Actualités :: Destruction des "Bars Kundé" : 5 mois après, le DG parle ...
Dominique Tapsoba

Le 16 mars 2007, à la surprise générale, les bars de la chaîne des kundé sont attaqués par des badauds dans les différents secteurs de la ville de Ouagadougou. Selon ceux-ci, un des responsables serait impliqués dans un meurtre et dans de trafics d’organes humains, pour disent-ils faire du "wack" qui servirait à faire prospérer leurs affaires.

Comme une traînée de poudre, la rumeur a fait le tour de la ville, obligeant les premiers responsables à se "réfugier" auprès des autorités. Quelques jours après, on se rendra compte que ces derniers ne sont ni de près ni de loin, liés à cette affaire de meurtre. 5 mois après, M. Dominique TAPSOBA, le directeur général de la chaîne des kundé a bien voulu nous recevoir pour échanger sur ces tristes évènements.

M. Dominique TAPSOBA, pouvez-vous nous présenter la chaîne des kundé et comment est-elle gérée ?

Dominique TAPSOBA (DT) : Disons que la chaîne des kundé est un ensemble de bars, des débits de boissons en général, gérés par un groupe d’amis au départ, maintenant, liés par les affaires et on travaille ensemble chacun dans son domaine de compétences et de ses expériences. Il y a un qui s’occupe de la gestion des finances : M. Augustin SAKANDE, un s’occupe de l’organisation commerciale et de la coordination : M. Madi KONFE. Moi je m’occupe de l’approvisionnement et des grandes orientations de la chaîne en tant que directeur général.

Peut-on avoir une idée sur le nombre de bars et d’employés que vous avez en charge ?

D.T : Bon, vous savez que nous sommes dans un milieu qui évolue presque quotidiennement. Si c’est le nombre de bars, disons que nous gérons 25 bars. Mais le nombre d’employés, comme je l’ai dit évolue et on peut atteindre à 1000 à peu près. Vous connaissez les serveuses, elles bougent, elles reviennent. Mais, on peut affirmer qu’on est autour de 1000 employés.

En mars 2007, les bars kundé ont été victimes d’actes de vandalisme et ses responsables accusés de trafics d’organes humains pour faire du "wack". Avec le recul, quelle analyse faites-vous de ce qui s’est passé ?
D.T : Personnellement, comme analyse, je pense que les gens estiment, et sont même convaincus qu’on ne peut rien faire de grand, de clair dans ce pays. Ce qui est bien dommage. Je pense qu’en toute chose, il suffit de croire en ce qu’on fait et de se donner les moyens pour réussir.

Je n’arrive pas encore à comprendre que certains pensent que pour ouvrir ou avoir des chaînes de bars, il faut trafiquer des organes humains. C’est inadmissible, incompréhensible... Mais à combien ? Je connais des milliardaires dans ce pays, mais on ne dit pas qu’ils trafiquent des organes humains. Pourquoi, personne ne peut réussir sans que les gens y voient des trucs louches ? Non, je pense qu’on peut réussir de manière honnête. Et à ma connaissance, il n’y a aucun milliardaire parmi nous au Kundé.

Nous sommes des gens qui continuent de chercher leur voie dans l’informel pour réussir ce qu’ils font.
Seulement, on est en train de faire la différence, c’est tout ! Je ne pense pas que pour réussir il faut aller voir le "wackman" ou trafiquer des organes humains. Il faut croire en ce qu’on fait et y mettre toute son énergie. D’ailleurs, je ne crois pas à ces histoires de wack, c’est le travail et rien que le travail seul qui paie...

Mais comment avez-vous vécu la situation en ce mois de mars 2007 ?

DT : Très difficilement, très difficilement. Et jusqu’à présent, on se remet péniblement. Je ne pense pas qu’il y a un entrepreneur qui démarre quelque chose en prévoyant une pareille éventualité de perte. Etre assis un matin, voir tout ce que tu as mis des mois et des mois, durant pour construire soit détruit d’un coup, avouez que c’est difficile à gérer. Il nous a fallu du courage et de l’abnégation pour que d’abord, on puisse maintenir le cap et ensuite chercher à gérer. Je vous assure que si c’est côté finance, jusqu’à présent on se bat pour maintenir l’équilibre.

Combien de bars ont été détruits et à combien estimez-vous les pertes ?

