Actualités :: Lettre aux chefs d’Etat africains : Arrachez vos peuples des griffes de (...)

La Fondation Afrique Unie n’est pas contente de l’attitude des chefs d’Etat africains, membres de l’Union africaine. Ils sont, dit-elle, en grande partie responsables du sort actuel de l’Afrique. Dans cette lettre ouverte, elle fait le diagnostic de la situation et laisse entrevoir une lueur d’espoir...

"Excellences Messieurs les Présidents, quatre décennies après les indépendances africaines, le développement tant vanté et chanté au fil des ans est encore à la croisée des chemins. Situation fort déplorable dans un monde en perpétuelle évolution. Pourtant, à sa création, l’Organisation de l’Unité Africaine avait pour objectifs entre autres, le développement multisectoriel des Peuples et des Etats africains. Par votre faute, l’organisation continentale est morte de sa belle et humiliante mort.

La cause : lors des sommets de l’organisation continentale, souvent, moins de dix Chefs d’Etat étaient présents. Mais lorsqu’il s’agissait des sommets du Commonwealth, des sommets de la Francophonie ou des sommets de ces autres associations étrangères qui ne font qu’épier et piller l’Afrique, non seulement les salles étaient combles, mais certains d’entre vous se bousculaient aux portes plusieurs jours à l’avance.

En ces occasions, des intellectuels africains ne s’étaient jamais lassés de vous interpeller. Mais soudain, un sursaut d’intérêt pour l’Afrique est né en chacun de vous. Réunis à Syrte en la Grande Jamahiriya, vous avez créé et mis en place les institutions de l’Union Africaine. Vous avez nommé à la tête de la Commission de l’Union Africaine Monsieur Alpha Omar Konaré, un ancien chef d’Etat africain volontariste et panafricain convaincu.

Déjà, ses initiatives inspirent la confiance des compétences africaines. Ses initiatives sont aussi les vôtres. Le Sommet de Ouagadougou sur l’emploi et la lutte contre la pauvreté est une des preuves que les dirigeants africains ont enfin décidé de s’attaquer aux problèmes cruciaux qui minent les populations africaines en général et la jeunesse au nombre desquels de nombreux diplômés sans emploi en particulier.

Les déclarations du Président de la Commission de l’Union Africaine en charge des différents programmes de l’organisation continentale ont été percutantes. Elles incitent à l’action. C’est pourquoi, le moment venu, nous souhaitons que son mandat soit renouvelé, tant que sa détermination et ses actions génèreront de constants progrès. Dans tous les cas, les changements intempestifs des dirigeants des organisations aussi importantes que l’Union Africaine sont contre- productifs.

"Malgré les sommes fabuleuses..."

Excellences Messieurs les Présidents, nous sommes satisfaits de constater que vous avez enfin décidé de travailler concrètement pour l’Afrique. Dès lors, nous demandons à chacun d’entre vous d’extraire son pays du Commonwealth, de la Francophonie ou de la Communauté des Pays de Langue Portugaise, de véritables outils du néocolonialisme occidental, nuisibles au progrès et au développement en Afrique. La plupart de ces associations étrangères proposent à la jeunesse africaine les mêmes programmes que ceux proposés par les organismes du système des Nations Unies.

Une diversion et une exploitation savamment mises en scène. Pour nous, malgré les sommes fabuleuses que ces associations étrangères déversent dans leurs actions en Afrique, volonté d’hégémonie oblige, seuls les programmes proposés par les systèmes des Nations Unies et ceux proposés par l’Union Africaine comptent. Pour illustrer la volonté d’hégémonie que certaines puissances étrangères nourrissent à l’endroit des peuples et des Etats africains, nous portons à votre attention l’extrait d’une déclaration de Monsieur Michel Roussin, alors ministre français de la Coopération.

En effet, devant la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée Nationale Française, après avoir accusé les Etats Unis « d’exercer de fortes pressions pour développer leurs compagnies dans les pays africains producteurs de pétrole », il définissait en ces termes la Nouvelle Politique Africaine de la France : Intérêt national : « Notre aide ne doit pas obéir à la seule générosité mais doit aussi correspondre à notre intérêt national au sens le plus éminent du terme.

