Actualités :: "Le juge militaire m’a surpris positivement"

Premier avocat à se constituer près du tribunal militaire pour défendre l’un des présumés putschistes, en l’occurrence Norbert Tiendrébéogo du Front des forces sociales (FFS), Me Prosper Farama est l’un des jeunes loups aux dents bien longues du barreau burkinabè.

Dans l’entretien qu’il nous a accordé vendredi dernier à son cabinet, il nous dit ce qu’il sait et pense, au stade actuel du dossier. Première impression : le juge d’instruction militaire, le commandant Francis Somda est "très technique et professionnel" au dire de Me Farama.

Comment en êtes-vous arrivé à vous constituer pour Norbert Tiendrébéogo ?

• J’ai été contacté par deux personnes. Par Me Sankara d’abord, pour le compte de M. Norbert Tiendrébéogo. Il m’a demandé si je pouvais me constituer à la demande du FFS, de l’UNIR/MS et de la famille de Norbert Tiendrébéogo. J’ai donné mon accord de principe sous réserve de pouvoir discuter avec M. Tiendrébéogo.
J’avais aussi été contacté par la nièce du capitaine Bayoulou que j’ai d’ailleurs rencontré. J’ai même déposé une lettre de constitution, mais du fait qu’on n’est pas sûr qu’il n’y ait pas de conflit d’intérêt entre ces deux, j’ai dû envoyer une lette de déport en attendant qu’on voit avec d’autres confrères s’il y a nécessité que je me constitue aussi pour le capitaine Bayoulou.

Au fait, pour le profane, comment se fait la constitution d’un avocat ?

• De la manière la plus simple possible. On a besoin d’un avocat, on l’approche soit directement soit par une tierce personne. Mais en général, ce que nous exigeons dans ce genre d’affaires délicates, c’est une lettre écrite, ce qui a été d’ailleurs fait par l’UNIR/MS et le FFS, qui demande expressément la constitution.
Si on est d’accord, on note sa constitution auprès du juge chargé du dossier, en l’occurrence le juge d’instruction par une lettre de constitution.

Connaissiez-vous votre client avant cette affaire ?

• Je l’ai connu en tant qu’homme politique tout simplement. Je ne sais même pas si j’ai déjà eu l’occasion de lui adresser la parole. Sinon je l’ai déjà vu au cours des manifestations du Collectif, dans le directoire, mais à part cela, je ne peux pas dire que je le connaissais.

Avez-vous déjà eu accès au dossier et si oui, quelles sont les impressions qui s’en dégagent ?

• J’ai eu accès au dossier, mais il est très volumineux, ce qui fait que je n’ai pas eu le temps de le parcourir en entier. Mais étant donné que mon client est passé jeudi dernier en interrogatoire de fond, j’ai dû rapidement compulser certains interrogatoires. Les seules impressions générales que je peux donner à l’étape actuelle sont relatives à mon client.
Il nie toute implication dans cette affaire, et en ce qui le concerne, au stade actuel, moi je le crois, je n’ai pas de raisons de ne pas le croire.

Avez-vous échangé avec le juge et qu’en est-il ressorti ?

• J’ai échangé avec le juge à l’occasion de l’interrogatoire au fond. Mais je ne pourrai pas vous dire ce qu’il en est ressorti. J’ai aussi échangé avec lui sur les conditions de détention, notamment en ce qui concerne mon client et sur certains droits de la défense. J’ai été positivement surpris parce que, comme tout le monde, j’avais des préjugés sur la justice militaire. Mais je peux vous dire qu’au stade actuel de la procédure, je suis plus à l’aise que devant la justice civile quand j’ai des dossiers d’instruction.
Je dois avouer que le juge d’instruction a été très technique et professionnel pour l’instant et je lui tire mon chapeau.

Avez-vous déjà vu votre client, si oui quel est son état d’esprit ?

• Quand j’ai eu ma première rencontre avec lui, c’était en présence, trop raprochée j’allais dire, d’un agent de la gendarmerie. C’était d’ailleurs là une des incompréhensions avec les officiers de police judiciaire concernant les droits de la défense.
En effet, pour eux, l’entretien entre un avocat et son client devait se faire en présence d’un OPJ, de sorte que ce dernier puisse entendre la conversation. Ce n’est pas le cas, mais quand nous avons approché le juge d’instruction, c’est très rapidement rentré dans l’ordre. Donc à cette première rencontre, je l’ai trouvé très abattu, surtout parce qu’il n’arrivait pas à entrer en contact avec sa famille. Il me disait en effet que depuis son arrestation, il n’avait pu entrer en contact ni avec ses enfants ni avec son épouse.
A part cela, sur le plan des reproches qui lui sont faits, il restait serein et confiant.

Croyez-vous à la réalité de cette tentative de déstabilisation ?

• Ce que je peux dire, c’est qu’en ce qui concerne mon client, accusé d’être impliqué dans un complot, notamment dans une tentative d’atteinte à la sûreté de l’Etat, à ce stade, rien, absolument rien ne me permet de dire que ces éléments soient fondés concernant mon client. Pour les autres inculpés, leurs avocats pourront donner leur appréciation sur la position de leur client.

Parlant justement des autres avocats, avez-vous connaissance de la constitution d’autres confrères ?

• La seule constitution dont j’ai connaissance au jour d’aujourd’hui, c’est celle de Me Somé Banitouho, avec qui d’ailleurs j’ai échangé. Il a été approché par deux accusés. Je sais que certains confrères avec qui j’ai eu des contacts sont sur le point de se constituer.
Ce que la défense entrevoit au jour d’aujourd’hui, c’est de former un collectif d’avocats, au regard du nombre d’accusés. Il serait intéressant pour une défense plus harmonieuse et plus forte.

Dans ce genre d’affaire, vu le nombre d’accusés, quels sont les cas de figure pour l’organisation de la défense ?

• Il faut prendre par hypothèse. Mais ce qui est sûr, quel que soit le cas de figure, chaque accusé a droit à un avocat. Là où le problème peut se poser, c’est par rapport à l’harmonisation des stratégies de défense. Là, il faut d’abord envisager le cas de figure où il y aurait une convergence d’intérêts de la part de tous les accusés. Dans ce cas, un collectif solide et homogène peut être créé. Mais dans l’hypothèse où il y aurait des conflits d’intérêt (je prends l’hypothèse où concernant les implications éventuelles, les uns et les autres ne soient pas au même degré ou que la situation des uns soit aux antipodes des autres), là il est évident qu’on ne peut pas créer un collectif homogène. Il n’empêche que les avocats peuvent constituer un cadre informel d’échange pour consolider la défense, mais toujours dans l’intérêt suprême des accusés. Mais pour cela, il faudrait que les avocats soient officiellement constitués et que nous puissions voir, chacun en fonction de son client, ce qui est faisable.

Après l’affaire David Ouédraogo, vous commencez à être un habitué du tribunal militaire. En tant qu’avocat, y a-t-il une différence d’approche selon qu’on est au palais de justice ou au tribunal militaire ?

• A priori non, d’autant que les textes qui régissent le tribunal militaire renvoient pour la plupart des éléments de forme et même parfois de fond, au code pénal et au code de procédure pénale. Mais il faut dire que le cadre du tribunal militaire reste tout de même un cadre tout à fait particulier.

H. Marie Ouédraogo
L’Observateur

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