ActualitésDOSSIERS :: Attaques terroristes contre le Burkina : Quelle stratégie de défense et de (...)

Attendu au pied du mûr par tout le Burkina sujet à de fortes demandes sociales, le nouveau gouvernement n’aura pas eu le temps de s’installer qu’il doit faire face à un coup dur : les attaques djihadistes du 15 janvier. Coïncidence ou pas, ces attaques vont obliger le nouveau président du Faso à revoir l’ordre des priorités sur son agenda à court terme. De fait, la réorganisation des forces de défense et de sécurité, notamment les services de renseignement, s’impose désormais comme la priorité des priorités.

Le conseil des ministres de ce mercredi 20 janvier a grandement allégé le couvre feu désormais fixé entre 1 heure et 4 heures du matin. Que cet allègement soit intervenu cinq jours seulement après les attentats sanglants de l’avenue Kwamé Nkrumah, de Tin- akoff et les rapts de Djibo, est un bon signe de sérénité de l’exécutif. Le gouvernement ne veut pas céder à la panique au risque d’aggraver la peur qui s’est emparée de certains Burkinabè.

Certes, le bilan de ses actes terroristes est lourd – au moins 30 morts, 71 blessés et deux disparus - mais c’est une bonne stratégie que de dégonfler le ballon de la psychose que les rumeurs et les informations contradictoires sur le nombre de terroristes qui ont attaqué ou en fuite, faisaient enfler. Le communiqué du ministère de la sécurité publié deux jours après les attaques, invitant les populations au calme et à ne pas s’attaquer à des personnes suivant leur accoutrement et leur faciès, avait donné le ton. La réouverture de l’avenue Kwamé Nkrumah à la circulation et l’allègement du couvre feu viennent confirmer le retour à la normale malgré que le couple Eliott reste introuvable et que selon le premier ministre français, trois terroristes sont en fuite.

Mais une chose est de dégonfler la bulle de la psychose, une autre est de ne pas lever le pied sur les mesures de protection sécuritaire du pays. Dans cette logique, le renforcement des contrôles policiers aux frontières et à l’entrée des villes ne suffira pas à lui seul à offrir des conditions de sécurité maximum aux Burkinabè. On rappellera à bon escient que cette mesure était déjà en vigueur après l’attaque de la gendarmerie de Samorogouan et que les élections avaient été reportées du 11 octobre au 29 novembre, au motif de sécuriser les frontières du pays, sans que cela n’ait empêché les attaques du 15 janvier.

Par ailleurs au Mali voisin, les contrôles aux frontières et à l’entrée des agglomérations sont systématiques depuis quatre ans, malheureusement, il ne se passe pas un mois sans qu’un acte terroriste plus ou moins sanglant ne soit perpétré par des djihadistes. La dernière attaque en date est celle, qui dans la nuit du 19 au 20 janvier, a couté la vie à trois gendarmes près de Mopti. On pourrait aussi donner les exemples du Nigeria, du Cameroun et du Tchad, etc. où le renforcement des contrôles n’a pas empêché la récidive des attentats terroristes. On en déduit qu’outre le renforcement des contrôles, il faut absolument d’autres mesures en amont.

Sans être spécialistes des questions militaires, la simple observation de l’actualité nationale donne de voir que la question de la réorganisation des forces de défense et de la sécurité entreprise sous la transition est un chantier inachevé. Par exemple l’agence nationale de renseignement, n’est toujours pas fonctionnelle. Les séquelles du putsch avorté du général Gilbert Diendéré pèsent encore sur le moral des troupes. Il y a eu de multiples arrestations d’officiers, de sous-officiers et des hommes de rang. L’élévation du premier ministre de la transition du grade de lieutenant-colonel à général de division est aussi source de division et de frustration dans l’armée. La presse fait aussi état de grogne à la brigade anti criminalité pour des raisons d’indemnité de patrouille non versée depuis treize mois.

Le jour de l’attaque des terroristes sur l’avenue Kwamé Nkrumah, les forces de défense et de sécurité, selon le constat relayé par plusieurs médias, ont mis une heure de temps pour arriver sur les lieux et plus de cinq heures pour donner l’assaut. C’est trop de temps laissé aux assaillants qui auraient pu commettre plus de massacres. Pourquoi toutes ces lenteurs des forces de défense et de la sécurité que l’on couvre par des félicitations redondantes sur leur professionnalisme ? Question de commandement ? Problèmes de logistiques ? Surprise et inexpérience ? Peut-être tous ces manquements à la fois qu’il faut travailler à corriger au plus vite.

Ce chantier est assurément la priorité des priorités pour Roch Marc Christian Kaboré car sans la paix et la sécurité intérieure, tous les autres projets peineront à être réalisés. Sans doute que le président Roch, qui est aussi le ministre de la défense, est conscient de cet enjeu sécuritaire, lui qui à son discours d’investiture a appelé les pays de la région à la mutualisation des efforts pour combattre le terrorisme. Dans la foulée, le chef d’état major général de l’armée a été l’une des premières personnalités qu’il a reçues et l’on se doute que c’était pour être briefé sur la situation sécuritaire du pays. Par ailleurs, confié la sécurité à un ministre d’Etat, Simon Compaoré, dont l’entregent est bien connu, n’est pas un fait du hasard. Il y a du pain sur la planche à ce niveau. Vite des reformes, des moyens, de la collaboration et des renseignements pour sécuriser le Burkina !

A propos de collaboration et de renseignements, on peut critiquer la méthode Blaise Compaoré parce qu’il pactisait avec les djihadistes, mais elle avait ceci d’efficace, que le Burkina a été épargné par les attaques et au contraire a participé à la libération d’otages. Sans faire l’avocat du diable, c’est là une politique simple à comprendre. On ne peut pas infiltrer les djihadistes, les surveiller pour recueillir des informations sur la sécurité du pays sans nouer des contactes avec eux. C’est le B. A. BA du renseignement et les Américains l’ont expérimenté avec Ben Laden avant que ce dernier ne devienne incontrôlable. La suite on la connait.

Force reste toujours à la raison d’Etat qui ne s’accommode pas d’amitié quand ses intérêts sont en jeu. Au demeurant, ne dit-on pas dans le Plateau central que « si un voleur entre chez toi et que tu n’a pas la force de le chasser, porte- lui les biens qu’il t’aura dérobés ». C’est un stratagème de sécurité pas du tout bête. Le nouveau pouvoir devrait y réfléchir dans la définition de sa stratégie pour la sécurité du pays. Qu’il prenne garde à ne pas s’enfermer dans le discours souverainiste surréaliste de ceux qui demandent entre autre le départ des forces étrangères du Burkina. A bon entendeur…

Derbié Térence Somé
Pour Lefaso.net

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