Actualités :: Législatives de 2020 : « Nous inviterons les jeunes à prendre d’assaut (...)

Il est conseiller spécial du président du Faso, chargé du secteur privé. Il est aussi le président du parti AJIR (Alliance des Jeunes pour l’Indépendance et la République). Depuis un moment, il s’est engagé dans une lutte sans merci contre le covid-19. A un moment, il n’a pas hésité à fustiger la gestion de la maladie. Lui, c’est Adama Kanazoe. Dans une interview qu’il nous a accordée, le mercredi, 13 mai 2020 à Ouagadougou, il nous parle de la pandémie, de la jeunesse dans la gouvernance et de son avenir politique. Il milite aussi pour un second mandat pour Roch Marc Christian Kaboré. Entretien !

Lefaso.net : A l’élection présidentielle de 2015, vous échouez. Vous étiez dans l’opposition et aujourd’hui, à la majorité. Que s’est-il passé ?

Adama Kanazoe : J’étais à l’opposition politique avant 2015 avec mon parti AJIR. C’était une démarche esquissée en vue de parvenir à l’alternance politique au Burkina Faso. Les choses ont connu la tournure que nous avons vécue. L’insurrection populaire a précipité le départ du président Blaise Compaoré. L’opposition n’a pas obtenu un candidat unique pour aller à ces élections.

Nous sommes allés en rangs dispersés, mais il convient de souligner qu’un accord tacite nous liait. C’était que celui d’entre nous qui serait le mieux placé bénéficie du soutien des autres. A l’issue des élections, le président Roch Marc Christian Kaboré et son parti, le MPP sont sortis vainqueurs. Dans le respect de l’accord qui existait, bon nombre de partis de l’ex opposition se sont retrouvés auprès du président Kaboré pour l’accompagner dans les nouvelles charges à lui confiées.

A l’époque, nous avions promis ensemble le changement au peuple burkinabè. Nous avions tellement prôné ce changement que le peuple burkinabè est allé jusqu’au sacrifice suprême. Il a donné la vie de ses enfants, de ses femmes, de ses filles pour obtenir cette alternance. Pour nous, ce serait une trahison de ne pas contribuer justement à ce changement promis. C’est dans ce sens que nous avons décidé d’accompagner le président Roch Marc Christian Kaboré. Il s’est agi de faire en sorte que les attentes des populations soient satisfaites le maximum possible.

Vous avez respecté un accord et vous voilà conseiller spécial du président du Faso. Alors, quel est votre rôle exact à Kossyam ?

Moi, j’ai pantouflé au service du secteur privé. J’ai occupé des postes de responsabilité dans des multinationales à travers l’Afrique, et j’ai été pour beaucoup dans l’essor de la question de l’entrepreneuriat des jeunes au milieu des années 2000. C’est alors que chef de l’Etat a estimé que, par mon expérience, je pouvais lui apporter quelques éclairages. Cela porte sur la mise en place d’un meilleur climat des affaires au Burkina Faso.

Nous travaillons donc au quotidien à déceler les meilleures approches pour permettre notamment au secteur privé et à l’entrepreneuriat d’émerger. Sur ce plan, nous avons un code d’investissement au Burkina Faso qui l’un des plus attractifs. Nous avons un code pour les PME (Petites et moyennes entreprises) qui a été adopté récemment. Il permet justement d’établir des quotas, même sur des marchés publics pour les PME. Il y a un travail qui est fait en ce sens, en collaboration avec le ministère en charge du commerce.

Nous sommes déjà à 5 ans du mandat du président du Faso. En tant que collaborateur, quels sont les acquis que vous avez pu engranger ?

Le chef de l’Etat lui-même, en premier, reconnait que son mandat n’a pas été facilité par certains facteurs inattendus. Vous savez tous que, très tôt, le gouvernement a été confronté à la question épineuse du terrorisme rampant qui ne cesse de se métastaser. C’était une problématique nouvelle. Il était important que nous puissions nous en accommoder pour pouvoir porter la riposte.

Ensuite, il y a également que, sous la présidence du président Kaboré, le front social n’a jamais été aussi bouillonnant. On déplore des revendications tous azimuts qui ont suffisamment perturbé le climat d’affaires, la mobilisation des ressources internes et du coup, la création de richesses dans notre pays. Et puis arrive le covid-19. Ce sont autant de facteurs conjugués qui ne nous ont pas rendu la tâche facile.