Commercialement, l’Afrique est pour nous une zone stratégique et la zone franc, malgré ses problèmes, reste pour nous une aire de stabilité et un marché privilégié. Politiquement, le monde africain nous apporte un appui dans nombre d’enceintes internationales. Par la Francophonie, notre rayonnement et notre influence dépassent très largement nos intérêts strictement mercantiles. Aucune puissance ne peut aujourd’hui remplacer la France en Afrique ».

"L’Afrique travaille pour la France"

Partenariat : « Notre stratégie doit être de coopération, fondée sur un authentique partenariat. Elle doit aussi être de démocratisation où la préoccupation de stabilité à moyen terme l’emporte sur toute considération. Pas plus que la croissance, la démocratie ne se décrète pas et l’action humanitaire ne doit pas être un substitut commode à une vraie politique de coopération ». Offensive : « Notre stratégie doit être offensive, c’est-à-dire débarrassée d’attitudes certes respectables, mais inutilement compliquées voire complexées, qui accréditent l’idée fausse d’un virtuel désengagement de la France ».

Priorités : « Production agricole, secteur sanitaire, formation et encouragement de l’initiative privée. Le cadre sous-régional sera privilégié ». Sécurité : « Il n’y a pas d’expression libre dans l’anarchie et il n’y a pas de développement durable sans paix civile. Contribuer à la sécurité des Etats, renforcer le niveau de protection et de garantie des libertés par une force publique organisée : tels sont les objectifs donnés à nos assistants techniques militaires ».

Voilà des propos clairs et sans ambiguïté, qui prouvent que l’Afrique existe et travaille depuis des décennies pour la prospérité et le rayonnement de la France. Un des pays occidentaux le plus riche du monde, prédateur des droits de l’homme et de la démocratie. Depuis des décennies, il confisque les pensions des anciens combattants africains morts pour sauver la France de la colonisation de l’Allemagne nazie. C’est inadmissible.

Ces déclarations de l’ancien ministre Français de la Coopération méritent une mention spéciale. Elles serviraient valablement de sujets de dissertation dans certaines grandes écoles africaines.

Excellences Messieurs les Présidents, la meilleure façon de lutter efficacement contre la pauvreté en Afrique, c’est de cesser de mener tambour battant la lutte des autres. Nous sommes convaincus qu’aucun d’entre vous n’est fondamentalement opposé à notre lutte. Une lutte dont le but légitime est d’extraire les peuples africains des griffes de l’impérialisme occidental impitoyable et impénitent. Les associations étrangères telles que la Francophonie, le Commonwealth, etc. et toutes leurs organisations adjacentes sont à combattre. Pacifiquement, nous les combattrons.

"Messieurs les présidents,
qu’avez-vous fait ?"

Excellences Messieurs les Présidents, après avoir balkanisé l’Afrique en zones d’influences géographiques pendant l’occupation et la colonisation,
l’impérialisme international tente aujourd’hui de la balkaniser en zones linguistiques pratiquement acquises. C’est pourquoi, par ignorance ou une habitude irréfléchie, certains intellectuels africains se battent pour être soit anglophones, soit francophones, soit lusophones. C’est une aberration. Une aberration parce que quelles que soient les vertus d’une langue étrangère, quand bien même certains Africains la maîtrisent à tout point de vue, elle reste, tout au plus, une langue de communication internationale.

Et comme le ridicule ne tue pas, certaines personnalités africaines ne se gênent pas de déclarer que la langue française est une langue africaine. Notre langue !!! C’est à peine croyable. Que ces Messieurs-là comprennent enfin que l’Afrique dispose des langues qui ne demandent qu’ à être promues et développées. Des langues comme le Haoussa, le Fulfulde, le Lingala, le Swahili, l’Arabe, le Bambara, entre autres, très belles et très riches en vocabulaires, ne demandent qu’à être vulgarisées.

