Actualités :: Pr. SALAKA SANOU, DG des Enseignements et de la recherche scientifique : (...)

En marge de notre reportage sur les condition des étudiants à l’université (Voir "Le Pays" n°4066 du vendredi 29 février 2008, nous avons rencontré le Pr. Salaka Sanou. Il se prononce, entre autres, sur l’évolition des effectifs de l’université et apprécie les étudiants d’aujourd’hui.

Le Pays : Comment appréciez-vous l’évolution des effectifs à l’Université de Ouagadougou ces dernères années ?

Salaka Sanou : L’évolution des effectifs au niveau de l’enseignement supérieur, de façon générale, est tout à fait normale. Cela pour plusieurs raisons : d’abord, il y a la pression démographique, la population augmente surtout dans sa frange jeune ; ensuite, il y a une 2e raison qui est aussi structurelle, c’est-à-dire, le fait que l’enseignement de base a été boosté. Ceci a eu des effets induits au niveau de l’enseignement sécondaire, avec comme effet la construction de lycées et de CEG dans toutes les contrées du pays ; comme 3e raison, il y a la nature même du bac. Moi je faisais partie de ceux qui étaient convaincus que notre bac était parmi les plus durs ; non pas du point de vue du contenu des épreuves, mais au niveau de son organisation qui comprenait une admissibilité et une admission. Il était quand même paradoxal, pour un diplôme qu’on veut spécifique, qu’un élève qui avait près de 11,81 de moyenne aux épreuves spécifiques de sa série, échoue avec les épreuves complémentaires.

C’est vrai que cette évolution pose un certain nombre de problèmes, notamment de gestion, de programmation des cours, ainsi que des problèmes d’ordre social. Sur le plan purement pédagogique, c’est vrai aussi que les infrasructures n’ont pas suivi les effectifs de sorte, qu’aujourd’hui, il y a d’énormes difficultés à ce que les UFR offrent aux étudiants les infrastructures nécessaires. C’est un gros problème qui va jouer, bien sûr, sur la qualité de la formation. Des étudiants qui ne sont pas dans de bonnes conditions pour écouter le professeur, pour prendre les notes, ou même pour échanger éventuellement avec l’enseignant, il va de soi que leur formation soit fonction de toutes ces défaillances. Dans le département de Lettres modernes où j’évolue depuis maintenant 20 ans, les effectifs d’un groupe de TD aujourd’hui équivalent à ceux d’une classe entière d’il y a quelques années. Les exemples de difficultés peuvent être multipliés à la pelle. Tout cela, conjugué avec le fait que les étudiants d’aujourd’hui ne sont pas motivés, n’est pas fait pour favoriser leur apprentissage.

Cette démotivation n’est-elle pas liée justement aux conditions d’études ?

Non, je ne suis pas de ceux qui disent que parce que les conditions sont mauvaises, cela démotive les étudiants. En réalité, il ne sont pas motivés pour l’Etat. Or, les conditions sont fournies par l’Etat. Ils devraient être motivés pour eux-mêmes ; parce qu’ils sont là pour apprendre pour leur propre intérêt. Qu’un docteur sorte de l’université de Ouagadougou pour aller vendre ses services à la NASA, c’est à lui le bénéfice ; c’est pas à l’Etat burkinabè. L’Etat ne sera que fier d’avoir aider à former un tel génie. Donc, le manque de motivation, pour moi, ne peut être nullement justifié par la qualité des conditions d’études. Le dire serait un paravent derrière lesquel les uns veulent se cacher. Du reste, un étudiant qui souffre devrait, à mon sens, être davantage motivé ; parce qu’il doit se dire : "Je ne dois pas souffrir pour rien." C’est dire que la motivation doit être recherchée ailleurs que dans les conditions de travail.

Comment un enseignant peut-il objectivement évaluer une classe de 1000 étudiants avec un devoir de dissertation, si chaque étudiant doit écrire, par exemple, 4 pages, soit 4 000 pages à lire ?

Effectivement, le nombre fait que l’enseignant est obligé d’adapter sa pédagogie, son évaluation en conséquence. En ce qui me concerne, cela fait plus de 15 ans que je ne fais plus faire de dissertation à mes étudiants à partir de la licence. Je pose des questions qui ressemblent à des questions de cours, mais qui, en même temps, appellent de la part de l’étudiant de la réflexion. Celui qui se contente tout simplement d’apprendre le cours par coeur, il va lui manquer quelque chose, parce qu’en plus de ce qu’il croit savoir par coeur, je lui demande toujours une contribution personnelle. Donc, je ne peux pas me permettre de donner une dissertation à 200 étudiants, à plus forte raison à 1 000. Maintenant, c’est à moi, en tant que professeur, d’avoir l’intelligence, en toute âme et conscience, en fonction de ma conscience professionnelle, de donner des sujets, qui, en même temps qu’ils facilitent la tâche au professeur, ne sont pas des sujets dans lesquels n’importe qui peut patoger et s’en sortir. Pour cela, il faut nécessairement une nouvelle pédagogie pour nous-mêmes enseignants. C’est dire qu’il faut trouver d’autres méthodes pédagogiques qui tiennent compte de la capacité de l’enseignant à pouvoir assurer l’évaluation, mais aussi de la nécessité d’évaluer véritablement les connaissances des étudiants.

Comment expliquer que dans certaines UFR, dans une classe de 1600 étudiants, on se retrouve avec seulement 400 admis en fin d’année ? N’est-ce pas là une conséquence du surnombre ?

Comme je ne connais pas leurs systèmes d’évaluation, je ne voudrais pas m’aventurer, mais pour moi, l’enseignant a sa part de responsabilité. Il se peut qu’un enseignant ait des défaillances dans la correction. Ce n’est pas parce que je suis enseignant que je vais me le cacher. Mais, le dire aussi, ce n’est pas jeter la pierre sur des collègues. Il peut y avoir des insuffisances dans l’évaluation, dans la manière de corriger chez un enseignant. On est des êtres humains et on peut être défaillant à tout moment.

Pensez-vous que cette réforme du bac était vraiment opportune, étant donné la faible capacité d’accueil de l’univesrité pour accueillir beaucoup de bacheliers ?

En tant qu’enseignant, je suis de ceux qui pensent que le bac est un diplôme. Il suffit de remplir les conditions pour l’obtenir. Ce n’est pas un concours où on prend les meilleurs et où le nombre d’admis est connu à l’avance. Ceci pour dire qu’on ne peut pas et on ne devrait pas adapter la nature du bac à l’offre de formation de l’enseignement supérieur. On ne peut pas dire, parce qu’à l’université, on n’a pas beaucoup de places, donc on va faire un bac dur. Non, ce serait injuste. Le bac est un droit pour tous ceux qui remplissent un certain nombre de conditions. Il faut que cela reste ainsi. Les résultats du bac ne devraient pas être fixés à l’avance sous forme de contingentement en rapport avec l’offre au supérieur. C’est quelque chose que beaucoup ne veulent pas entendre, mais c’est ça la réalité. Ce ne sont pas tous les bacheliers qui doivent, ou qui veulent, faire l’université.

Propos recueillis par Ladji BAMA

Le Pays

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