Actualités :: Mahamadi Kouanda : "Je suis une fabrication de Blaise"

Mahamadi Kouanda. L’homme n’est plus à présenter sous nos cieux. Militant de la première heure de la Révolution, ce tribun et mobilisateur-né a siégé à l’Assemblée nationale sous la 2e législature. A quoi consacre-t-il son temps maintenant qu’il n’est plus député ? Quel est l’état de ses relations avec le bourgmestre de Ouagadougou ?

N’était-il pas de ceux qui ont incendié l’Observateur dans la nuit du 10 juin 1984 comme on le susurre parfois ? Autant de questions et bien d’autres auxquelles Mahamadi Kouanda ne s’est nullement dérobé en ce début d’année 2005.

Vous n’êtes plus député. Que fait Kouanda et de quoi vit-il ?

• Kouanda a la chance d’être né et d’avoir grandi à Ouagadougou. La modestie à observer ne m’empêche pas non plus de me reconnaître d’une famille noble. Je travaille depuis 1973, je fais d’autres affaires à côté, et cela fait presque 2 ans que j’ai un bureau de médiation et de négoce international. Je fais en plus de l’import-export avec l’aide de ma famille.

Vous préparez-vous à revenir à l’Assemblée nationale ?

• Me préparer à revenir à l’Assemblée, c’est trop dire. Le jour où je partais à Pô pour la première fois, je pensais que le Conseil de salut du peuple (CSPII) était composé de gens honnêtes et que c’était elle l’aile progressiste burkinabè. Je n’avais pas en tête une quelconque fonction de député. J’y étais allé en tant que responsable de jeunes, qui avait été nouvellement élu à Bobo-Dioulasso.

Mieux, j’étais responsable des syndicats de mon service au niveau des travaux publics (TP) et responsable politique de mon quartier. A priori, je n’étais pas un homme politique, mais j’étais convaincu que j’étais un meneur d’hommes et que je pouvais amener ceux qui m’écoutent à me suivre. Je pense donc que revenir à l’Assemblée dépend de Dieu et des hommes.

Vous êtes un homme politique assez connu. Dites-nous comment vous êtes venu en politique.

Merci de me reconnaître comme étant un homme politique assez connu. La première fois que j’ai été élu comme responsable des jeunes de mon quartier, Tiendpalgo, plus précisément responsable au sport, c’était en 1969. Le projet ZACA a bouffé mon quartier, mais je suis toujours un notable et un homme incontournable de ce quartier.

Je suis venu en politique à travers Blaise Compaoré. Si on estime que Blaise a des fabrications locales, je crois que quelque part, je lui dois cela, je suis une fabrication du président Compaoré. J’étais un meneur d’hommes avant de connaître le chef de l’Etat, mais la politique réelle, je l’ai commencée avec Blaise Compaoré.

Concernant l’avènement de la révolution, qu’est-ce que vous n’avez presque jamais dit à la presse ?

• Le ventre n’est pas seulement fait pour manger, et un homme qui ne sait pas tenir sa bouche, son ventre et son sexe n’est pas un homme. Je crois avoir aidé beaucoup de gens, sous la révolution, qui, à avoir du boulot, qui, à se lancer dans les affaires et certains sont mieux que moi aujourd’hui. Je crois que j’aurais pu mieux faire que ça et c’est ce qui me dérange. Sous la révolution, j’avais encore les moyens de travailler et d’améliorer mes connaissances théoriques de la chose du Blanc, mais...

Ce qui m’a marqué : je crois que tous ceux qui sont nés dans les années 50 et 60 et qui ont un logement aujourd’hui le doivent à la révolution parce qu’il n’était pas évident qu’ils aient une parcelle, et la majorité l’a obtenue de façon honnête. Mais toute révolution fait des erreurs.

Celui qui croit que notre révolution n’a pas fait d’erreur n’est pas un camarade honnête. Il y en a eu, mais les erreurs sciemment faites sont minimes par rapport aux actions positivement mûries et bien faites. La révolution a permis un bond qualitatif de notre pays.