Dans cette perspective, toutes les informations ou messages radio ou télévisés doivent être faits en langues nationales. Les informations écrites peuvent demeurer en langues étrangères dites officielles. Messieurs les présidents, depuis des décennies, qu’avez-vous fait pour la promotion et le développement de certaines d’entre-elles ? Depuis des décennies, les populations africaines sont soumises à une assimilation accrue par l’Occident.

La multiplication des stations Radio FM étrangères notamment RFI en Afrique participe à cette visée de domination tous azimuts des Peuples et des Etats africains.

"La volonté de
nuire ne date pas d’aujourd’hui"

Excellences Messieurs les Présidents, par ailleurs, depuis un certain temps et de plus en plus, il est couramment question d’une Afrique anglophone, d’une Afrique francophone, d’une Afrique lusophone. Ces termes sont inappropriés. Inappropriés et aliénants parce que, pour nous, il n’ y a pas en Afrique une Afrique anglaise, une Afrique française, une Afrique portugaise.

C’est ce que ça veut dire. C’est inadmissible. Des intellectuels africains manqueraient-ils à ce point de vocabulaires adéquats pour désigner les différentes parties géographiques et les peuples du continent africain ? Nous n’en sommes pas étonnés pour autant car avant la dévaluation des assignats appelés Franc Comptoir Français d’Afrique (FCFA) il y a juste une dizaine d’années, l’enseignement lui, a été dévalué à compter des années 1960.

Période à partir de laquelle la délivrance des diplômes de complaisance était monnaie courante. La volonté de nuire à l’Afrique ne date pas d’aujourd’hui. Et cela, avec la complicité plus ou moins inconsciente de certains dirigeants africains. Favoritisme et clientélisme aidant. Malgré tous ces constats décevants, l’Afrique continue d’exécuter des programmes et des projets venus d’outre mer. Avec l’avènement de l’Union Africaine, les pays africains unis et solidaires doivent être administrés autrement.

"Prouvons leur que nous sommes dignes et responsables"

Excellences Messieurs les Présidents, un autre problème, un comble. Vous vous adressez à vos populations à 90% analphabètes en langues étrangères dites officielles. Croyez vous qu’elles vous comprennent ? Nous, nous sommes convaincus du contraire. C’est justement l’une des raisons pour laquelle, d’année en année, l’Afrique sombre dans la pauvreté, la guerre et la misère.

Ainsi, sans éducation et sans formation adéquates des populations africaines en général, toutes les richesses du monde ne pourront jamais développer efficacement l’Afrique. Pour s’en sortir, nous estimons qu’il faut faire confiance aux compétences africaines et se démarquer de plus en plus de certaines coopérations avec l’occident. Le mot partenaire privilégié qui abonde dans les discours de certains officiels occidentaux nous amuse toujours. Tant ce sont des fourberies en puissance.

Aujourd’hui, l’Afrique a autant de défis à relever que de grands chantiers de reconstruction à réaliser. C’est dire que vous serez constamment sollicités dans l’intérêt des peuples et des Etats africains. L’occasion d’abandonner pour toujours la lutte des autres. Ensemble, prouvons à l’ensemble des autres communautés mondiales, notre capacité. Prouvons leur que nous sommes dignes et responsables, que l’Afrique solidaire peut autofinancer tous ses projets de développement multisectoriel.

La Fondation Afrique Unie, pour sa part, propose la création et le financement, en collaboration avec chacun de vos Etats respectifs, des jeux de l’Union Africaine en remplacement des fameux jeux du Commonwealth, de la Francophonie, etc. qui détournent les valeurs et la jeunesse africaines. L’Afrique doit se prendre en charge.

Pour ce faire, vous devez cesser de prêter le flanc aux puissances extérieures qui continuent de faire de certains d’entre vous de véritables dindons de la politique de la diversion, de la division et de l’exploitation des peuples africains. La meilleure façon pour l’Afrique de se prendre en charge, c’est la possibilité que vous aurez à collaborer sincèrement avec certaines associations de la société civile africaine, décidées à s’impliquer et à contribuer au développement de l’Afrique, pour une Afrique véritablement unie, libre et responsable."

La Fondation Afrique Unie

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