Paris, Ville-Lumière, et dont s’enorgueillissent les Français, a été, en l’espace d’à peine deux mois, noircie par la fumée de l’incendie de trois immeubles. La singularité de ce drame répétitif qui a provoqué au total la mort de 48 personnes, dont plusieurs enfants, en plein coeur de la métropole française, c’est qu’il frappe essentiellement des communautés africaines, notamment des Maliens, des Sénégalais, des Ivoiriens, des Gambiens...
Et pourtant, l’alerte avait été plusieurs fois donnée sur non seulement la vestuté de ces bâtisses, mais également sur les dangers auxquels étaient exposés leurs occupants.
Des voix autorisées, comme celle de l’écologiste et responsable du parti des Verts Noël Mamaire, s’étaient inquiétées de cette absence de politique de logements. Dans l’une de nos précédentes éditions, nous nous étions demandé si l’élection de Jean-Marie Lepen, qui n’a jamais caché ses sentiments xénophobes, à la tête de l’Etat français, n’aurait pas eu l’avantage de clarifier définitivement la situation de clair-obscur dans laquelle baigne la politique de la France en matière de gestion du phénomène migratoire et de sortir Paris de cette hypocrisie qui consiste à souffler le chaud et le froid selon les circonstances.
En effet, pendant que sa classe politique, presque dans son ensemble, se confond en regrets et en larmes posthumes, l’on peut se demander comment la France a pu laisser des milliers d’Africains à la merci de marchands de sommeil véreux pour lesquels la mort d’un Nègre n’est tout juste qu’un fait divers dans les colonnes des journaux. On peut féliciter la France tiers-mondiste, défenseur des droits des faibles, prompte à venir au secours des affamés du Niger et d’ailleurs.
Elle aurait dû cependant, dans le même élan, voler au secours des résidents de certains de ses quartiers qui présentent l’image résiduelle d’un Tiers-monde où se côtoient "sans domiciles fixes" et "sans emplois fixes", sous-payés et à la merci d’employeurs malhonnêtes baignant, aussi bien que leurs employés, dans l’illégalité.
Peut-on affirmer que la France abrite plus de vieilles bâtisses que des pays comme l’Espagne, l’Italie ou la Belgique ? On peut en douter. Cependant, en matière de traitement du phénomène migratoire, ces trois pays mènent une politique courageuse d’intégration à grande échelle. On ne peut vouloir une chose et son contraire. Il y a un prix à payer si l’on a l’ambition d’être une puissance mondiale, surtout quand on s’appuie sur la voix des Africains pour mieux se positionner et défendre ses intérêts sur l’échiquier mondial. En effet, qu’aurait pesé la voix de la France à l’ONU, à l’OMC, à l’UNESCO etc et que serait la Francophonie face au Commonwealth, si l’Afrique ne votait pas comme un seul homme, derrière la France ?
Face à cette impitoyable et dévorante mondialisation dominée par l’unilatéralisme et les appétits géostratégiques américains, l’Afrique représente un contrepoids pour la France. En continuant à précariser sa population immigrée, la France commet une quadruple erreur, politique, historique, économique et sociale. Socialement et économiquement, sa vieillissante population est-elle en mesure de prendre la relève de ces nombreux Africains commis à des tâches subalternes ? Rien n’est moins sûr.
La France ne risque-t-elle pas de se retrouver par exemple sans éboueurs, une activité considérée comme dévalorisante pour le commun des mortels français ? Historiquement, la France qui a lutté contre l’Allemagne nazie (avec l’aide de l’Afrique) dans sa politique de purification des races et de préférence nationale, n’a aucun intérêt, au risque de se faire condamner par l’histoire, à sombrer dans les ténèbres du racisme. Les faits sont têtus. Politiquement, il n’est un secret pour personne que les Etats-Unis doivent leur puissance à la manière dont ils ont su gérer un puzzle ethnique qui a su progressivement et harmonieusement se fondre en une seule entité.
La seule différenciation entre les hommes, ce n’est pas la couleur de la peau. C’est leur intelligence et leurs capacités à affronter les défis du monde actuel. C’est, nous semble-t-il, le combat que la France de la Révolution de 1789 devrait mener sans considération de l’origine des hommes qui la peuplent. Sinon, elle risque de combattre plus ouvertement un supposé péril noir qui résiste mal aux vertus de l’universalisme, et oublier l’essentiel.
Pour l’instant, la France a du mal à gérer ces Africains qui ont quitté leur pays et donne l’impression que ses larmes après coup, ressemblent à celles du bon débarras. Malheureusement, en France, le bon exemple ne vient pas souvent d’en haut, à commencer par Jacques Chirac pour qui la France devait s’intéresser d’abord à sa Corrèze avant de s’aventurer sur les bords du Zambèze.
Le Pays