Nonobstant cela, bon nombre d’engagements avec le peuple burkinabè ont été tenus. Il s’agit notamment des projets d’infrastructures routières. Tout le monde s’accorde pour dire que c’est le président des routes. C’est lui qui est en train de donner un nouveau visage à la ville de Ouagadougou.

Pas seulement, les villes et les villages du pays se relèvent d’un confinement asphyxiant, avec des routes bitumées de bonne facture. Voyez les habitants du Centre-nord, du centre-est, du centre-sud, des cascades, des hauts-bassins, du centre-ouest, de l’est, du nord, de la boucle du Mouhoun, du Plateau central, enfin c’est tout le pays qui est en chantier, ne vous diront pas le contraire.

Aussi, il y a un travail impressionnant qui a été fait avec la prise en charge des populations sinistrées du fait des activités terroristes. Je dois dire que le président est un homme au grand cœur ; il a le cœur sur la main. Il y a également un ensemble d’acquis qu’on peut noter au niveau du secteur agricole avec la dotation de tracteurs aux paysans, en vue de faciliter leur travail et accroitre les rendements.

Des insuffisances il y en a et nous en sommes conscients. C’est pour cela qu’il serait judicieux que le chef de l’Etat bénéficie de nouveau de la confiance du peuple burkinabè. L’objectif étant qu’avec ce second mandat, il puisse aller au bout de ses ambitions. Nous savons qu’à la base, c’est quelqu’un, épris de justice et de bon sens, qui nourrit de grands projets pour le Burkina Faso.

Covid-19 on en reparle. Vous avez décriez la gestion du covid-19 à un moment donné. Qu’est-ce qui a changé après votre sortie ?

L’idée pour nous, ce n’était pas de faire des polémiques. C’était qu’en tant que lieutenant du chef de l’Etat, de rappeler le fil conducteur de sa politique aux troupes. Il n’y avait rien d’incommodes. Bien au contraire, c’était une façon de galvaniser les troupes, d’appeler tout le monde à l’essentiel. L’essentiel, c’est ce qui a motivé le chef de l’Etat à consentir près de 400 milliards de F CFA pour sauver son peuple des affres de cette pandémie.

Depuis lors, beaucoup de choses ont évolué. Ce n’est pas forcement du fait de mon propos. C’est également du fait de la dynamique imprimée par le chef de l’Etat lui-même. Il a toujours été au-devant des combats. C’est lui qui, le premier, a annoncé les mesures. Il est allé à Tengandogo (hôpital) pour rassurer tout le monde.

Il a fait en sorte qu’il y ait une nouvelle dynamique au niveau du comité de lutte contre la pandémie. Il y a du sang neuf qui a été injecté. Il y a des directives qui ont été rappelées aux uns et aux autres. Nous avons entièrement confiance en la capacité de notre commandant en chef à protéger le peuple burkinabè face à cette pandémie et toutes les autres formes de menace.

Un conseiller qui critique une gestion dont il est comptable, c’est quand même osé. Est-ce qu’on peut s’attendre à ce que vous démissionnez pour protester contre l’immobilisme au sommet de l’Etat ?

Je pense d’ailleurs que certaines personnes, à dessein, ont essayé d’extrapoler mon propos. Voyez-vous de l’immobilisme au sommet de l’Etat ? Moi, pas du tout. J’ai suivi le président du Faso durant ce mandat, parce que j’ai d’abord confiance en sa personne. Je connais ses convictions. A la base, C’est quelqu’un d’honnête, de correct. Je sais ce que l’homme vaut. Je sais ce qu’il veut. Je sais que ses motivations sont saines et nobles. Le jour où je viendrai à en douter, je ne me ferai pas prier pour rendre le tablier. Je prendrai les devants.

Aussi voudrais-je dire que le chef de l’Etat n’est pas le technicien qui est sur le terrain pour exécuter les tâches à lui confiées. Il peut consentir 400 milliards de F CFA pour assurer le bien-être de ses compatriotes, mais ce qu’on fera, nous autres, chargés d’implémenter les projets, n’est pas évident.

