Actualités :: Putsch manqué en Mauritanie : Le Burkina aurait encore tapé rater

Il parait qu’on a tapé encore rater du côté de la Mauritanie et revenir s’asseoir. C’est tout comme car l’encadrement, l’appui matériel et financier pour déstabiliser un pays équivaut à une participation à l’opération soi-même. Or, ce sont, entre autres, les éléments d’accusation des autorités mauritaniennes contre le Burkina Faso.

L’information est tombée à la surprise générale et a tapé sur les nerfs de la plupart des Burkinabè car « ça commence à peser lourd maintenant » comme l’a si bien dit notre Ministre de la sécurité à l’occasion de la conférence de presse convoquée à cet effet le 27 août dernier. Incroyable ! On dirait un des faits divers du Président Compaoré.

Devant une telle accusation aussi grave, le gouvernement burkinabè se devait de fournir des explications rapides au peuple. C’est ce qu’il a fait à travers le Ministre de la sécurité. Cette réaction prompte du gouvernement est une très bonne chose et est à saluer. Il faut du respect au peuple comme l’avait si bien perçu le Capitaine Thomas Sankara dans son discours d’investiture au poste de Premier ministre en 1983 : « …Nous ne devons pas tenir le peuple en respect, mais réserver tout le respect au peuple… ».

Le gouvernement a donc donné des explications qui ont suivi une certaine logique, ce qui peut permettre à l’homme de la rue de s’étonner de l’accusation subite de la Mauritanie. Mais n’oublions pas qu’on est en politique. Or en politique, on ne livre pas tout de suite l’information à la consommation de la presse. On garde la discrétion jusqu’à ce que ça pourrisse. Mais là n’est pas le problème. Le problème réside dans l’accusation de notre pays.

Accuser un Etat officiellement de déstabilisation est un fait hautement grave. On comprend difficilement que la Mauritanie se permette de jouer à un jeu aussi dangereux en mettant en cause deux pays amis : le Burkina Faso et la Libye. Et plus on dément plus les Autorités gouvernementales de Nouakchott vont plus loin dans leur accusation contre le Burkina Faso.

Alors pourquoi le Burkina Faso alors que les fugitifs mauritaniens ont traversé le Niger et le Mali. Notre gouvernement dit se poser la même question que les journalistes. Le peuple se la pose aussi. Et puisque personne n’a la réponse pour le moment, il reste à dire qu’un travail de fond attend le Président Blaise Compaoré.

On sait que même avec tremblement de terre, le président du Faso sera candidat à l’élection présidentielle de 2005. Il demandera alors au peuple burkinabè de lui faire confiance en lui donnant la possibilité de continuer la gestion des affaires publiques pendant cinq ans encore. Et pour lui faire confiance, il faut que lui-même inspire confiance non seulement vis-à-vis des Burkinabè mais aussi de l’extérieur.

De l’intérieur

Si nous devons avoir le courage de dire les choses sans tromper notre cœur, beaucoup de Burkinabè diront qu’ils n’aiment pas la façon dont Blaise Compaoré gère le pays. En d’autres termes, le Président n’inspire pas confiance. On ne peut pas se fier à lui pour tout dire. Lorsque dans les années 1990, on soupçonnait le Burkina Faso de combattre du côté de Charles Taylor au Liberia, un pays qui ne fait pas frontière avec le Burkina Faso comme, c’était un démenti catégorique. Il a fallu du temps pour avoir un début de vérité sur notre implication au Liberia. Puis ce fut les cas de la Sierra Leone, de la Guinée Conakry, de l’Angola. Ces pays sont aussi loin du Burkina Faso comme la Mauritanie. Mais ils nous ont accusés des mêmes faits.

Le cas récent de la Côte d’Ivoire a vraiment fait école. Il a fallu que la guerre s’éclate dans ce pays pour que la plus grande majorité des Burkinabè se rendent compte que beaucoup de ces rebelles ivoiriens résidaient dans notre pays. De même, les Burkinabè ont su que Monsieur Bala Keita était sur notre sol quand il a été assassiné à Ouagadougou.

