Actualités :: Vœux de lapresse au chef de l’Etat : 8 ans après Norbert

Pour la deuxième fois, la cérémonie de présentation des vœux de nouvel an de la presse au chef de l’Etat a eu lieu le 14 janvier 2004 au palais de la Présidence.

8 ans après Norbert Zongo, c’est Edouard Ouédraogo, directeur de publication de l’Observateur, qui a été mandaté par ses confrères pour être leur porte-parole.

Le vendredi 14 janvier, à partir de 18 heures, certainement, la zone du palais présidentiel devait avoir le taux de densité en journalistes le plus élevé de tout le Burkina. Une fois passé au scanner et au détecteur des métaux à la porte d’entrée, c’est une marche le long de l’imposante allée bordée de fleurs et de jets d’eau qui attendait l’homme de médias qui a montré patte blanche. Les lieux sont majestueux et l’on se demande pourquoi bien des chefs d’Etat qui ont eu notre destinée en main avaient refusé d’y loger.

Au rez-de-chaussée, une salle avait été aménagée pour les journalistes, VIP d’une soirée, à qui on avait, pour une des rares fois, déroulé le tapis rouge. A l’intérieur de la salle, c’est la bonne humeur qui régnait ; comme à chaque fois que les maîtres de la parole se rencontrent. Les moqueries et les plaisanteries fusaient de-ci de-là, car, on le sait, quand les journalistes se retrouvent, avec leur sens de la répartie, ils ne se font pas de cadeaux. Ne dit-on pas que charité bien ordonnée commence par soi-même ?

L’impression qui se dégageait également de cette ambiance bon enfant, est que pour la plupart des invités, c’était la première rencontre de l’année 2005. Ainsi donc, c’était des accolades en douceur quand il s’agissait d’une femme, et pratiquement des coups de tête, que les hommes se donnaient. Quelques minutes avant 18 heures, Paul Yougbaré, directeur du protocole d’Etat, plus connu comme étant le chef du protocole du chef de l’Etat, qui est en quelque sorte l’annonceur civil de l’arrivée du Chef de l’Etat, entre dans la salle pour les dernières retouches.

On sait donc que Blaise Compaoré n’est pas loin. Effectivement, à la phrase lourde de symbolisme, « Son Excellence le président du Faso », prononcée par la présentatrice Habata Barry de la presse présidentielle, Blaise Compaoré fait son entrée à 18 heures pile, ponctuel comme une horloge suisse, et s’assied face aux hommes de la presse. A sa droite, le président du Conseil supérieur de l’information, Luc Adolphe Tiao. A sa gauche, le ministre de l’Information, Joseph Kahoun.

Celui-ci sera le premier à prendre la parole pour un mot introductif. Pour lui, cette rencontre est d’une portée exceptionnelle, et il en a remercié le chef de l’Etat, « qui a consacré une partie de son temps que l’on sait très précieux » afin de recevoir les vœux de la presse. A la dernière présentation de vœux, qui a eu lieu - excusez du peu - en 1997, le porte-parole était le regretté Norbert Zongo, à l’époque, directeur de publication de l’Indépendant.

Bien des choses se sont passées depuis. Ceci explique-t-il cela ! Toujours est-il que cette présentation de vœux a eu lieu sept bonnes années après. Cette fois-ci, le porte-parole des journalistes était Edouard Ouédraogo, directeur de publication de l’Observateur, doyen d’âge des journalistes en activité. Au nom des membres de la corporation, il se réjouira de cette rencontre, car, fera-t-il remarquer, « dans la succession des républiques qu’a connues notre pays, c’est seulement la première fois - sauf erreur - que l’occasion est donnée à la presse d’adresser, elle aussi, ses vœux au chef de l’Etat ».

L’occasion est d’autant plus exceptionnelle qu’elle aurait du être, selon lui, la règle, surtout que l’institution qui inspire le plus les hommes de médias demeure la présidence du Faso. Le représentant des médias, qu’il était ce jour-là, précisera (par une tournure de phrase qui amusera plus d’un invité présent dans la salle) à l’adresse du premier des Burkinabé que « Nous sommes condamnés, à défaut d’une entente cordiale impossible à conclure et peut-être même pas souhaitable dans le cas d’espèce, du moins à un modus vivendi rationalisé ». Il est donc normal pour la presse qu’à chaque fin ou début d’année, les hommes de médias puissent dialoguer avec lui face à face.

