Actualités :: Me Sankara et l’affaire : "Je ne mélange pas les serviettes et les (...)

Depuis l’arrêt de la Cour d’appel le condamnant à payer 57 millions au titre des droits des 33 ex-travailleurs de X9, Me Sankara évitait de s’épandre dans la prese. C’est un homme serein, detendu que nous avons rencontré dans ce qui lui servait de Cabinet.

L’avocat a passé la main à l’homme politique en prenant soin de clore son dernier grand dossier, "le dossier X9" avec les délégués des travailleurs. 33 d’entre eux réclament cependant leurs droits à Me Sankara. Débouté en première instance, ceux-ci font appel. La Cour d’appel leur donne raison et condamne Me Sankara à payer.

Ces derniers jours, un des délégués des 215 travailleurs annonce que l’argent serait plutôt avec les délégués qui sont en pourparlers avec les 33 ex-travailleurs pour un réglement à l’amiable. Y arriveront-ils ? En attendant, Me Sanakra s’exprime pour la première fois dans nos colonnes depuis sa condamnation.

"Le Pays" : Vous avez été condamné par la Cour d’appel à rembourser leurs droits aux 33 travailleurs de X9. Où en est l’exécution du jugement ?

Me Sankara : Je ne sais pas. Cependant, je vais tenter de vous expliquer. Mais avant, il est de mon devoir de féliciter la presse qui restitue les faits sans état d’âme et sans prise de position, car les lecteurs, pour se faire une opinion, ont besoin d’être éclairés.

Effectivement, un arrêt de la cour d’appel a annulé un jugement qui m’avait donné raison. A l’époque, j’avais demandé 1 franc symbolique à titre de dommages et intérêts. A cause du battage médiatique dont j’ai fait l’objet, j’avais estimé que c’était une atteinte à mon honorabilité. Et le juge y avait fait droit en estimant que les 33 travailleurs n’avaient pas à me poursuivre parce que c’était une affaire entre travailleurs. Du reste, de façon professionnelle, c’est comme cela que j’avais compris les choses.

En 1998, j’ai été constitué par trois organisations syndicales, officiellement reconnues et désignées es-qualité par l’inspection du travail pour poursuivre ce dossier. Conformément aux dispositions légales, il n’y a aucun doute sur la qualité de mes mandants. Mais la Cour d’appel a estimé que j’ai commis une faute en reversant le reste de l’argent aux mandataires légaux. Je ne pouvais que me pourvoir en cassation pour que le droit soit dit devant cette Cour.

Mais Me Fayiri Somda rétorque que le pourvoi n’est pas suspensif.

C’est vrai, sauf dans les cas de difficultés d’exécution. Dans mon cas, il y en a plusieurs. La première , c’est que je suis avocat de profession et aucun avocat ne peut exercer sans police d’assurance. J’exerce depuis 1993 et j’ai toujours été couvert par une police d’assurance. Je n’ai pas compris pourquoi, un confrère avocat qui a été magistrat de surcroît a omis ce détail substantiel.
Plus tard, j’ai compris que ce n’est pas l’argent qui l’intéressait, mais plutôt comment me nuire.

Vous dites que c’est votre assureur qui aurait dû être poursuivi ?

Il y a une ambiguïté dans la procédure déclenchée par Me Fahiri Somda (avocat des 33 ex-travailleurs). Les faits ont eu lieu en 1998. Le protocole a été signé en 1998. Entre-temps, les deux parties (215 travailleurs et les 33) ne se sont pas entendues. Nous avons même joué la médiation entre les deux camps en tentant de les concilier. Et c’est au moment même où les deux parties devaient se retrouver que Me Somda s’est rétracté. Il y a des correspondances qui le témoignent. J’ai envoyé une lettre l’informant que les délégués vont passer le voir pour qu’avec les 33, ils puissent s’entendre. Et c’est le même jour qu’il a décidé d’envoyer le dossier en justice. Cela voulait dire qu’il ne voulait plus de règlement amiable entre les deux parties qui avaient accepté de cotiser conformément à la décision de l’Assemblée générale.

Votre confrère dit pourtant que c’est vous qui avez rejeté le règlement à l’amiable.

Pas du tout. Il y a deux lettres qui le prouvent. Vous pouvez même les publier. C’est un mensonge trop gros. Un deuxième élément dangereux : les 33 avaient assigné les délégués des 215, en remboursement de leurs droits. L’affaire a même été enrôlée devant le tribunal . C’est encore Me Fahiri Somda qui a dit d’annuler cette procédure. Il a repris une autre procédure en assignation à restitution de droits, mais cette fois contre Me Sankara. Là, franchement je n’ai pas compris. A l’entête de la plainte il est écrit, "assignation à restitution de droits". Mais au jugement, le juge de la Cour d’appel condamne Me Sankara à payer 57 millions de FCFA.

Il y a une nuance. Quand on dit de restituer, vous restituez ce que vous avez. Moi, je n’ai pas quelque chose. Mais le juge, pour pouvoir me condamner, ne parle pas de restituer mais de payer.
En tant qu’auxiliaire de justice, je prends acte du jugement. Je ne refuse pas que la justice de mon pays, contre la légalité, contre le droit, me condamne. Il y a des cas dans l’histoire. Les Rosenberg, le Pull-over rouge.

