Actualités :: De la violation du secret de l’instruction à la mauvaise foi du Sergent (...)

Naon BabouLe sergent Naon a lâché sa bombe. De ses « révélations », il n’y a pas de quoi fouetter un chat encore moins faire exploser la République. Par contre, la violation du secret de l’instruction pourrait coûter cher à son auteur présumé, Me Prosper Farama.

A l’occasion du 5e anniversaire du drame de Sapouy, la plupart des journaux ont publié un écrit de Reporters sans frontière (RSF) intitulé "Affaire Norbert Zongo : cinq ans après les faits, un nouveau témoignage accable la garde présidentielle". Cet écrit relativement volumineux (2 pages dans plusieurs journaux) contient des révélations que le sergent Naon a faites le 30 octobre dernier au juge d’instruction militaire qui l’interrogeait sur la tentative de coup d’Etat déjoué le 6 octobre 2003.

Si le fond des « révélations » est très discutable - le sergent Naon dit-il la vérité ? Pourquoi son témoignage est-il fait si tardivement ?- la forme par laquelle le grand public a appris son témoignage - Internet, journaux, tombe sous le coup de la loi.

En effet, la divulgation d’un témoignage fait dans le cadre de l’instruction d’un dossier en justice est une violation des dispositions de l’article 11 du code de procédure pénale.

L’article en question stipule que "sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète".

Me Farama, un récidiviste

"Sans préjudice des droits de la défense" signifie que seuls les avocats constitués dans le dossier, la tentative de putsch, ont le droit d’être informés de la procédure en cours. Comment donc des journalistes et notamment RSF a pu se procurer le procès verbal d’un témoignage si important au point d’en faire de larges extraits commentés pour des journaux et sur internet. En dehors d’un vol de documents dans le bureau du juge d’instruction- ce qui n’est pas le cas. Seules les personnes en possession des procès verbaux d’audition des détenus ont pu commettre la grave faute de trahir le secret de l’instruction.

Pourquoi donc c’est Me Farama qui est pour l’instant le seul inculpé ? Joint au téléphone sur la question , M. Abdoulaye Barry, commissaire du gouvernement près du tribunal militaire de Ouagadougou est sans équivoque. De tous les avocats intéressés dans ce dossier, seul Me Farama Prosper était en possession du procès verbal d’audition dont les extraits sont étalés dans la presse. Les greffiers et le juge d’instruction dont Me Farama avait reconnu le professionnalisme et la technicité n’ont absolument pas de contact avec la presse nationale encore moins celle étrangère. Ce qui n’est pas le cas de Me Farama qui selon, le commissaire du gouvernement, avait reçu antérieurement sous le couvert du Batonnier de l’Ordre des Avocats, des avertissements écrits sous forme de lettres confidentielles.

Me Farama est donc un récidiviste notoire. Cette fois-ci franchissant le palier de l’avertissement, le juge d’instruction l’a inculpé pour violation du secret de l’instruction d’un dossier en justice. Une faute professionnelle très grave. Les sanctions prévues à cet effet vont du dessaisissement du dossier dans lequel le fautif est constitué à sa radiation du barreau. Dura lex, sed lex, traduisez la loi reste la loi aussi sévère soit-elle.

Me Prosper Farama

Pour l’instant on n’en est qu’à l’inculpation de l’avocat avec liberté provisoire. Dans le même dossier, plusieurs de nos confrères dont Newton Ahmed Barry et Germain B. Nama ont été aussi entendus puisque l’Evénement fut le premier journal à publier de larges déclarations du sergent Naon dès le début de l’instruction du dossier.

La mauvaise foi du sergent Naon Babou

Le sergent Naon Babou dit-il la vérité dans l’affaire Norbert Zongo ? On peut légitimement en douter pour de multiples raisons.

Primo, ses "révélations" tardivement exprimées sont celles d’un homme résigné. Convaincu d’être un "cabri mort" il ne cherche plus la manifestation de la justice mais plutôt à régler ses comptes. "Si je dois aller en prison, beaucoup me suivront" a-t-il dit. A ce propos, des confrères avaient judicieusement écrit qu’il "faisait chanter la république".

Notre rédaction avait en son temps fait remarquer qu’on le fait "parler à tort et à travers". De fait, les maîtres chanteurs quand ils ont échoué dans leurs œuvres, perdent toute sérénité et menacent de tout déballer dans l’intention de nuire à leurs victimes par vengeance. Or la recherche de la vengeance est aux antipodes même de la justice.

Justement dans la recherche de la vérité et de la justice, on repose la question de savoir pourquoi le sergent Naon a-t-il attendu si longtemps, cinq (05) ans avant de commencer à dire officiellement ce qu’il sait ou croit savoir du drame de Sapouy ? La peur pour sa vie ? c’est possible ! Mais est-elle (sa vie) plus en sécurité en prison que quand il était un homme libre ? Si oui, rien ne l’empêchait au plus chaud de la crise quand le Collectif était très fort, de demander à témoigner devant la Commission d’enquête indépendante (CEI) avant d’aller se constituer prisonnier. Ainsi il aurait pu éviter "les tentatives d’emprisonnement" et de se retrouver aujourd’hui impliqué dans une tentative de coup d’Etat.

Il y a donc de très fortes chances que le sergent Naon Babou mente délibérément et avec la complicité de cet avocat, il comptait utiliser la presse pour continuer de faire du chantage. Il se pourrait en effet qu’il ait de vagues soupçons vite transformés en certitudes sans la moindre preuve. Mais au lieu de s’ouvrir depuis longtemps à la justice pour la manifestation de la vérité, il entendait "régler cette affaire" à sa façon. Par exemple pourquoi ne pas se joindre à des comploteurs pour perpétrer un coup d’Etat ?

Le projet imaginé en 2000-2001 aurait été abandonné parce que la situation sociale s’était peu à peu calmée. Le projet sera ressuscité en 2002-2003, crise ivoirienne et soutien du Togo aidant. Manque de pot pour les putschistes, la conjuration est découverte. Qu’importe, le sergent Naon Babou qui se sait dans de sales draps espère se sortir d’affaire en s’imaginant que ses "révélations" fracassantes nuiront à la stabilité de la République.

Du coup, le coupable présumé d’atteinte à la sûreté de l’Etat veut se faire passer pour une victime d’un système ingrat qu’il a servi loyalement.

Le jeu est subtil mais peut difficilement convaincre de sa bonne foi. C’est pourquoi la justice doit poursuivre dans la recherche de la transparence et de la manifestation de la vérité et dans l’affaire Norbert Zongo et dans la tentative de coup d’Etat. Il serait donc souhaitable que le juge d’instruction Wenceslas Ilboudo entende le sergent Naon Babou sur ce qu’il sait ou croit savoir dans l’affaire Norbert Zongo et pourquoi pas la confrontation avec le colonel Diendéré et M. François Compaoré pour que cesse le chantage par lequel on veut piéger la paix sociale.

Djibril Touré
L’Hebdo

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