Actualités :: Le Burkina élu à l’AGOA : Un bon signe, mais...(1re partie)

Par une déclaration en date du 10 décembre 2004, le président des Etats- Unis, Georges W. Bush, a fait entrer le Burkina Faso dans le cercle restreint des pays bénéficiaires de l’AGOA. Cette décision est une preuve supplémentaire du vent nouveau qui souffle sur les relations américano-burkinabè depuis quelque deux ans.

C’est un renouveau dont il faut se féliciter, car au-delà de ses dirigeants, le peuple bénéficiera davantage de cette politique et de l’AGOA. Cependant, les avantages ne seront pleinement profitables à la nation que si certaines conditions sont remplies. Avant de revenir sur le cas spécifique du Burkina, nous allons, dans cette première partie, à la découverte de l’AGOA.

18 mai 2000, le président Bill Clinton promulgue une loi portant sur le commerce et le développement et traitant des échanges commerciaux entre les Etats-Unis et l’Afrique.

Elle crée le cadre qui permet à des pays africains du Sud du Sahara d’exporter vers le pays de l’Oncle Sam des produits respectant des normes élaborées par le Système de préférences généralisées (SPG), sans paiement de droits de douane et sans contingentement : c’est l’African growth opportunity act (AGOA). Valable jusqu’en 2008, elle a subi des amendements sous l’administration Bush dans le sens de l’agrandissement de sa portée. Il s’agit de l’AGOA II, qui ajoute, à la liste, des produits tels les chaussures, les sacs à main, les montres, les articles tricotés...

L’élection d’un pays est l’aboutissement d’un processus interministériel que pilote le bureau des Etats-Unis pour le commerce extérieur. Les conclusions sont transmises au président pour appréciation et décision à prendre. L’étude de l’éligibilité se base sur la vérification de l’application ou de l’existence de projets d’application, dans ce pays, des principes ci-après :

La pratique de l’économie de marché ;
le respect de la loi et du pluralisme politique ;
l’élimination des barrières au commerce et à l’investissement américains ;

la protection de la propriété intellectuelle ;
les efforts de lutte contre la corruption ;
une politique de lutte contre la pauvreté ;
la mise en place de mesures pour augmenter l’accès aux soins de santé et à l’éducation ;
la protection des droits humains et des travailleurs ;
l’élimination du travail des mineurs.

Aujourd’hui, beaucoup de pays dont le Burkina sont déclarés éligibles à l’AGOA : l’Afrique du Sud, l’Angola, le Bénin, le Botswana, le Cameroun, le Cap-Vert, le Congo (Brazzaville), Djibouti, l’Erythrée, l’Ethiopie, le Gabon, la Gambie, le Ghana, la Guinée Bissau, la Guinée Equatoriale,

le Kenya, le Lesotho, Madagascar, le Malawi, le Mali, la Mauritanie, le Mozambique, la Namibie, le Niger, le Nigeria, l’Ouganda, le Congo (Kinshasa), la Centrafrique, le Rwanda, Sao Tomé et Principe, le Sénégal, les Seychelles, la Sierra Leone, le Swaziland, la Tanzanie, le Tchad et la Zambie.

Le contenu de l’AGOA

Des produits peuvent pénétrer sur le territoire américain sans franchise de douane ni contingentement à la condition qu’ils respectent les règles d’origine et qu’ils soient importés directement d’un pays d’Afrique subsaharienne bénéficiaire de l’AGOA.

Au sujet de la condition d’importation directe, elle signifie que le produit exporté vers les Etats-Unis doit y être expédié directement sans être entré dans le commerce d’un pays "de transit". Les justificatifs sont les facteurs et documents relatifs à l’expédition. Quant aux règles d’origine, elles se décomposent en deux parties :

les vêtements concernés par l’AGOA peuvent l’être avec des tissus faits avec des fils américains ; avec des tissus faits avec des fils d’un pays d’Afrique subsaharienne ; avec des tissus faits avec des fils provenant de n’importe quel pays sous réserve de restrictions de quantités, et par les pays les moins développés.

