Actualités :: Xe réunion régionale africaine de l’OIT "L’Afrique ne veut pas être un camp (...)

Le président du Faso, Blaise Compaoré a donné une conférence de presse, le 3 décembre dernier au cours de son séjour à Addis Abeba en Ethiopie. Face à une trentaine de journalistes venus de pays africains et de représentants de radios internationales, le président du Faso a défendu son projet d’organiser en mai 2004 à Ouagadougou, un sommet extraordinaire de l’Union africaine sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté en Afrique.

Le 3 décembre dernier dans la matinée à Addis Abeba, le président du Faso a d’abord prononcé une déclaration au cours d’une séance spéciale organisée par la Xe réunion régionale africaine de l’Organisation internationale du travail (OIT). Les organisateurs de cette grande rencontre ont invité le président burkinabè à se prononcer sur son idée d’organiser en mai 2004 au Burkina, un sommet extraordinaire de l’Union africaine sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté en Afrique. Après cette assemblée, Blaise Compaoré a ensuite donné une conférence de presse sur le même sujet.

Face à une trentaine de journalistes de pays d’Afrique ou des représentants de radios internationales le président du Faso a été, entre autres, invité à justifier son engagement en faveur de la création d’emplois et dans la lutte contre la pauvreté en Afrique. D’entrée, Blaise Compaoré, convaincu de la justesse de sa lutte, a invité ses pairs africains à mener des politiques qui tiennent compte de la création d’emplois. Pour lui, "des emplois productifs et décents constituent une véritable solution à la lutte contre la pauvreté".

Mais comment organiser l’emploi dans un contexte de privatisation, a demandé un journaliste. L’auteur de cette question ne comprend pas que les mêmes dirigeants qui acceptent les privatisations dans leurs pays prônent au même moment, la création d’emplois. N’est-il pas urgent de sauvegarder d’abord les emplois existants avant de parler de créations de nouveaux emplois ? S’est interrogé un autre journaliste. Parlant d’abord des privatisations, Blaise Compaoré a soutenu ceci "il y a des secteurs où il y a de l’intérêt à privatiser". Ce sont les secteurs d’activités pour lesquels un pays ne disposent pas d’assez de ressources pour leur développement.

Et le président du Faso de citer l’exemple du secteur de la téléphonie au Burkina Faso. Avec la libéralisation de ce secteur a-t-il dit, deux nouveaux opérateurs de téléphonie mobile se sont installées au Burkina, y ont fait des investissements, développé le secteur et créé beaucoup d’emplois. Poursuivant sa démonstration, le président du Faso a cité, tour à tour, le cas des compagnies aériennes Air Sénégal et Air Burkina.

A la faveur des privatisations, a-t-il indiqué, ces deux compagnies sont devenues plus performantes. "Air Sénégal international est même devenue un concurrent d’Air France", Blaise Compaoré n’a pas pour autant perdu de vue le fait que certaines privatisation sont à redouter : "Nous devons rejeter certaines formes de privatisations qui n’arrangent pas les Africains". Pour clore ce volet, il a invité les uns et les autres à ne pas faire du débat sur la privatisation, un "débat doctrinal".

Un sommet de plus ?

Les journalistes, tout en saluant la pertinence et l’opportunité d’organiser en mai 2004 un sommet extraordinaire de l’Union africaine sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté ont tout de même émis des réserves. Ils se demandent si les résultats des travaux ne seront pas rangés dans les tiroirs après le sommet. Face à cette inquiétude de taille, le président du Faso s’est voulu rassurant. Le sommet de Ouagadougou, dit-il, ne va pas réunir les seuls chefs d’Etat.

Dans les préparatifs, il est prévu des rencontres avec les partenaires sociaux, la société civile, les employeurs, les employés... Les chefs d’Etat et de gouvernement devront tenir compte des préoccupations, des suggestions, des recommandations de tous ces partenaires à leur rencontre. Il est même prévu la mise en place d’un comité de suivi. Le tout, c’est de faire en sorte que les politiques visant à promouvoir l’emploi ne soient pas déconnectées de la réalité du terrain.