Quand une justice est aux ordres le magistrat fait ce qu’on lui dit de faire. J’ai donc opposé à l’huissier qui est venu saisir mes biens un certain nombre d’irrégularités.
Je lui ai signifié que je ne suis pas contre l’arrêt puisque j’ai fait un pourvoi en cassation. Mais en attendant, il y a des problèmes.
Je ne peux pas parler d’immunité parlementaire. Si je l’évoque, on va tout de suite parler de politique. Mais dans le fond, pourquoi, Me Fahiri Somda n’a pas poursuivi mon assureur.

Deuxièmement, le dossier, je l’ai clôturé avec les délégués devant un notaire assermenté. L’acte notarié est également revêtu de la formule exécutoire, tout comme le jugement de la Cour d’appel. Il ne peut donc pas passer outre cette clôture pour me poursuivre. Il aurait fallu que Me Somda cassât l’acte notarié avant de me poursuivre. Il connaît les voies et moyens pour ce faire. Si l’acte est frauduleux, il l’annule. A ce moment, il peut aller au pénal s’il le veut. Parce que j’ai lu dans la presse qu’il a été tellement gentil avec moi qu’il n’est pas allé au pénal.

Il oublie qu’en 1999, une plainte avait été déposée au parquet. On manipule l’opinion pour rien. Si je n’ai rien dit jusque-là, c’était à cause de l’obligation de réserve qui m’incombe. C’est un dossier véritablement clos dans mon cabinet. Je m’en suis remis à la justice de mon pays, surtout au droit et au peuple qui sait analyser et comprend les choses.

Les délégués et les 33 sont actuellement en pourparlers pour régler le différend. Cela vous dédouane-t-il ?<:B>

Je ne perçois pas le problème ainsi. Moi je n’ai jamais été offusqué par les propos tendancieux et malicieux. L’objet du combat que je mène m’éloigne des ragots. Ce qui est en train de se faire aujourd’hui aurait dû se faire, il y a sept ans.
En 1998, c’est exactement ce que les 215 travailleurs proposaient à leurs 33 collègues ; Ce qui est dangereux, c’est la déformation. Quand Me Somda dit que les 33, c’étaient les malades, ceux qui étaient en congés... c’est grave de tenir des propos de ce genre. Aujourd’hui , on comprend qu’il y a eu instrumentalisation. En 1997 quand les travailleurs devaient aller en grève, j’ai participé aux négociations en vue de trouver des solutions. Mon apport en tant que juriste était très appréciable. La preuve, c’est la première fois au Burkina qu’on a assisté à un sit-in d’un an et demi où il n’y a pas eu d’échauffourées. Il n’y a pas eu de casses, rien du tout.

De mon point de vue, s’il y a une entente entre les travailleurs, cela réhabilite le droit syndical, la représentation légale des délégués et surtout la profession d’avocat. L’avocat reçoit mandat de plaider pour autrui. Je l’ai fait en me laissant guider par mon serment. Ce que j’ai enduré c’est mon serment. Je n’avais pas le droit de faillir. J’ai côtoyé ces travailleurs. Quand on parle de mort d’hommes, c’est plutôt parmi ceux qui ont été licenciés.

Aujourd’hui parmi les 215 travailleurs, il y en a qui ont été admis au test de recrutement de la SOTRACO, et on a rayé leur nom. Qu’est-ce que cela veut dire ? Ne sont-ils pas des Burkinabè ? N’ont-ils plus droit au travail parce qu’ils ont lutté pour leurs droits ?

J’ai beaucoup appris, à travers ces conflits sociaux, sans pour autant m’éloigner de la déontologie de la profession. Et je ne mélange pas les serviettes et les torchons. Je ne confonds pas non plus la chose politique avec ma profession. La preuve, quand j’ai été élu en 2002, j’ai écrit au bâtonnier pour dire que j’en tirais les conséquences de droits. Le bâtonnier Harouna Savadogo peut témoigner. Depuis lors, je n’ai plus exercé. J’ai simplement confié mon cabinet à la suppléance.

Dans cette affaire, malheureusement, il y a eu des interférences au plan politique. C’est regrettable. Si l’affaire se dénoue telle que vous l’avez écrit dans votre journal, ce n’est pas moi qui aurais eu raison mais les travailleurs dont l’indemnisation ne couvre pas aujourd’hui le préjudice subi. Des gens sont restés 18 mois sans travailler, puis furent ensuite licenciés. Ils ne peuvent pas avoir d’emploi depuis tout ce temps et finalement se retrouvent avec 12 mois de salaires qui ne couvrent même pas leurs dettes. Jusqu’aujourd’hui, des créanciers des ex-travailleurs m’écrivent pour savoir qui va les payer ?

Dans la logique actuelle, si les 33 sont désintéressés qu’advient-il de la procédure contre vous ?

Cette question, il faut la poser à Me Fahiri Somda. C’est lui qui tape son tam tam. Je lui ai dit qu’en m’attaquant, il saisissait l’ombre pour la proie. Comme il a été magistrat, procureur puis avocat , il saura quoi faire. Moi je n’en sais rien.

Propos recueillis par Abdoulaye TAO
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