empêché l’Assemblée législative de transition d’adopter son discours qui ne tient pas compte de la durée de la transition et ne prévoit pas s’attaquer à des problèmes concrets du moment.

Dans le discours du sankariste Me Kyelem de Tambela, au lieu de poursuivre l’œuvre de Thomas Sankara qui a mis les rails jusqu’à Kaya, c’est un autre chemin qui nous est proposé que celui tracé par le chef du CNR. Il ne prolonge pas les rails de Kaya jusqu’à Tambao. Non, le nouveau Premier ministre lance un nouveau projet de chemin de fer Conakry-Bamako-Ouagadougou dont aucune étude de faisabilité n’est encore faite. Veut-il vraiment être utile à quelque chose, changer la vie des Burkinabè ? A-t-il peur de s’attaquer à la concession de Sitarail qui ne respecte aucun de ses engagements ? D’où la fuite en avant pour un nouveau projet de chemin de fer dont on ne sait pas quand est ce qu’il verra le jour ?

La presse burkinabè snobée

Me Apollinaire Joachimson Kyelem de Tambèla aimait bien la presse burkinabè avant sa nomination. C’était un bon client des médias locaux, ne refusant pas une interview ou un talk-show. On le voyait presque partout, mais c’était surtout un produit de BF1 avec son émission débat de presse qui a vu l’animateur Lookman Sawadogo, et deux de ses invités presque permanents abandonner le commentaire politique pour la politique, partant du principe que c’est mieux de faire l’amour que d’en parler.

Lors de sa première interview après sa nomination, le commentateur politique,’ tout heureux dans ses nouveaux habits de Premier ministre, a commencé à dérouler son programme. Quand bien même il tempérait qu’il n’avait pas encore pris fonction, il nous a promis de voir la faisabilité d’une baisse du prix du carburant et des émoluments des ministres. Si les salaires des ministres sont revenus à l’avant MPSR I, l’essence a augmenté deux fois de prix et est à 850 F le litre et nous avons connu une pénurie d’essence dans l’indifférence du Premier ministre qui quand les choses vont mal ne monte pas au créneau pour défendre son gouvernement, abandonne les ministres devant la représentation nationale et la population.

Autant il aimait avant les journaux burkinabè, aujourd’hui la presse burkinabè n’est plus dans son cœur, la primeur de son actualité est pour la presse étrangère, internationale, et la direction de la communication du Premier ministère. Celle-ci propose un narratif approprié de ses audiences comme dans les contes de chasseur, où seul le chasseur gagne à la fin, les lions et les panthères sont abattus. A l’ambassadeur de France, il demande que son pays équipe les VDP (Volontaires pour la défense de la patrie), à celui des Etats Unis dont le pays est allé sur la lune et voit tout avec ses satellites, d’indiquer où sont les groupes armés terroristes, à celui du Canada il demande des armes puisque celui-ci en donne à l’Ukraine.

Les premiers moments prêtent à sourire, parce qu’on se dit qu’on lui expliquera comment faire si vraiment ce sont des requêtes sérieuses, les formes que devront prendre ces discussions entre partenaires qui se respectent et discutent d’égal à égal. Mais plus ça va, plus les communiqués de la communication du Premier ministère donnent à voir un Premier ministre qui, nous semble-t-il, fait la leçon à ses hôtes et donne l’image d’un pays qui rend les autres responsables de ses problèmes, ne manquant jamais de rappeler les hauts faits du nouveau chef. « Le chef du gouvernement a par ailleurs révélé avoir proposé depuis des années l’institutionnalisation d’une monarchie dans notre pays » ou encore « Avant même d’être Premier ministre, j’avais fait des articles et des propositions pour ce que j’appelais la constitution de la Fédération du Sahel. »

Quand on est déconnecté de la réalité, toujours plongé dans ses livres, ses articles, ses rêves, on ne se préoccupe pas de ses interlocuteurs, du peuple burkinabè, de ce dont il souffre. On parle, on n’a seulement que des mots. Peut-on dire au Premier ministre que l’on aimerait moins l’entendre, mais plus le voir à l’œuvre contre l’inflation galopante et la restauration de l’intégrité du territoire ?

Sana Guy
Lefaso.net

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