Ouagadougou sera une étape pour les leaders africains, de prendre un engagement pour assurer la promotion de l’emploi. "Il faut dorénavant que la croissance économique constatée dans différents pays du continent soit accompagnée de la création d’emplois". Et cela pour signifier que "le problème du chômage préoccupe autant, sinon plus les dirigeants que ceux qui en sont victimes".

Mais par où commencer, étant donné que tout est prioritaire en Afrique, a voulu savoir un journaliste ? "Il faut commencer par le travail", répond Blaise Compaoré. Il se justifie par le fait qu’avec le fruit de son travail, on peut se soigner, se nourrir, se vêtir, inscrire ses enfants à l’école... Cette ambition est-elle réalisable dans un contexte fortement marqué par la mondialisation et le règne des tout-puissants ?

De l’avis de Blaise Compaoré, l’Afrique n’est pas condamnée par la mondialisation. Malgré les difficultés, elle peut se forger un chemin. Cependant avertit-il, "un individu pauvre laissé à lui-même trouvera difficilement son chemin" d’où l’intérêt de l’intégration et de la régionalisation : "La régionalisation est une école de la mondialisation".

Le refus du fatalisme

Pour Blaise Compaoré, il faut se battre pour se faire une place dans ce monde : "Le village doit se battre pour vendre à Ouaga et Ouaga aussi doit se battre pour vendre à Lagos, Niamey, Abidjan..." Pour lui, c’est en réussissant au niveau local de telles performances que l’on pourra être apte à compétir dans le village global. Il faut donc relever ce défi, organiser les uns et les autres dans leurs domaines afin d’y tirer le maximum de profits. Et au niveau continental l’Afrique, tout en s’unissant, ne doit pas rester à l’écart du monde : "L’Afrique gagnerait à se retrouver avec des pays non africains vivant les mêmes difficultés et ayant les mêmes positions qu’elle".

Pour preuve, Blaise Compaoré est revenu sur l’alliance formée par des pays africains et le Brésil pour lutter contre les subventions du coton. A propos de la crise ivoirienne, Blaise Compaoré a souligné qu’elle affecte l’économie burkinabè et celle d’autres pays de la sous-région : "Au plan économique indique-t-il, environ 70% des exportations et importations du Burkina Faso passent par la Côte d’Ivoire". Le président a également soutenu qu’il est difficile d’imposer une solution à cette crise du dehors si la classe politique ivoirienne n’y adhère pas : "Il faut que la classe politique ivoirienne prenne ses responsabilités afin de sauver le pays".

Et cela est d’autant plus urgent car dans une situation de crise et donc d’instabilité, il n’y a pas d’investissements, pas de création d’emplois et donc pas de victoire possible dans la lutte contre la pauvreté. Or selon les convictions du chef de l’Etat, "l’Afrique ne veut pas être un camp pour l’humanitaire".

Rabankhi Abou Bâkr ZIDA
Envoyé spécial à Addis Abeba


Le discours du président du Faso en intégralité

"Invité de marque" de la Xe réunion régionale africaine de l’Organisation internationale du travail (OIT) tenue à Addis Abeba en Ethiopie du 02 au 05 décembre 2003, le président du Faso Blaise Compaoré a prononcé un discours. C’était le 03 décembre dernier devant plusieurs centaines de délégués des 53 pays africains membres de l’OIT. Des délégués ont proposé à l’issue de l’intervention du président burkinabè que son discours, une "importante source d’inspiration", soit considéré comme un "document officiel" de la Xe réunion régionale africaine de l’OIT.

Monsieur le Directeur Général de l’Organisation Internationale du Travail,

Mesdames et Messieurs les délégués,

Honorables invités,

Je suis très sensible à l’invitation de Monsieur Juan SOMAVIA qui m’offre l’opportunité de m’adresser dans cette belle et historique ville d’Addis-Abeba, à la 10ème Réunion Régionale Africaine de l’Organisation Internationale du Travail.