DT : Il y a eu 4 bars détruits. Les évaluations continuent et un expert a promis les résultats dans quelques jours. Mais à mon avis, si je dois avancer un chiffre, je dirais que ce n’est pas moins de 300 millions si on y ajoute l’immobilier.

Le Kundé de la cité AN II est un des joyaux de la chaîne, va-t-il ouvrir ces portes un jour ?

DT : Si vous avez remarqué, on est en train de le démarrer timidement, mais ce n’est pas facile. On a démarré, en espérant que petit à petit, on pourra arriver à le finir, mais j’avoue que ce n’est pas facile ;
Les financements ne sont pas acquis. Mais il faut que je le mentionne sans faire de publicité, c’est la BRAKINA qui nous a donné un "bon coup de main", mais bon, c’est pas suffisant. On profite vraiment de cette occasion pour dire merci à la BRAKINA, parce qu’elle nous a aidé avec un peu d’argent, mais, ce n’est pas suffisant.

Pour le moment aucun des bars détruits n’est fonctionnel. La réfection a commencé seulement avec celui de la cité AN II, sinon les autres bars, sont là, rien n’a démarré.

Après les évènements, certains des responsables des kundé ont accusé des concurrents de propager la rumeur par jalousie. Maintenez-vous ces accusations 5 mois après ?
DT : C’est vrai que dans le feu de l’action beaucoup de choses ont été dites de toutes parts. Mais jusqu’à présent, je n’arrive pas à m’expliquer cet acharnement contre les Bars Kundé.

Même avec le recul, je pense qu’il y a un peu la jalousie de certains qui ont contribué à ces destructions. Mettez-vous à ma place ! Vraiment, je ne comprends pas. C’est incroyable. Même si on me disais que quelque chose de ce genre se passerait dans un pays, je n’allais pas croire. Je n’ai jamais pensé que cela pouvait nous arriver.

A l’époque, on avait parlé d’un certain MAIGA qui est dans votre groupe et qui se livrait à des actes répréhensibles...

DT : ... Ah, vous parlez du nommé MAIGA ? Non ! Je vous jure que jusqu’à présent, je ne sais même pas qui est ce MAIGA. Je ne l’ai jamais vu même en photo, n’en parlons pas physiquement. C’est quelqu’un qu’on ne connaît pas et qui se disait appartenir aux Kundé, c’est tout. Personne de nous ne le connaît, personne. C’est après que quelqu’un m’a dit qu’il a appris que c’est son père qui gérait le bar de la cité au temps de la Révolution, c’est tout.

D’aucuns s’expliquent difficilement la renommée des kundé, en quelques années "vous avez percé "comme on le dit. Alors comment avez-vous travaillé pour avoir cette renommée ?

DT : En toute chose, dans tout travail, il faut aimer de ce qu’on fait. Si vous prenez les responsables des kundé, chacun a au moins près de 20 ans, même plus dans le travail des bars et autres débits de boissons. Aux kundé, on innove à tout moment. Je précise qu’actuellement, on a innové en créant une sorte de corps de métier, c’est-à-dire qu’on a des gens qui se sont spécialisés dans la gestion des maquis. Aujourd’hui, même si vous, vous avez un maquis, et vous voulez qu’on le gère, vous pouvez nous le confier et dormir tranquille, nous allons le gérer, c’est notre travail à 100%. Généralement, les gens veulent bien se lancer dans le métier mais, ils ont peur de la gestion, mais nous on le fait sans problème, c’est notre travail.

Notre renommée, c’est parce qu’on est très professionnel, on se donne à fond et on est bien organisé.
Un exemple, je ne pense pas que dans ce pays, il y a quelqu’un qui a déjà osé investir près de 50 millions dans un maquis qui ne l’appartient pas. Je ne pense pas. Mais nous on l’a fait à la cité AN II. Nous on veut réussir dedans. Je pense que c’est pour ça qu’on est aussi apprécié. Si on fait de l’approximatif, parce qu’on a peur que ça ne marche pas demain, les résultats seront toujours en deçà, c’est sûr !

Est-ce que vos employés, surtout les femmes sont bien rémunérés ?

DT : Bon, c’est à elles de vous le dire. Ce que je sais, c’est que chez nous les mieux payées n’ont pas moins de 25 000F et je ne pense pas qu’il existe beaucoup de maquis qui font mieux que nous. Je n’ai pas fait le tour mais, je suis presque convaincu de ce que je dis. Beaucoup ne font pas mieux que ça. Pour des bars dancing du standing des kundé, je ne parle pas des boîtes de nuit et des hôtels, je parle des bars dancing et autres maquis.