L’homme a besoin de s’entourer de cadres patriotes, hautement qualifiés. Il vous souviendra que tous les cadres ne sont pas nommés systématiquement par le Chef de l’Etat. Un conseiller qui rappelle aux acteurs de terrain la volonté du chef de l’Etat n’est aucunement sorti de son rôle. Je pense que les gens se méprennent sur le rôle d’un conseiller.

Vous n’êtes pas restés sans rien faire face au covid-19. Où en-est-on avec votre opération « un burkinabè, un masque »

J’ai décidé de soutenir mon pays. J’ai décidé d’envoyer sur le terrain des jeunes pour accompagner la dynamique que le chef de l’Etat a insufflé dans le combat patriotique contre le covid-19. Nous nous attelons à accompagner l’action du chef de l’Etat. Nous sensibilisons aussi nos compatriotes pour qu’ils respectent les mesures barrières. Dans le cadre de l’opération, « Un Burkinabè, un masque », nous fabriquons des masques et du savon liquide au sein même de nos structures.

A ce jour, nous avons distribué autour de 200 000 masques et des milliers de bidons de savon liquide. Nous avons fait des dons un peu partout, dans les zones les plus reculées. Notre cible, les populations vulnérables, celles qui n’ont pas accès à l’information, celles qui n’ont pas accès aux facilités. C’est là que nous sommes allés avec nos hommes. Nous travaillons à faire en sorte que la prise de conscience dans le cadre de la lutte contre le covid-19 soit collective. A ce propos, je félicite la génération Adama Kanazoé pour le travail formidable abattu.

Après les élections, on n’a plus entendu parler de votre parti. Que devient AJIR ?

Le parti travaille. Le rôle d’un parti, c’est d’animer ses structures. C’est d’animer la vie politique. Après, il y a une question de planification. Le parti planifie ses activités. Dans l’entendement des uns et autres, c’est convoquer systématiquement la presse pour des conférences de presse tous les jours. Ce n’est pas tellement ça le dada du parti. Le parti est aux côtés de la population.

Il y a un travail de proximité qui est fait. Les hommes qui composent le parti sont restés très proches du peuple. C’est cela qui est le plus important. Pour nous, il ne s’agit pas d’inviter la presse pour lancer des invectives à gauche et à droite pour susciter des polémiques stériles et inutiles. Nous sommes convaincus qu’aux échéances électorales prochaines, nous ferons la preuve qu’il y a un travail qui a été fait de façon structurelle et studieuse.

L’AJIR va battre campagne pour le candidat du MPP aux élections présidentielles ?

Ce qu’il faut savoir, c’est que la majorité présidentielle à l’intention de présenter un candidat unique. L’AJIR ne va pas se départir de cette dynamique. Je ne serai pas personnellement candidat à l’élection présidentielle de 2020. Aujourd’hui, nous sommes dans une dynamique qui est celle de régler la question de l’alternance de façon progressive. Pour nous, c’est au parlement, notre cible n° 1, qu’il faudra réaliser l’alternance en 2020, avec une majorité de jeunes et de femmes. Nous devons faire en sorte que le parlement change de visage.

Nous devons faire en sorte que la moyenne d’âge au parlement chute de façon drastique. Histoire d’avoir des hommes en prisme avec cette époque. Notre ambition a été toujours la même, faire prendre conscience aux jeunes de leur rôle historique, qu’ils n’ont aucun complexe à nourrir par rapport aux générations précédentes. Ils doivent se faire confiance, s’assumer et accepter d’aller à des responsabilités plus importantes. C’est ça notre leitmotiv. Nous percevons 2025 comme une étape charnière dans la dynamique de l’alternance au Burkina Faso.

Elections législatives on en parle. Seriez-vous candidat pour la députation ?

Oui je serai candidat.

Après Jeunesse au travail, AJIR, nous voilà avec génération Adama Kanazoe… à quoi rime tout cela. On a l’impression que tout tourne autour de votre personne.

C’est parce que ADAMA Kanazoé est au côté de la jeunesse. « Jeunesse au travail », vous avez vu ce qui a été fait. La question pour nous a toujours été celle de l’insertion des jeunes, l’autonomisation de la jeunesse. C’est la première structure qui a lancé une plateforme gratuite d’informations et de sensibilisations des jeunes sur les questions d’emploi.

