Actualités :: Burkina : « Pendant que les soldats se plaignent de la qualité des armes, des (...)

C’est sur un ton de tristesse, mais également et surtout de révolte, que l’Organisation des peuples africains-Burkina Faso (OPA-BF) a animé ce lundi, 26 août 2019 à Ouagadougou, une conférence pour se prononcer sur la situation nationale, notamment la préoccupation sécuritaire et son corollaire.

« Montée en puissance des attaques terroristes, assassinats ciblés et catastrophe humanitaire à l’horizon. Ces trois tableaux sombres retiendront notre attention, non pas parce que tous les maux de notre pays peuvent se résumer en ces trois tableaux, mais telles sont les questions urgentes qui se présentent à nous. C’est avec consternation que l’OPA a appris que le 19 août 2019, le détachement militaire de Koutougou a été attaqué par un groupe armé terroriste et que l’attaque a causé la mort à 24 militaires, fait sept blessés et occasionné de nombreux dégâts matériels », peint le président de l’OPA-BF, Me Ambroise Farama, demandant à l’assistance, une minute de silence à la mémoire de ces soldats tombés sur le champ de la défense de la patrie.

Après une analyse de la situation nationale, notamment au plan de la sécurité, les responsables du parti sont parvenus à la conclusion selon laquelle, le pouvoir Roch Kaboré a montré à suffisance qu’il n’a ni la volonté, ni la capacité d’assurer la sécurité des personnes et de biens et de défendre l’intégrité du territoire.

Peut-on accusé le président Kaboré d’avoir échoué, quand on observe la situation sécuritaire dans la sous-région ? A cette préoccupation d’un journaliste, Ambroise Farama a affirmé qu’il n’est un secret pour personne que, jusqu’à l’avènement de ce pouvoir, le Burkina était un havre de paix. « La sécurité au Burkina Faso était assurée.

Donc, c’est un constat que, c’est sous le régime de Roch Kaboré que la montée de l’insécurité a connu une croissance fulgurante dans notre pays. Ça, c’est un constat factuel. Mais, au-delà, quelles sont les réponses qui ont été données par le régime pour contrer la montée des attaques terroristes ou l’insécurité dans notre pays ? Ce sont des réponses qui ont été, à notre avis, incohérentes. Nous avons dit, déjà dans notre première déclaration en janvier, que la politique sécuritaire n’était pas perceptible », soutient-il.

Me Ambroise Farama avec à sa droite, le secrétaire général du parti, Ernest Compaoré et à sa gauche, le secrétaire national à la communication, Mahamadi Sawadogo

L’état d’urgence et les opérations spéciales mises à rude épreuve

Le responsable politique note que les changements opérés à la tête des départements de la défense et de la sécurité sont la preuve que dans le choix politique, il y a un louvoiement. « Lorsqu’on a la responsabilité d’assurer la sécurité d’un Etat, la défense de l’intégrité d’un territoire, ce sont des questions qui doivent être bien nourries ; déjà dans le choix des hommes et ensuite dans le choix des politiques qui sont déterminées pour assurer la sécurité des personnes et des biens. Là, nous avons dit que la seule réponse qui a semblé être une réponse politique à la question, c’était de décréter l’état d’urgence. Là encore, on a constaté qu’au moment où on décrétait l’état d’urgence, il n’y avait aucune préparation. Je n’invente rien ; dès qu’ils ont décrété l’état d’urgence, le lendemain, on a connu encore des attaques. C’est la preuve que rien n’avait été préparé. Mais, que voulez-vous, quand vous avez un pays où l’Etat-major général des armées est attaqué…, lorsque la crème de la défense de notre pays ne peut même pas assurer sa propre défense ? Pensez-vous qu’il y a une politique sécuritaire cohérente et sérieuse sur laquelle nous pouvons compter ? », se désole l’avocat, Ambroise Farama.

Les dirigeants de l’OPA-BF interrogent donc sur la politique sécuritaire du pouvoir Roch Kaboré, l’état d’urgence décrété dans certaines zones du pays et les opérations spéciales initiées dans certaines régions, Otapuanu (lancée en mars 2019 pour les régions de l’Est et du Centre-Est) et Doofu (lancée en mai 2019 et qui couvre le Sahel, le Nord et le Centre-Nord). Pour les responsables de ce parti qui se veut panafricain, ces opérations militaires sont simplement des actions d’éclat.

« Les résultats sont là. Aujourd’hui, à l’Est, après l’opération, tous ceux qui viennent de la région vous diront qu’il y a plein de zones où on ne peut pas aller. C’est sous l’opération Doofu que nous avons cette attaque de Koutougou. Mais, comment pouvez-vous imaginer que pendant qu’il y a état d’urgence et une opération spéciale, on vienne tuer, comme cela, froidement, 24 militaires ? Alors que deux jours avant, les populations avaient déjà commencé à relayer dans les réseaux sociaux, qu’il y avait un regroupement de terroristes et qu’il y avait une attaque imminente, certaine et au même moment, nos forces de défense n’ont pas été capables d’éviter cela et de donner une réponse adéquate à cette attaque ? », sonde Me Farama.

