Actualités :: Solidarité au Burkina Faso : Laurent K. Bado pour l’élaboration d’une (...)
Laurent Bado

Dans la déclaration ci-dessous, le fondateur du PAREN, Laurent Bado loue l’initiative du ministre de l’Action sociale et de la Solidarité nationale qui envisage élaborer une charte de la solidarité au Burkina. M. Bado met en garde toutefois contre le mimétisme et invite à ne pas copier la solidarité vécue par les autres. Sidwaya vous propose la déclaration in extenso.

Les 15 et 16 février 2007, un symposium sur la solidarité au sein des communautés burkinabè a été organisé par le ministère de l’Action sociale et de la Solidarité nationale aux fins d’élaboration d’une charte de la solidarité au Burkina.

L’entreprise de Madame le Ministre n’est pas seulement louable, elle est éminemment salutaire car, si elle réussit, le Burkina aujourd’hui, les autres pays africains demain, retourneront à la bifurcation où la colonisation leur a fait perdre leur chemin pour reprendre la voie nationale de leur développement.

La réussite de cette entreprise colossale dépend de notre façon d’ entendre le mot « solidarité ». La solidarité d’ici n’est pas la solidarité d’ailleurs, Voir la solidarité d’ici avec le prisme de la solidarité d’ ailleurs risque, dans l’ effort national, de restaurer cette solidarité en voie de déperdition, de nous amener à apporter une réponse fausse à une question vraie. Les faits sont là :
- La société libérale, fondée uniquement sur la liberté individuelle, place l’individu au-dessus du groupe, ce qui se traduit, au plan socio-économique, par le capitalisme privé qui consacre l’égoïsme individualiste : c’est chacun pour soi !

- La société socialiste, fondée uniquement sur la liberté collective, place le groupe au-dessus de l’individu, ce qui se traduit, au plan socio-économique, par le capitalisme d’Etat qui consacre l’égoïsme collectif : c’est un pour tous !

- La société africaine, fondée à la fois sur la liberté individuelle et sur la liberté collective, place l’individu et le groupe en équilibre dynamique, ce qui se traduit, au plan socio-économique, par la coexistence d’un capitalisme privé (champs individuels et autres activités rémunératrices personnelles) et d’un capitalisme d’Etat (champ familial et troupeau familial) qui consacrent l’interdépendance sociale ou grégarisme dont l’appellation courante est la solidarité : c’est un pour tous et tous pour un !

On le voit bien : la société africaine est la seule qui a su concilier l’indispensable liberté individuelle et la nécessaire solidarité dans le groupe. En copiant donc le modèle libéral, l’Afrique s’ampute de ses capacités créatrices intrinsèques : elle recule au lieu d’avancer. C’est ce qui explique que ce continent, immensément riche, a les populations les plus misérables de la planète, à tel point que les jeunes africains, perdant tout espoir en l’avenir, bravent les vagues et les requins blancs pour prendre d’assaut les frontières de l’Europe !

Le mal africain, c’est le mimétisme bovin au moment même où le libéralisme exploiteur est contesté par les altermondialistes et le socialisme oppresseur, en pleine déroute. Greffer le modèle libéral sur une mentalité africaine qui lui est étrangère et opposée, c’est détruire le fondement de la société traditionnelle, l’âme africaine, la vision africaine de la vie en communauté humaine.

Qu’on ne s’y trompe pas : la solidarité est une valeur recherchée par la société d’égoïsme individualiste ; elle est plus qu’une valeur en Afrique ; elle est le fondement de la société africaine, le noyau central sur lequel l’organisation politique, économique et sociale repose ! Ce qui veut dire que l’erreur à ne pas commettre, c’est chercher à restaurer la solidarité en palliant les conséquences dommageables de sa déperdition par des mesures et d’autres actions ponctuelles puisqu’elle n’est pas un moyen chez nous, mais une fin, les moyens politique, économique et social étant commis à cette fin.

Pour redonner à notre solidarité la place qui est la sienne dans notre société, il faudrait nous poser les questions suivantes :
- Première question : dans quel type de société vivaient les Burkinabè d ‘hier ? En clair, quelles étaient leurs aspirations profondes et de quelle manière ces aspirations étaient mises en œuvre ?
- Deuxième question : dans quel type de société aimeraient vivre les Burkinabè d’aujourd’hui ? En clair, quelles sont leurs aspirations profondes et de quelle manière ces aspirations pourront être mises en œuvre ?

Dans un ouvrage publié en 1974 par les presses de l’Observateur Paalga et intitulé « Fraternité d’abord », mon grand-frère, Bado Mathieu (ambassadeur de son état à l’époque) et moi avions répondu à cette double question (le livre a été signé par lui qui était plus connu que moi et ceux qui le reliront découvriront le tercérisme dans toute sa profondeur !).

A la première question, nous avions relevé que les aspirations de nos pères étaient la fraternité et la dignité qui étaient mises en œuvre par une triple communauté de travail, des instruments de travail et du fruit du travail (propriété collective ou capitalisme d’Etat avec le champ familial) à côté d’une maîtrise individuelle (propriété privée ou capitalisme privé avec les champs individuels) et par une triple entraide professionnelle (sosoaga : les cultivateurs s’entraident pour cultiver leur champ !), interprofessionnelle (tout le monde peut aider une personne à faire ses briques et à construire sa case !) et sociale (tout le monde participe aux événements heureux ou malheureux d’une personne ou d’une famille !).

A la deuxième question, nous avions relevé qu’aux aspirations à la fraternité et à la dignité reçues des ancêtres s’ajoute désormais une troisième qui nous vient du monde moderne : le bien-être matériel. Nous avions alors dégagé les implications politiques, économiques et sociales de ces trois aspirations profondes qu’il n’est pas possible de présenter dans cet écrit.

En conclusion, il importe peu d’inventer une nouvelle solidarité ; il faut asseoir le politique, l’économique et le social sur le socle de la solidarité dans une civilisation africaine du « nous » et non du « je » et dans une économie de liens sociaux et non de biens et de profits égoïstes. Quand l’Afrique se réveillera avec sa solidarité au cœur des institutions modernes, le monde dit moderne qui se barbarise et s’animalise tremblera.....de paix et de félicité uni- verselle : l’ Afrique est un géant qui dort.

Laurent K. Bado,
Fondateur du PAREN

Sidwaya

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