Simon Compaoré et vous étiez à couteaux tirés. Qu’en est-il actuellement ?

• A ma connaissance, entre Simon Compaoré et Mahamadi Kouanda, ce n’est pas une bagarre d’hommes, mais d’idées. Si Simon me croise, nous nous disons bonjour. Mais jusqu’à demain, ce que je soutiens, c’est que je serais toujours sur ma position. Si demain je suis député, ce que j’ai fait par le passé, je le referai.

Si Kouanda revenait à la direction du parti, ce serait la même chose. Je ne cesserai de faire des critiques objectives. Je dirai toujours ce que je pense, car j’estime qu’en politique, il faut être soi-même.

On ne peut pas être soumis à tout le monde. Par mon histoire et ce que j’ai apporté à mon pays, même si je n’ai pas eu la chance d’être un grand diplômé, on doit me respecter dans ma situation. Je suis membre fondateur depuis bientôt 20 ans de bon nombre de structures.

On ne doit pas me demander de me comporter comme un militant venu hier seulement. Ce n’est pas possible ! Je préfère rester simple militant que d’être un militant responsabilisé, mais qui n’a pas droit à la parole.

Il semble que votre départ de notre ambassade en Arabie Saoudite soit consécutif à votre mésentente avec l’ambassadeur Oumar Diawara. Qu’en est-il ?

• Je pense qu’il y a eu plus de mensonges que de vérités dans cette affaire. Diawara et moi, quand nous nous voyons, nous nous embrassons. Ma personne et mes relations dérangeaient tout simplement un certain nombre de personnes. En vérité, c’est moi qui ai écrit au chef de l’Etat via le ministre des Affaires étrangères, pour demander à rentrer au pays. J’ai toujours les copies de ma lettre et la réponse. Je suis un homme politique, je préfère rester auprès des masses.

Ne craignez-vous pas de rester en marge des affaires du CDP, où vous n’avez plus de responsabilités ?

• Je ne suis pas seul à vivre cette situation. J’ai été président entre deux congrès pour gérer des crises. Le plus important est que Blaise Compaoré se porte bien et que nous puissions nous mobiliser comme un seul homme aux élections de 2005. L’avenir se prépare avec le temps.

Il y a des militants de base ou des militants inconnus, qui sont à des postes des plus envieux. Je ne suis pas venu dans le parti pour un poste d’Etat, mais pour faire vivre le parti et chaque fois qu’il y a un poste électif, je fais valoir ma popularité.

Il semble que vous faisiez partie du groupe qui a incendié l’Observateur en 1984.

• Je suis content que cette question ne soit plus un tabou aujourd’hui. La révolution d’Août a surpris beaucoup de gens et il y en a qui n’aimaient pas que des gens non instruits, comme Kouanda, parviennent à s’imposer dans les structures du Conseil national de la révolution (CNR), des Comités de défense de la révolution (CDR) et qu’en Conseil des ministres Thomas Sankara cite Kouanda Mahamadi en exemple. L’inter-CDR a bousculé le PAI, qui était quand même un vieux parti de gauche.

C’est de tous ceux-là que viennent ces accusations, qui sont des plus farfelues. Si des gens ont des éléments tangibles sur ma participation à l’incendie de l’Observateur, qu’ils les sortent ! Je n’ai rien à me reprocher. Des gens veulent seulement mettre à mal les relations de Kouanda avec l’Observateur, et là, ce n’est pas du tout sérieux !

Certains voient votre main dans la crise qui secoue le Comité national de soutien aux Etalons, de Noufou Ouédraogo...

• Ça aussi, c’est dommage. C’est comme l’affaire de la Mauritanie. Quel intérêt le Burkina a dans ce pays ? Est-ce leur thé, leurs dattes ou leur poisson ? J’ai toujours voulu un bureau d’unité, avec Noufou à l’intérieur.