En partant en politique à avec AJIR, nous avons toujours le même objectif. Vous avez vu notre programme en 2015 : « Développer le Burkina Faso avec sa jeunesse ». Nous avons pleinement confiance en la jeunesse. La jeunesse, c’est le socle de tout développement, pour peu que les jeunes prennent conscience de leur capacité, de leur valeur. Je pense que nous allons pouvoir opérer ensemble la révolution au Burkina Faso. Il faut que la jeunesse burkinabè arrête de rêver du retour d’un Sankara. Il n’y’aura peut-être pas un Sankara, mais c’est tous ensemble que nous devons former et perpétuer l’esprit de Sankara.

Notre génération est dans la situation d’un équipage qui fait naufrage sur une ile déserte où il n’y a aucune ressource vitale. A un moment, les gens se comportent comme des anthropophages. Ils se dévorent. Or pendant ce temps, les vrais bourreaux sont assis tout-la-haut et ricanent. En vérité, nous sommes tous les victimes d’un système qui nous a écartés de la gestion des affaires depuis toujours.

Les vrais bourreaux, ce sont qui et qui ?

Les vrais bourreaux, c’est cette génération qui est aux affaires depuis 1983. Cette génération qui a l’intention de se pérenniser aux affaires. C’est cette génération aussi qui a toujours su et il faut le leur reconnaitre, taire ses égos individuels pour travailler, dans un esprit de solidarité. C’est une chose que notre génération n’arrive pas à faire. C’est cela qui fait que nous restons malheureusement sous le joug de cette vieille classe politique qui devrait faire de la place aujourd’hui.

Mais une veille classe politique que vous servez. Quand vous parlez de la génération 83, il y a les dirigeants du MPP, la majorité des ministres au gouvernement. Est-ce qu’il n’y a pas un paradoxe quelque part ?

C’est là toute l’erreur de la jeunesse burkinabè. Ils ont le sentiment que nous qui sommes à des postes de responsabilité les avons trahis. C’est une grosse erreur. Je vais vous le dire de façon définitive. Il vaut mieux être dans le véhicule pour espérer en modifier l’allure. Nous devrions accepter d’apprendre auprès de nos devanciers pour pouvoir à notre tour rendre aux générations futures. Sinon qu’est-ce qu’on va partager comme expériences ?

Comment voulez-vous que nous donnons ce que nous n’avons pas reçu. Je dois vous dire que Thomas Sankara a construit sa légitimité en servant dans le gouvernement de Saye Zerbo, comme secrétaire d’état à l’information. Ce ne fut pas un ovni. Il a un parcours qui parle pour lui. C’est tout simplement cela que nous voulons rééditer. Notre intention, c’est de prouver que notre génération est capable de changer le Burkina ; qu’elle a les ressorts.

C’est pour ça que pour 2020, notre position est claire. La génération pourrait rester aux affaires. Mais pour nous, il faut faire en sorte que 2025 puisse constituer l’alternance au sommet de l’Etat. En 2020, nous allons travailler au niveau de l’AJIR à faire en sorte qu’il y ait une alternance au niveau du parlement. Nous allons demander aux jeunes burkinabè de prendre d’assaut l’Assemblée nationale. Cette fois-ci, pas pour la brûler mais pour y siéger massivement. C’est pour adopter des lois qui vont dans le sens des aspirations du moment. C’est la mission que nous voulons confier à la jeunesse burkinabè.

Un mot de fin.

Par rapport à la pandémie, c’est déjà un mot de compassion à l’intention des familles qui ont enregistré des décès, des opérateurs économiques qui ont vu de nombreuses opportunités capoter, des élèves et étudiants qui sont tenaillés par le stress. Qu’il me soit permis de féliciter le chef de l’Etat pour son engagement auprès de son peuple dans la lutte contre le covid-19. Les sacrifices énormes consentis ne seront pas vains. J’ose espérer qu’ils lui permettront, avec le soutien de tous, de vaincre la pandémie, en un temps record. Je ne doute pas que les choses reprendront de plus belle.

Pour finir, j’exhorte mes compatriotes, dans un esprit de solidarité, à observer les mesures barrières.

Dimitri OUEDRAOGO
Mariam SAGNON
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