Si la Mauritanie n’avait pas lancé avec énervement la violente accusation contre notre pays, on n’aurait pas su que quelque chose se passait entre ces deux pays. Cette façon de diriger tout un Etat confirme que le président Compaoré prend le Burkina Faso pour sa société privée qu’il doit gérer comme il l’entend. A supposer que la Mauritanie, pour se venger, nous déclarait directement la guerre.

Le patriotisme voudrait qu’on se jette au front sans autres considérations quitte à demander des explications à nos dirigeants par la suite. Dans un tel cas on pourrait enregistrer des victimes qu’on aurait épargné si le peuple était au courant de quelque chose et conjuguer des efforts pour une solution paisible. Le Président Compaoré doit redonner donc confiance au peuple, difficilement certes, mais une telle entreprise s’impose à lui.

De l’extérieur

Le plus grave c’est la confiance au Burkina Faso vis-à-vis de l’extérieur. Nos compatriotes hors du pays sont beaucoup exposés à cause de notre politique extérieur jugée aventuriste. La preuve, on n’aurait pas perdu autant de compatriotes en Côte d’Ivoire si le Président Gbagbo et ses hommes n’avaient pas soupçonné Blaise Compaoré d’être le bras armé des rebelles.

La rumeur dit même qu’il s’était agi d’un coup d’Etat manqué et transformé en rébellion. Et ce serait nous (on est obliqué de dire nous même si on ne maîtrise rien) qui aurions servi de renfort à Abidjan pour le coup qui a malheureusement échoué. D’où la vengeance barbare et inhumaine sur nos compatriotes. Malgré notre démenti cinglant, l’extérieur continue de ne pas croire en la "bonne foi du Burkina Faso".

Avec de telles idées arrêtées comme on le dit, il est difficile de défendre le pays par patriotisme. La preuve, le Ministre mauritanien de la Défense est formel. Il a affirmé sur les antennes de RFI que le Burkina Faso a entrepris la déstabilisation de leur pays en même qu’il le faisait contre la Côte d’Ivoire. Il est donc aujourd’hui difficile de convaincre un Mauritanien que le Burkina Faso n’est pour rien sur la crise en Côte d’Ivoire.

La même vision est partagée dans beaucoup de pays africains de sorte que hors du pays on n’est pas pressé de dire qu’on vient du Burkina Faso. On ne sait jamais. La belle époque où on s’arrangeait pour qu’on sache qu’on vient du pays de Thomas Sankara est transformée en cache-cache.

Le Président Compaoré doit donc travailler aussi à persuader l’extérieur sur son innocence face à ces multiples accusations qui n’honorent pas les Burkinabè que nous sommes. Il y va de la sécurité des Burkinabè qui sont à l’étranger. De même, le gouvernement doit apprendre à partir de maintenant qu’il n’a pas le droit de conserver par dévers lui des informations qui touchent à l’avenir du pays. On ne demande pas de livrer des secrets militaires.

On n’en a pas besoins. Nos militaires sont là pour les gérer en notre nom. Mais des informations telles que les multiples rencontres entre les autorités mauritaniennes et burkinabè étaient à partager avec le peuple.

Le peuple l’aurait su qu’il aurait peut-être une autre lecture de la situation. C’est pourquoi je suis parfaitement d’accord avec la proposition du Ministre Djibril Bassolet : « Chaque fois qu’un émissaire quelconque viendra pour dire qu’il y a un oiseau de son pays qui a survolé le Burkina Faso, ou qu’il y a un criquet qui y a plané, nous vous en tiendrons informés. » Oui Monsieur le Ministre. Non seulement il faut en tenir informé mais il faut surtout préciser la couleur de l’oiseau et la taille du criquet.

Jonas Hien

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