ActualitésDOSSIERS :: Lutte contre le terrorisme : une responsabilité étatique certes mais une (...)

Depuis quelques mois, notre pays et sa capitale en particulier sont devenus le théâtre d’attaques terroristes, toutes plus meurtrières les unes que les autres. Les dernières en date, celles survenues le vendredi 2 mars 2018 viennent donc s’ajouter à une série aussi longue qu’insoutenable.

Plus qu’un problème conjoncturel, le terrorisme semble désormais vouloir s’installer durablement dans notre pays au point que l’heure n’a jamais paru aussi grave. Mais la singularité des dernières attaques par rapport à celles perpétrées le 15 janvier 2016 et le 13 août 2017 ne tient ni à sa violence, ni même au nombre de victimes, 8 morts militaires, 8 morts de trop. Elle tient à son mode opératoire, les assaillants se seraient fait passer pour des soldats burkinabè, et surtout à sa cible, l’Etat-Major Général des Armées. Il semble d’ailleurs que l’objectif des assaillants était de « décapiter » le haut commandement militaire de notre pays supposé être en réunion à ce moment-là.

Il ressort de ceci le constat suivant : on n’a plus affaire à un terrorisme d’opportunité qui s’attaque à des civils tranquillement attablés dans un bar ou dans un restaurant ; on a désormais affaire à un terrorisme sophistiqué qui en s’attaquant aux institutions et aux symboles de l’Etat ne cherche rien d’autres qu’à le déstabiliser, voire à l’anéantir. Face à une perspective aussi sombre, on ne peut plus se contenter de simples incantations, pas plus qu’on ne se saurait se résoudre à des prières œcuméniques, fussent-elles nécessaires. On doit agir, collectivement, rapidement et de la manière la plus judicieuse. J’en appelle ici, solennellement au chef de l’Etat et à son gouvernement afin qu’ils prennent toutes les mesures promptes à enrayer cette menace.

À tort ou à raison, certains ont qualifié les attaques terroristes du 2 mars d’actes de guerre. Cette qualification me parait un peu excessive même si bien évidemment, je ne perds pas de vue l’idée qu’elle sous-tend. A supposer que nous soyons effectivement en guerre contre le terrorisme, cela nécessiterait donc que l’on consente à un effort de guerre pour remporter la victoire. Cet effort ne peut se résumer à des déclarations d’intention, ni même aux traditionnels appels à l’unité nationale, toujours importants mais jamais suffisants. L’effort de guerre suppose que l’Etat mette tous les moyens nécessaires dans la lutte. En clair, qu’il accorde des moyens supplémentaires à nos FDS dont la bravoure seule ne peut à l’évidence venir à bout d’un ennemi dont la détermination et la perfidie nous laisse chaque fois dans un état de sidération.

Mais aussi volontaire soit-il, le gouvernement seul ne peut assumer cet effort de guerre. Il a besoin du concours de tout le peuple, des commerçants, des artisans, des travailleurs aussi bien du privé que du public. Ces derniers pourraient par exemple, le temps que la situation s’apaise, observer une trêve sociale, de sorte que les fonds qui auraient éventuellement servi à satisfaire leurs revendications bien souvent plus corporatistes que sociales, avouons-le, servent sous le contrôle de l’ASCE-LC à acheter de nouveaux équipements au profit de nos FDS qui travaillent dans des conditions déjà peu enviables, à motiver financièrement ceux d’entre-deux qui sont en mission en zones difficile et d’une manière générale à améliorer tout le dispositif de renseignement, de défense et de sécurité dont l’indigence a été mise à nu par les attaques du 2 mars. Fort de cela, il est urgent que les partenaires sociaux et autres organisations syndicales reviennent à la raison, qu’ils fassent preuve de responsabilité dans un contexte très difficile. L’histoire des grandes nations nous enseigne en effet que la construction d’un Etat libre, sûr, prospère et démocratique suppose des sacrifices que chacun doit assumer à concurrence de ses responsabilités.

La vérité n’est pas toujours bonne à dire, ni à entendre d’ailleurs mais le peuple ne comprendrait pas que pendant que sa liberté et à sa sécurité sont mises à rude épreuve, certains pour des intérêts qui ne sont pas toujours légitimes refusent de participer à l’effort de guerre, que dis-je à l’effort de solidarité que la gravité de la situation exige de nous.

Mais si la lutte contre le terrorisme nécessite un réarmement mental et matériel, il serait illusoire de penser que cela suffise. La réponse à la crise sécuritaire ne peut pas qu’être sécuritaire. Elle doit aussi et surtout être sociale, économique et peut-être même philosophique. On doit l’admettre, ces terroristes aussi barbares soient-ils, sont des nôtres et leur barbarie ne peut pas nous être étrangère. Dans le cas spécifique de notre pays, c’est la pauvreté, le sentiment d’abandon, l’obscurantisme et le manque de perspective qui ont constitué le lit sur lequel est né et a prospéré le terrorisme. Tout ceci ne justifie certainement pas toute la barbarie dont nous avons été encore victimes mais peut contribuer à expliquer comment des jeunes gens qui pourraient être pour certains des frères pour d’autres des enfants s’abandonnent à une idéologie qui sème mort et désolation sur son passage.

C’est là l’occasion pour moi de mettre l’Etat devant ses responsabilités. Il ne doit plus et ne peut plus se défausser car cette crise sécuritaire est aussi la conséquence de sa faiblesse et de son absence un peu partout sur le territoire national mais surtout dans le Nord du pays, situation qui a fait prospérer des idéologies antinationales. Rapidement et sans aucun préjudice pour les autres régions, l’Etat doit donc réinvestir la région du Nord avec plus d’écoles, plus de dispensaires, davantage de projets de développement qui redonnent à ses habitants la fierté d’être burkinabè. Le Programme d’urgence du Sahel d’un montant de 154,9 milliards de F CFA pour l’année 2018 semble avoir compris cette nécessité. Il reste à espérer que sa gestion soit saine et que sa mise en œuvre apporte des réponses efficaces aux problèmes des populations concernées, car c’est seulement de cette manière que l’on pourra tarir la source du terrorisme.

Daouda OUEDRAOGO
Doctorant en droit, université de Bordeaux

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