Pour les autres produits, l’article exportés doit avoir été cultivé, produit et/ou manufacturé dans un pays d’Afrique subsaharienne bénéficiaire de l’AGOA. Par ailleurs, le total des coûts des matières produites et de la transformation faite dans un de ces pays doit être au moins égal à 35% de la valeur évaluée du produit à son entrée aux Etats-Unis, 15% de ces 35% pouvant avoir contribué à l’achat de matériaux américains utilisés pour la fabrication de l’article.

Mais comment reconnaître un produit couvert par l’AGOA ? La connaissance du numéro de classification attribué à un produit par le système harmonisé de désignation et de codification de marchandises, des Etats- Unis permet de savoir s’il est fait des produits admissibles. Cette classification est faite par le service fédéral des douanes des Etats-Unis, qui estime également la valeur d’une marchandise à sa valeur de transaction.

Elle comprend les frais d’emballage, assumés par l’acheteur, la commission du vendeur, versée par l’acheteur, la valeur de toute assistance fournie gratuitement au producteur par l’acheteur, la redevance payée par l’acheteur comme condition de la vente, la somme obtenue par le vendeur à la vente, de l’écoulement à l’utilisation ultérieure de la marchandise importée.

Système de contrôle aux Etats-Unis et portée économique

Pour minimiser voire éradiquer les envois illégaux ou l’utilisation de documents contrefaits, un visa pour les produits textiles et les effets d’habillement est apposé sur la facture originale d’un produit exporté vers les Etats-Unis.

Les bénéficiaires de l’AGOA doivent accepter des visites dans les usines et chez les intervenants dans le processus d’exportation afin de vérifier l’état des registres devant contenir les données sur la production, les matières utilisées, les machines utilisées et le nombre d’ouvriers, et ces registres doivent être tenus pendant cinq ans. Les pays qui se rendent coupables de réexpédition illicite perdront les avantages de l’AGOA pendant cinq ans.

En ouvrant aux pays d’Afrique au Sud du Sahara un marché du textile de plus de 250 millions de consommateurs, l’AGOA pourrait, selon le secrétariat d’Etat au Commerce, permettre aux exportations des produits textiles d’origines africaines de passer de 250 millions à 3 milliards entre les années 2000 et 2008. Une politique judicieuse, appliquée par les bénéficiaires de l’AGOA aux secteurs du textile et des autres produits couverts par l’AGOA, conduirait à un énorme apport à leur économie, ne serait-ce qu’en terme d’emplois créés pour augmenter la production et améliorer la qualité des produits exportés.

En 2001 par exemple, la valeur des importations des produits dans le cadre de l’AGOA était de l’ordre de 1,6 milliard de dollars dont près de 90% constitué par des importations de pétrole (Gabon, Nigeria, Angola...).

Bien que représentant d’énormes opportunités pour les pays africains, l’AGOA suscite quelques critiques. Effectivement, il est vrai que beaucoup de pays d’Afrique subsaharienne, pour des raisons de non-compétitivité de leurs produits en termes de qualité et de coût de production, voient leurs possibilités de profiter des avantages de l’AGOA considérablement réduites, tandis qu’en même temps, de nombreux produits ne figurent pas sur la liste de ceux couverts par l’AGOA, et des secteurs tels que celui des petites et moyennes entreprises (PME) en plein essor sur le continent africain est écarté du traitement préférentiel.

De plus, les conditions d’éligibilité des pays à l’AGOA sont liées à des principes politiques établis par les Etats-Unis seuls, ce que nombre d’observateurs et de politiques perçoivent comme un moyen de pression sur la détermination par les pays africains de leurs systèmes politiques et sociaux.

Cela dit, malgré des faits suggérant qu’elle serait orientée ailleurs que vers l’aide aux pays africains, ainsi que l’insinue l’Union africaine, est une énorme opportunité à saisir par les pays africains.

Toutefois, il est clair qu’ils ne le pourront qu’en travaillant ferme pour améliorer la qualité de leurs produits et aménager un contexte économique et industriel susceptible de persuader les investisseurs étrangers de s’intéresser aux avantages de l’AGOA. Ce qui, à coup sûr, représentera un tremplin pour le secteur industriel africain, notamment dans le domaine du textile. A suivre...

Zoodnoma Kafando

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