L’Assemblée nationale, complice d’une situation … ?

Pour le président du parti, sur toute la ligne, et du point de vue de la politique sécuritaire du pays, ce gouvernement a échoué. « Pendant que les soldats se plaignent de la qualité des armes qui sont mises à leur disposition, pendant qu’ils se plaignent des repas qui leur sont servis, pendant qu’ils se plaignent des retards dans le paiement de leurs primes, nous avons des ministres de la Défense qui s’enrichissent impunément. Certainement, sur le dos de ces militaires. Au-delà de l’incompétence, nous nous demandons même s’il y a une volonté d’éradiquer l’insécurité dans notre pays », sermonne Ambroise Farama.

Pis, l’échec n’est même pas seulement sur la question sécuritaire, toutes les institutions ont pratiquement failli, juge l’OPA-BF.

« Pendant que des ministres sont accusés d’enrichissement illicite, que l’histoire du charbon fin fait l’actualité, l’Assemblée nationale n’est pas capable de mettre en accusation ce ministre, l’obliger à démissionner et à se mettre à la disposition de la justice. Cela veut dire que l’institution, Assemblée nationale, manque de répondre aux attentes et aspirations du peuple. Cette même Assemblée nationale, c’est encore elle qui a voté la loi sur l’instauration de l’état d’urgence, en inscrivant dans cette loi que, lorsqu’une zone est sous l’état d’urgence, toutes les procédures judiciaires qui mettront en cause des citoyens burkinabè relèveront dorénavant de la compétence des tribunaux militaires. Encore une autre incohérence ! Vous avez un pays, dans lequel on a formé des juges spécialisés en matière de lutte contre le terrorisme, on a créé des pools anti-terroristes (devant le TGI de Ouahigouya, le TGI de Ouagadougou) et au même moment, on dit que lorsque quelqu’un est pris pour des faits de terrorisme, cela va relever de la compétence des tribunaux militaires. Alors que les juges militaires n’ont pas été préalablement formés », expose l’avocat, précisant que l’Assemblée nationale a failli.

Il en est de même pour le système judiciaire, ajoute-t-il. « Vous avez vu ce qui s’est passé à Yirgou, après ce massacre, la justice s’est fait attendre pendant longtemps. Il n’y a qu’à peine quelques semaines que les premières arrestations ont commencé… C’est pourquoi, nous disons que toutes les institutions ont échoué et que bien plus qu’un changement de gouvernement, c’est carrément la refonte totale de nos institutions qu’il faille, afin de pouvoir donner un nouvel espoir à notre peuple », projette le président de l’OPA-BF, par ailleurs avocat des familles des victimes dans l’affaire Yirgou.

« Obligation d’organiser le peuple »

Me Ambroise Farama et ses camarades estiment donc qu’il faut une refonte des institutions, en donnant le pouvoir au peuple. « C’est tout un programme politique, un programme révolutionnaire. Ce qui va permettre au peuple de participer directement à la prise de décisions et définir des politiques claires en prenant en compte les aspirations réelles et profondes des masses », proposent les conférenciers. En guise d’interpellation aux dirigeants à rectifier le tir, ils rappellent que le peuple burkinabè a toujours su prendre ses responsabilités. Ils en veulent pour illustration, et « en attendant que le peuple prenne ses responsabilités », le 3 janvier 1966, l’avènement de la Révolution de 1983 et l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014.

C’est dans cet esprit d‘interpellation que le parti invite les dirigeants à organiser d’ « urgence » le peuple, faire en sorte que « tous ces jeunes qui sont des bras valides », qui ont la capacité de pouvoir servir et défendre l’intégrité du territoire soient appelés sous le drapeau. « Sous le drapeau, pour éviter que ne naissent des groupes d’auto-défense partout. C’est-à-dire que cela doit se faire sous le leadership de l’Etat, avec une organisation cohérente avec les Forces de défense et de sécurité », explique Me Farama, précisant qu’il s’agit de mettre en place, dans les villages et secteurs, des comités de veille et d’alerte qui vont travailler en bonne intelligence avec les Forces de défense et de sécurité.

C’est dans cette détermination également que, répondant à une question sur le sommet du G7, le président de l’OPA-BF pense que la communauté internationale peut certes apporter un appui dans la lutte contre l’insécurité, mais qu’il ne faut cependant pas attendre que les solutions viennent de l’extérieur. « Nous devons, nous-mêmes, nous organiser et trouver des réponses adéquates pour assurer la sécurité de notre pays, quitte à ce que l’intervention de la communauté internationale ne soit que pour apporter une aide du point de vue de la logistique », recommande Me Ambroise Farama.

Oumar L. Ouédraogo
Lefaso.net

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