5 mois après, comment se porte la chaîne des kundé ?

DT : Bon ! Je dirais bien et pas bien...

Qu-est-ce que cela veut dire ?

DT : Si c’est du côté de la clientèle, je peux dire que la confiance règne toujours. Nos bars sont toujours bien fréquentés, parce qu’on avait peur que les évènements du 16 mars ne portent un coup à notre renommée.
Heureusement, la clientèle a compris, et elle nous fait confiance. De ce côté, nous sommes vraiment satisfaits. Tout le monde s’est rendu compte qu’on a été victime d’une grosse méprise. Si je dis pas bien, c’est côté finance, la trésorerie. De ce côté, je ne vous cache rien, tous les jours, on se bat pour maintenir l’équilibre. A la limite, on pense difficilement à l’avenir. On gère le quotidien. C’est vrai que le seul projet d’avenir pour nous c’est d’arriver à réhabiliter les bars détruits, alors qu’on n’avait pas mal de projets en vue.

Avant les évènements du 16 mars, je vous assure qu’on avait de très gros projets concernant entre autres la musique burkinabè, la décentralisation des kundé dans les autres chefs-lieux de province...
Mais actuellement, c’est pas facile et on n’y pense plus. Notre souci actuellement, c’est de réhabiliter les bars détruits.

C’est vraiment étonnant, parce qu’on dit qu’il y a des "gourous" du pays qui sont derrière les kundé. C’est pas étonnant ?

DT : Vraiment, s’il vous plait ! Cette affaire de gourous revient encore ! ? Je ne sais plus comment expliquer pour faire comprendre qu’il n’y a pas de gourous qui sont derrière nous. On peut nous confier un bar à gérer, peut-être à ce niveau. Même à ce niveau, je ne vois pas. Mais si un gourou met par exemple 50 millions dans un grand maquis et nous confie la gestion, nous allons le gérer sans problème, puisque quand on gère le maquis de quelqu’un, on a un pourcentage.

Cette histoire de gourous, je ne sais plus quoi dire pour que les gens comprennent une bonne fois pour toute. Chez nous aux kundé, l’union fait la force. Quand on se met ensemble, on peut faire de grandes choses. Un exemple, moi en tant que directeur général, je peux me permettre de rentrer à la maison à 20h, parce que je sais qu’on est bien organisé, c’est vraiment une chaîne, je n’ai pas besoin de faire le tour des bars pour voir ceci ou cela. Chacun a son travail et il l’exécute bien. C’est tout. Y a pas de wack, il faut être bien organisé et aimer ce qu’on fait.

A quel stade se trouve le dossier kundé au niveau de la justice ?

DT : Bon ! Le dossier est en cours. On est en train de ficeler le dossier jusqu’à présent avec notre avocat. On n’a pas grande chose à dire puisqu’il est en cours.

La chaîne des kundé était impliquée dans l’organisation de la fête de la bière, pourquoi cette fête n’a pas eu lieu cette année ?

DT : Il faut faire la part des choses, ce n’est pas la chaîne des kundé qui organisait la fête de la bière. C’est le bureau du syndicat des tenanciers qui organise la fête de la bière. Mais comme beaucoup de membres de la chaîne des kundé font partie du syndicat, les gens pensent que ce sont les kundé qui organisent la fête de la bière. Non ! C’est le bureau du syndicat. Si cette année l’organisation de cette fête n’a pas eu lieu, vraiment je ne sais pas pourquoi. Il faudrait peut-être poser la question au bureau du syndicat.

Qu’avez-vous à ajouter pour conclure notre entretien ?

DT : Pour conclure, je dirai aux gens de croire en ce qu’ils font et que seul le travail paie. Il n’y a pas d’autre secret. Ces histoires de wack, de trafics d’organes humains et autres, je ne pense pas que cela peut remplacer le travail bien fait. Ce que je peux ajouter, c’est de dire merci, merci beaucoup à nos clients qui nous font confiance. Je ne sais pas comment remercier nos clients parce que sans eux, je ne sais pas où on serait. C’est grâce à leur soutien qu’on a pu tenir le coup dur. On a vraiment reçu un gros choc, mais grâce à eux on essaie de sortir la tête de l’eau.o

Entretien réalisé par Idrissa BIRBA

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