ActualitésDOSSIERS :: Attaques terroristes : Témoignage sur les dernières heures de deux victimes (...)

Georges Lamon et Jean-Noel REY sont deux des victimes des attaques terroristes du 15 janvier 2016. Ils étaient Suisses. Ils étaient arrivés au Burkina le 10 janvier pour une activité humanitaire dans un village de la province du Nahouri. Témoignage de leur partenaire burkinabè, Mme Salamatou Boro née Apiou, infirmière d’Etat dans une clinique de la capitale et que nous avons rencontrée dans la matinée du lundi 18 janvier, encore sous le choc.

Lefaso.net : Pouvez-vous présenter les victimes ?

Georgie Lamon était le président de l’association Yelen Lumière à Lens en Suisse. Âgé de 82 ans, il était un ancien député à la retraite. Jean Noel REY, était lui aussi député, toujours en fonction.

Quelle étaient vos relations avec les victimes ?

Mes relations avec eux remontent à 2011, année à laquelle M. Georgie LAMON a foulé le sol burkinabè. De plus, la fille de M. Lamon est l’épouse de mon beau-frère.

Comment sont nées les relations entre vous et M. Georges Lamon ?

Le partenariat a débuté quand Georgie Lamon était venu en 2011. Comme il habitait chez nous en famille, il a constaté que j’étais tout le temps occupée et on ne me voyait pas très souvent dans la cour. Après renseignements, il a appris que je suis responsable d’une association et que je suis aussi des cours du soir. Il a cherché à connaître mon association et a commencé à s’intéresser à nos activités quand il a eu la certitude que c’est une association vraiment engagée et crédible.

Comment a débuté votre partenariat ?

En 2011, il m’a appelée pour demander si j’aimerais venir en Suisse pour suivre une formation sur le droit des enfants vu que mon association a pour objectif l’épanouissement de la femme et de l’enfant. Je n’ai pas hésité. Il a ensuite fait le nécessaire pour me faire venir en Suisse. Ensuite, il a fait en sorte que beaucoup d’autres personnes s’intéressent à nos activités et s’engagent à nos côtés. Depuis lors, ils ont décidé d’apporter leur aide à l’association et ainsi de construire un réfectoire pour les élèves cette année.

Quand sont-ils arrivés à Ouagadougou et quel était le but de leur séjour ?

Ils sont arrivés le 10 janvier pour inaugurer le projet qu’ils ont eu à réaliser c’est-à-dire le réfectoire des élèves de l’école A de Tiakané dans le Nahouri.

Comment s’est déroulée la cérémonie d’inauguration ?

Ce n’est que le jour J, c’est-à-dire le jour de l’inauguration (le 15 janvier) qu’ils ont quitté Ouaga à 7h00 pour Pô. Quand ils sont arrivés à Po, nous sommes allés visiter l’infrastructure et la cérémonie s’est très bien déroulée. Eux-mêmes étaient dépassés de voir ce que j’ai réalisé avec l’argent qu’ils nous a offert. Ils étaient très contents et m’ont longuement félicitée pour le travail réalisé. Ils ont même fait des promesses pour d’autres investissements. Sincèrement, ils m’encourageaient, me félicitaient beaucoup, soulignaient que je suis une femme dynamique. Ils ont même promis que quand ils vont revenir la prochaine fois, ce sera pour la cérémonie d’inauguration de la bibliothèque qui a été demandée par l’école, pour essayer de rehausser le niveau des élèves. L’école avait demandé aussi un parrainage des élèves. Moi-même je leur avais parlé de lycée parce que, une fois que les élèves réussissent au CEP, sur 100 élèves, seulement cinq vont au lycée à Pô pour poursuivre leurs études.

Comment et quand avez-vous appris la nouvelle de leur mort ?

Après l’inauguration je leur avais proposé de rester à Pô, mais ils ont refusé vu la présence du député et, M. LAMON a affirmé que le consulat leur demandait de revenir à Ouaga pour des raisons de sécurité. Quand ils sont rentrés à Ouaga, j’ai passé tout mon temps à les appeler mais ils étaient injoignables jusqu’au petit matin. Alors, j’ai pris le car pour rentrer aussi à Ouaga. Arrivés à Koubri, on nous a dit qu’on ne pouvait pas passer. J’ai décidé de rentrer à Ouaga à pieds pour voir ce qui se passe. Et c’est en cours de route que l’on m’a appelée pour m’apprendre la mauvaise nouvelle.

Quand je suis arrivée à Ouaga, j’ai appelé le chauffeur pour comprendre ce qui s’est passé. Il m’a expliqué que quand ils sont arrivés à Ouaga, Georgie LAMON disait être fatigué mais le député lui voulait qu’ils sortent pour aller manger dans un restaurant. Donc, ils ont demandé au chauffeur de venir les chercher à 19H00 pour y aller. Il les a donc amenés au Cappuccino et est reparti pour revenir les chercher à 20h30. Mais à son retour, il n’a pas pu s’approcher du restaurant à cause de ce qui se passait.

Etes-vous toujours en contact avec leurs familles ?

Oui, je suis toujours en contact avec leurs familles en Suisse. Depuis que je suis arrivée à Ouaga, leurs amis ne font que m’appeler et ils m’ont même demandé de leur envoyer des photos, parce qu’eux non plus n’arrivent pas à croire. Il y a beaucoup de gens également qui me consolent. La famille de M. LAMON m’a dit que sa mort ne peut pas mettre fin à notre partenariat. Mais je n’arrive toujours pas à croire qu’ils sont morts ; il faut que j’aille voir leurs corps.

Quel message à l’endroit des familles ?

Franchement les mots me manquent. J’aurais voulu être à leurs côtés pour mourir avec eux parce que je me dis que c’est à cause de moi qu’ils sont venus au Burkina, pour l’inauguration du réfectoire de l’école. Donc ça ne devrait pas se passer de la sorte puisqu’ils sont venus dans le but de faire un acte humanitaire, d’aider les enfants qui étaient tellement contents de leur présence. Ma prière c’est de demander au seigneur de les consoler de ma part.

Je me rappelle encore quand je leur rendais visite en Suisse, M. Lamon me répétait qu’il m’aidera toujours jusqu’à sa mort. Il disait souvent, « Sali, je vais t’aider jusqu’à ma mort parce que tu es une femme battante et je sais que si je t’aide, à travers toi, beaucoup de gens vont réussir. Tu vas aider beaucoup donc, je jure de t’aider jusqu’à ma mort ». Il m’a même montré plusieurs fois son caveau, me disant de ne pas manquer de venir arroser les fleurs qui seront sur sa tombe quand il y sera enterré. Je lui disais qu’il était trop tôt pour parler de sa mort. Je ne pouvais pas imaginer que ce serait chez moi que la mort allait le trouver…

Annick Kaboré (Stagiaire)
Lefaso.net

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