Je transmets mes salutations fraternelles à tous les délégués qui, à cette Conférence Régionale, s’appliqueront à rechercher et à proposer les solutions les plus appropriées pour la promotion du monde du travail, de la justice sociale et du progrès de l’humanité. Je vous encourage à faire en sorte que cette 10ème Réunion Régionale, nous offre un cadre de réflexion de haut niveau et un formidable tremplin pour la préparation du prochain Sommet Extraordinaire des Chefs d’Etat sur l’Emploi et la Lutte contre la Pauvreté en Afrique, que mon pays s’honore d’abriter en 2004.

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs,

Nous vivons une époque où l’humanité a réalisé des bonds gigantesques sur le plan scientifique et technologique. Les richesses cumulées de notre monde, ajoutées à ses capacités de production, sont telles qu’elles seraient largement suffisantes pour répondre aux besoins de l’ensemble des femmes et des hommes de la planète.

Comment l’humanité peut-elle se montrer impuissante ou incapable d’apporter les réponses appropriées aux souffrances d’une majeure partie des populations, confrontée à la pauvreté de masse, aux épidémies et pandémies les plus terribles ?

La production alimentaire mondiale représente près de 110 % des besoins de l’humanité, alors que plus de 800 millions de personnes sont sous-alimentées et environ trente millions meurent de faim chaque année !

Plus d’un milliard de personnes ont abordé le 21ème siècle sans profiter des progrès de la médecine, et 92% de la population mondiale n’a droit qu’à 8% des dépenses totales de santé !

Devant l’iniquité d’une telle situation, comment ne pas comprendre le scepticisme que suscite la mondialisation libérale ainsi que la justesse des revendications pour un nouvel ordre économique et social plus équitable et plus humain ?

L’Afrique est sans doute l’une des régions les plus riches en ressources naturelles, mais c’est paradoxalement le continent le plus pauvre et le plus marginalisé. La pandémie du Sida y fait le plus de ravages sans possibilité d’accès aux médicaments.

Même dans les Etats africains qui ont enregistré des taux de croissance positifs au prix de réformes drastiques, les populations ont peu ressenti, dans leur quotidien, les résultats de ces performances macroéconomiques.

De quelque côté que l’on examine la question, il est manifeste que l’Afrique n’a pas profité et ne profite pas des opportunités offertes par la mondialisation.

Dans le même temps, le fonctionnement de l’économie mondiale, et en particulier les règles du commerce international ne permettent pas à nos pays de disposer des ressources nécessaires pour faire face au service de la dette, et encore moins, satisfaire aux besoins fondamentaux de nos populations. Les mécanismes de fixation des prix des matières premières en sont un témoignage.

La dernière illustration en date de l’iniquité du commerce international est sans doute le problème du prix du coton. Ainsi, les règles communément acceptées sont violées par ceux-là mêmes qui se font les champions du marché libre et ouvert qu’ils présentent comme une panacée pour les pays du Sud.

En rappelant ces paradoxes, mon souci est que nous puissions nous convaincre ensemble de la nécessité pour l’Afrique, pour les peuples africains de s’organiser autrement, en comptant d’abord sur nos propres forces, afin d’assurer la renaissance et le progrès de notre continent sur des bases saines et durables.

Le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) peut constituer une réponse historique de l’Afrique à ces préoccupations.

C’est également dans cette perspective que s’inscrit le prochain Sommet extraordinaire sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté en Afrique.

Mesdames et Messieurs,

L’Afrique dispose d’importants atouts constitués de ses femmes, ses hommes, sa jeunesse et l’immense capacité d’adaptation et de résistance de sa population.

Notre conviction est que pour surmonter le sous-développement, l’emploi doit désormais être appréhendé comme un déterminant privilégié de la lutte contre la pauvreté.