Les préoccupations du monde de la presse

Après les vœux de santé à l’adresse du chef de l’Etat et de sa famille, place aux doléances de la presse, qui, on sait, sont nombreuses. M. Edouard Ouédraogo a dit au préalable : « Loin de nous l’idée d’égrener un chapelet de doléances, car ce n’en est pas le cadre. Nous voulons simplement mettre à contribution cette grande capacité d’écoute dont vous êtes communément crédité, pour nous aider dans la recherche de solutions idoines (...) Je voudrais tout d’abord me laisser aller au souvenir : au souvenir de ce 6 janvier 1997, date à laquelle pour la première fois, la presse nationale vous adressait ses vœux. Notre porte-parole ce jour-là s’appelait Norbert Zongo, directeur de l’Indépendant, ce confrère dont nous restons tous mémoratifs de la disparition tragique le 13 décembre 1998. Quelque sept ans après, l’affaire est toujours pendante devant les tribunaux. En bons démocrates que nous pensons être, nous, hommes de médias, sommes attachés à la séparation des pouvoirs, signe d’un fonctionnement équilibré de nos institutions (...) Par devoir de mémoire pour notre confrère, nous ne pouvions pas cependant, à cette occasion, ne pas partager avec vous notre attente pesante que justice lui soit rendue, avec le sentiment que tel reste le vœux unanime de tous les Burkinabé de bonne volonté, à commencer par le premier d’entre eux qu’est le président du Faso ». Si on était dans une salle bruyante ce jour- là, on aurait entendu les mouches voler, tant l’évocation de ce drame semble avoir provoqué une lourde émotion dans le public. Après cette doléance, le porte-parole abordera d’autres préoccupations des journalistes, éditeurs de presse et organisations de la société civile. Sont de celles-là la Convention collective, « dont manque cruellement les médias Burkinabé »,la carte professionnelle de journaliste, « dont paradoxalement le Burkina est un des rares Etats à ne pas disposer alors qu’en comparaison, les analystes le créditent d’une presse de qualité honorable », l’allègement du régime fiscal des médias, l’augmentation de la subvention de l’Etat à la presse privée et enfin, sujet d’actualité, la dépénalisation des délits de presse. D’ailleurs, ce sujet a été le thème central des dernières assises de la presse francophone. « L’ensemble de la profession, par ma voix, vous sait d’avance gré des mesures qu’il vous plaira d’initier pour dépénaliser la loi 56-93 ADP du 30 décembre 1993, portant code de l’information, des 16 articles qui permettent encore d’envoyer ès qualité, un journaliste derrière les barreaux ».

Réponse du chef de l’Etat

Le président du Faso répondu aux différentes doléances soulevées par le porte-parole des hommes de médias point par point : de l’affaire Norbert Zongo : « Puisque vous avez évoqué l’affaire Norbert Zongo, j’ai déjà exprimé à plusieurs reprises mon souhait ardent de voir ce dossier élucidé. Je pense que nous devons continuer à faire confiance à la justice pour qu’elle conduise dans la sérénité et jusqu’au bout son instruction ». De la dépénalisation : « Je puis, d’ores et déjà, vous assurer de ma disponibilité à soutenir le débat sur la réforme juridique autorisant la dépénalisation des délits de presse et d’opinion ». Mais, ajoutera-t-il, la dépénalisation ne devrait pas être perçue par les concitoyens comme une prime à l’impunité. De la convention collective : « Il semble que la concrétisation de ce projet ressorte en premier lieu de votre responsabilité. Je vous encourage vivement, en concertation avec le CSI et le ministère de l’Information, à élaborer un texte consensuel, qui engagera la profession ». De la pérennisation de la cérémonie de présentation de vœux : « le fait de pouvoir périodiquement nous rencontrer, loin d’aliéner votre liberté, consolide le dialogue social comme une option fondamentale et l’un des éléments de gouvernance dont le Burkina tire sa stabilité politique et institutionnelle. Je prends acte de votre souhait de voir ce genre de rencontres se renouveler ». Après la réponse aux doléances, le chef de l’Etat a présenté ses vœux au monde de la presse : « ... Aussi voudrais-je saisir l’occasion de l’année nouvelle pour souhaiter, à vous-même et à vos familles respectives, mes vœux de santé et de bonheur ». La cérémonie a été bouclée par une réception avec force victuailles à l’arrière du Palais. Entre deux verres, dont les effets étaient tempérés par une friandise, un gâteau ou une cuisse de poulet, Baise Compaoré et ses convives ont eu le temps d’apprécier les mélodies d’un orchestre.

