Encore les vacances ; on entend et on voit tout le monde bouger aux rythmes de musique de tous genres : du hip-hop, du reggae, du raga, du slow et surtout du « couper décaler ». « Le couper décaler » est un phénomène inquiétant ; cette musique importée fait des ravages. Sujet de polémique, elle a alimenté plus d’une fois des causeries, des débats et même des réflexions.
En effet, l’avènement des chansons et des danses ivoiriennes au Burkina Faso ne date pas d’hier ; elle est l’une des conséquences du complexe d’infériorité qu’ont certains Burkinabè face aux ivoiriens sur le plan culturel. Cette invasion s’est accrue avec la crise ivoiro-ivoirienne qui a renvoyé au bercail de nombreux « diaspos ».
Ainsi, ces « diaspos », reconnus comme des "chauffeurs", vont favoriser l’ascension du "couper décaler ", qui n’aura aucun mal à se classer parmi les musiques les plus écoutées, grâce au pouvoir de séduction de son rythme. Eh bien, ce mouvement né dans les boites de nuit et maquis gérés par des Ivoiriens ou des "diaspos" a vite pris de l’ampleur et a inondé l’ensemble des boites de nuit et maquis de notre chère capitale.
Il arrive que des Burkinabè ne prennent pas la bière à un endroit tout simplement parce qu’ils (les gérants) ne mettent pas du bon « couper décaler ». Ce mal a évolué négativement ; après les jeunes, c’est le tour des personnes mûres. Si seulement, elles étaient mûres d’esprit. Mais à qui la faute ?
C’est notre faute à nous, nous qui avons une cinquantaine de CD de musique étrangère et pas un seul de musique burkinabè, nous qui zappons sur les chaînes de radios tant qu’on n’a pas trouvé du « couper décaler », nous qui, à tous les coins de rues, devant le thé, nous empoisonnons avec cette musique. C’est la faute à ceux -là qui propagent ces rythmes pervers, endiablant et ces chansons provocatrices sur nos ondes de radios et de télévision.
Ces personnes influentes du show-biz ne sont pas des hommes de culture, mais des « businessmen ». Cet empoisonnement de la culture burkinabè leur profite et par la même occasion aux commerçants dont les affaires fleurissent grâce aux vêtements, sacs, chaussures et même sous-vêtements « couper décaler ». Dans ces conditions, le "couper décaler" est une véritable industrie qui profite par ricochet aux décideurs, qui sont jusque-là passifs.
Ce phénomène d’acculturation montre à quel point les populations burkinabè sont sous-éduquées, parce que tout est un problème d’éducation, d’information et de formation pour amener les gens à avoir un esprit critique sur les événements, afin de ne pas se détourner des maux qui les minent, à savoir l’ignorance, la maladie, le chômage et tout ce qu’ils peuvent engendrer. C’est avec un peu de bon sens et de patriotisme qu’on pourra enfin venir à bout de cette aliénation.
Dahpouady Ouoba
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