Les autorités maliennes ont annoncé le 14 novembre 2023 la reprise de la ville de Kidal aux mains des rebelles touaregs, de la Coalition des mouvements de l’Azawad (CMA) depuis plus de dix ans. L’importance que Bamako donne à cette victoire d’étape a été signalée par deux communiqués : celui de l’état-major des Forces armées maliennes (Fama) et celui du chef de l’Etat lui-même, le colonel Assimi Goïta. Il a raison le chef de l’Etat malien de brandir cette victoire.
C’est un trophée, car l’un des objectifs de son coup d’Etat était de recouvrer l’intégrité du territoire. Si le Mali retrouve le nord, et est de nouveau souverain dans le nord de son pays, reste à faire de cette immense réserve supposée de ressources minérales et d’hydrocarbures, une zone pacifiée où le développement est possible, l’exploitation des richesses peut se faire. Car c’est une bataille qui est gagnée, car les rebelles et les terroristes à Kidal sont les revers d’une même médaille. Ils sont devenus les maîtres de l’insécurité par leur connaissance du terrain, leur mobilité et leur capacité à surprendre l’ennemi.
Le colonel Assimi Goïta peut se féliciter de ce succès qui n’aurait pas été possible sans le double renvoi des troupes françaises qui avaient pris fait et cause pour la rébellion et la Minusma qui était venue pour geler les positions, selon l’accord d’Alger. Avec le départ de la Minusma, les mouvements rebelles voulaient récupérer les camps de celle-ci dans leur zone. L’ONU refusait de les leur remettre parce que c’est le Mali qui a invité ses soldats et c’est à l’Etat malien que les camps doivent être remis. La situation s’est dégradée, et les soldats de la paix étaient devenus la proie de tous les belligérants. Ils sont partis de Kidal le 31 octobre 2023, et la guerre a repris entre la rébellion et l’armée malienne qui, avec ses drones et ses avions, a eu raison des mouvements séparatistes qui ont quitté la ville pour se fondre dans cette nature hostile de montagnes qu’ils connaissent bien.
On espère que cette prise de Kidal des mains des rebelles et des groupes terroristes sera définitive pour l’unité du Mali. Car tout est parti de là voilà une décennie. Le malheur et le chaos du Sahel sont nés à Kidal. En s’alliant aux groupes terroristes, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et les autres mouvements irrédentistes ont ouvert la boite de Pandore qui a libéré tous les diables qui menacent les Etats du Sahel déjà fragiles du fait de l’environnement et de la crise du climat, à laquelle est venue s’ajouter une crise sécuritaire et humanitaire au long cours.
L’accord d’Alger enterré avec la prise de Kidal
Cette bataille gagnée par les Forces armées maliennes (FAMA) et les supplétifs de Wagner est porteuse de bouleversements importants si elles conservent leurs positions. C’est la fin du mauvais accord d’Alger que les autorités maliennes, même celles qui l’ont signé, trouvaient que c’était un très mauvais arrangement. C’est aussi une défaite de tous les parrains de cet accord, à commencer par l’Algérie, qui doit très vite prendre langue avec les colonels de Bamako pour que des relations de bon voisinage se tissent avec le Mali comme au temps de Boumediene. Ce serait vraiment dommage si l’Algérie sert de base arrière aux rebelles et aux terroristes si la zone est pacifiée.
La France, qui a parié sur les rebelles, voit encore un espoir partir en fumée. Dans son bras de fer avec les colonels putschistes, ceux-ci ont marqué de très bons points qui restent à confirmer. On l’a déjà dit et même des diplomates français s’y étaient opposés, le refus de l’armée française de laisser l’armée malienne qui avait battu les rebelles pénétrer à Kidal en 2012 a été le carburant qui a alimenté la crise.
Bamako a aujourd’hui toutes les cartes en main pour conclure un accord juste avec les mouvements du Nord qui acceptent la souveraineté du Mali. Il faut aussi qu’il obtienne de l’Algérie qu’elle ne servira pas de base arrière aux rebelles maliens, aux terroristes et aux djihadistes. Mais c’est d’abord la responsabilité des Maliens qui est importante, chercher à rebâtir un vivre ensemble dans la paix et la cohésion sociale. Ce n’est un secret pour personne que les groupes terroristes ont essaimé au Sahel à partir de Kidal. Si nous ne nous divisons pas, nous vivons en paix, les étrangers ont davantage du mal à venir s’installer et nous apporter la haine et la guerre.
Sana Guy
Lefaso.net
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