Issa K. Barry


Vœux de la presse au président : le faux-départ de 97

"C’est vous l’Indépendant ?... Est-ce que nous nous connaissons ?", demanda Blaise
"Moi je dois vous connaître puisque vous êtes le chef de l’Etat"... En ce lundi 6 janvier 1997, l’atmosphère est plutôt détendue, même enjouée à la présidence du Faso.

En témoigne cet échange dont nous sommes mémoratifs entre le chef de l’Etat burkinabè et le président de la SEP, la Société des éditeurs de la presse privée, qui conduisait la délégation des communicateurs à la cérémonie de présentation de vœux au locataire des lieux. C’était la première fois, de mémoire de Voltaïque et de Burkinabè, que dans la foultitude des cérémonies de fin et début d’année, une brèche était ouverte aux journalistes pour sacrifier à cette tradition.

Et comme l’habitude commence forcément par la première fois, on se disait bien que c’était le point de départ d’un rituel annuel entre deux parties qui ne s’entendent pas toujours sur tout, loin s’en faut, mais qui sont "condamnés, à défaut d’une entente cordiale impossible à conclure et peut-être même pas souhaitable dans le cas d’espèce, du moins à un modus vivendi rationalisé", dixit Edouard Ouédraogo de l’Observateur, mandaté cette année par ses confrères pour être leur porte-parole. Las ! la parenthèse est à peine ouverte qu’elle est vite fermée. En 1998, année électorale, la présentation des vœux de la presse au premier magistrat n’est pas rééditée. Puis vint la bêtise monumentale du 13 décembre 1998 quand l’interlocuteur du 6 janvier 1997 fut retrouvé boucané en rade de Sapouy.

C’était le début d’une crise sociopolitique sans précédent dont nous continuons à solder les comptes. On le sait, dès la commission du forfait, le pouvoir a été présumé coupable par une marge de l’opinion nationale, et son procès, régulièrement instruit par les médias. Dès lors, plus de vœux, plus d’entretiens radiostélévisés, plus même de médiascopie, cette émission phare de la TNB, disparue subitement du petit écran après le 13-Décembre, plus de "C’est pas sérieux", de "Sondage démocratique", plus rien. On était au degré zéro des relations entre les "kiba kitba" (1) et les gouvernants.

Puis la crise passa tant bien que mal. Et on exhuma "Médiascopie", rebaptisée à l’occasion "Presse Dimanche", avant que cette dernière version disparaisse, elle aussi, du fait des faucons du camp présidentiel. Et il y eût à nouveau un entretien radiotélé le 5 août 2004. Et il y eut à nouveau des vœux le vendredi 14 janvier 2004, 7 ans après Norbert, dont le fantôme hantait la petite salle où les directeurs d’organe et les journalistes du rang, le ban et l’arrière-ban de la presse nationale, les représentants des médias internationaux ainsi que les faiseurs d’images de maisons de com. ont communié le temps d’une soirée. Ambiance chaleureuse où on avait du plaisir à revoir un confrère qu’on avait perdu de vue depuis belle lurette.

Est-ce, comme on l’entend, parce qu’on est en année électorale, que le président a souscrit à la requête formulée le 9 décembre 2004 par le président du CSI lors de la remise de son rapport annuel ? Qu’importe finalement, il faut espérer qu’après le faux-départ de 1997, ces vœux de la presse, crise ou pas crise, soient désormais inscrits dans les traditions républicaines de notre pays et témoignent ainsi de la civilisation comme de nos mœurs politiques et médiatiques. Surtout que ce n’est pas parce qu’on a trinqué avec Blaise qu’on changera sa ligne éditoriale.

Et cela, vous le verrez dès cette semaine : ceux qui le descendent en flammes systématiquement persévèreront dans leur voie, et ceux qui le défendent tout aussi aveuglément donneront la réplique aux premiers. Ainsi va la "République des médias" au Faso qu’une présentation de vœux, quelle qu’elle soit, ne viendrait bouleverser fondamentalement.

Notes (1) Littéralement les "donneurs de nouvelles", entendez les journalistes

Observateur Paalga

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