C’est à juste titre que les Chefs d’Etat et de gouvernement se sont engagés, à l’occasion de diverses rencontres, à favoriser la réalisation de l’objectif du plein emploi en faisant l’une des priorités de leurs politiques économiques et sociales.

En procurant des revenus aux populations, l’emploi joue un rôle positif sur la croissance, dans la mesure où ces revenus contribuent à la stimulation de la consommation et partant de la production, assurant ainsi la viabilité et l’élargissement du marché intérieur.

C’est pourquoi la lutte contre la pauvreté et l’assurance d’un développement humain durable en Afrique, nécessitent l’élaboration de politiques économiques et sociales visant la création d’emplois et l’accroissement des revenus des femmes et des hommes du continent. C’est par ailleurs une condition essentielle pour la stabilité sociopolitique de nos Etats et pour la cohésion de nos sociétés.

Mesdames et Messieurs,

C’est conscient de la place décisive de l’emploi dans la lutte contre la pauvreté et pour le développement de l’Afrique que nous avons proposé la tenue d’une réunion ministérielle consacrée à la question, puis la tenue d’un sommet extraordinaire sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté en Afrique. Conformément à la décision des Chefs d’Etat, le Gouvernement et le peuple burkinabé se réjouissent de pouvoir abriter en 2004 cet événement d’une importance capitale pour le développement social, le développement durable de l’Afrique.

Par ailleurs il est fort souhaitable que les processus qui découlent de la lutte contre la pauvreté s’appuient sur la consultation et la participation de ceux qui sont directement touchés par la pauvreté, le chômage et le sous-emploi. L’ensemble des acteurs politiques et sociaux devraient en outre être associés à la réflexion et à l’élaboration des politiques y afférentes.

D’où l’idée retenue de l’organisation d’un forum social peu avant le sommet extraordinaire, forum social dont les réflexions et les conclusions vont utilement inspirer les décisions des chefs d’Etat et de gouvernement.

Notre préoccupation la plus pressante est que ce sommet extraordinaire débouche sur un programme et des plans opérationnels de promotion et de création d’emplois productifs, assortis de schémas et mécanismes de financement appropriés.

Je ne doute pas que cette 10ème réunion sera pour vous, Mesdames et Messieurs les délégués, une occasion propice d’approfondir la réflexion sur la problématique de l’emploi et la lutte contre la pauvreté, à la lumière des valeurs d’équité et de justice sociale de l’Organisation Internationale du Travail (OIT).

Dans le combat contre les inégalités, contre la pauvreté, pour une mondialisation plus humaine au service d’un nouvel ordre mondial plus juste et plus stable, l’Organisation Internationale du Travail apparaît comme le phare qui éclaire la voie et qui redonne espoir et courage aux naufragés, aux laissés-pour-compte de l’humanité.

Et comme le souligne si justement son directeur général, je cite : "la pauvreté n’est pas simplement le problème des pauvres. C’est un défi pour tous ceux qui luttent pour la justice sociale et cherchent à promouvoir une croissance durable. Une économie stable et prospère ne peut exister que dans un monde où tous les citoyens sont à même de développer leur potentiel de productivité et de consommation (...) Ce n’est que lorsque les pauvres deviendront des consommateurs à part entière qu’il pourra y avoir une véritable mondialisation de l’économie", fin de citation.

Par ses valeurs, sa vision prospective et sa démarche intégrée, l’Organisation Internationale du Travail demeure aujourd’hui l’une des rares institutions du système des Nations Unies qui confortent encore les "rêves" des pauvres, c’est-à-dire l’immense majorité de l’humanité, pour un monde meilleur.

Nous pensons que le Bureau International du Travail doit être impliqué dans les démarches et politiques initiées par les Institutions du Bretton Woods dans la perspective d’une prise en compte de la dimension sociale du développement.

Nous devons tous ensemble développer partout ce plaidoyer pour l’intérêt de tous.

Plein succès à vos travaux !

Je vous remercie.

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