Pour preuve, en 1998, j’ai proposé un bureau de Comité de soutien aux Etalons à Honoré Traoré (NDLR : ancien président de la FBF), qui l’a présenté au chef de l’Etat. Je me suis proposé comme président d’une commission de mobilisation, que j’estimais à ma portée. J’avais également proposé Noufou comme président de la Commission animation.

J’ai été retenu comme vice-président de la Commission mobilisation-organisation-animation et information, et Noufou comme secrétaire à l’organisation.

Celui-ci a estimé que son poste était petit et s’est désisté. Voilà la réalité. Je n’ai pas demandé qu’on me mette vice-président. J’étais à l’Assemblée nationale à l’époque et je pouvais exiger plus. J’estime que ce n’est pas le poste qui fait l’homme, mais l’homme qui fait le poste.

Si aujourd’hui Noufou a des problèmes avec ses hommes de confiance, il ne faut pas s’en prendre à moi. Pourquoi, il y a deux mois de cela, deux des membres de mon Comité sont partis et on n’a pas accusé Noufou d’y être pour quelque chose ? Je souhaite qu’il y ait de l’ordre dans sa maison. Moi, je suis entouré de personnes âgées, de personnes dignes, qui aiment leur pays et qui me font confiance. Je ne suis ni le plus diplômé de la coordination, ni le plus âgé, ni le plus riche, mais la coordination se porte bien.

Quelle analyse faites-vous du débat politique actuel ?

• Le débat politique a baissé de qualité. Les gens estiment par exemple que le mandat législatif 97-2002 était plus animé que celui en cours. Il faut reconnaître que le débat à l’Assemblée nationale n’est pas aussi facile que les gens le croient, parce qu’il y a des procédures qu’il faut respecter.

Si les ténors de l’opposition ne sont pas habitués aux méthodes parlementaiures, ils seront toujours pris de court. On peut être un beau parleur en ville et être muet à l’Assemblée parce qu’on ne parle pas quand on veut et comme on veut. Cela dit, je félicite les députés pour leur attitude au sujet des vignettes et des plaques. On m’avait traité de tête brûlée en 2001 pour ce même dossier parce que je m’y étais opposé à l’époque.

C’est un des dossiers que la révolution avait réglés en supprimant les impôts. Remettre cela en cause, c’est remettre les impôts. Il y a un problème de fond qui se pose : l’Assemblée nationale n’a aucun contrôle sur la gestion des mairies.

J’avais suggéré qu’une loi soit votée pour le contrôle de la gestion des grandes mairies comme Ouagadougou et Bobo-Dioulasso ; on m’a traité de tous les noms à l’époque. On m’avait traité de tête brûlée et voilà que la loi sur les vignettes et les plaques a été rejetée.

Même si cela devait changer un jour, j’allais voter pour les vignettes parce que celui qui paye une voiture a les moyens, mais pas d’impôt sur les motos ; il faut l’ignorer définitivement. Le peuple a déjà beaucoup de charges. Il faut penser aux électeurs. Ce n’est pas une attitude populiste, mais une attitude réaliste. Il faut faciliter la vie aux gens.

Que faut-il à votre avis, pour que le football burkinabè aille de l’avant ? Pensez- vous que notre sport-roi est malade de ses structures ou de ses hommes ?

• Des deux à la fois. Notre football est malade de ses hommes et de ses méthodes. Prenons le cas du bureau de Diakité. Il n’est pas objectif d’apprécier Diakité à mi-mandat. C’était le mandat du bureau démissionnaire de Honoré Traoré. Il a pu qualifier l’équipe mais les résultats à la CAN n’ont pas été bons. Maintenant qu’il a été élu, on peut l’apprécier avec ce mandat. Il sera responsable de ce qu’il y aura comme résultats dans quatre ans.

Entretien réalisé par Boureima Diallo
Transcription Adama Ouédraogo
L’Observateur

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