Actualités :: Palguim Sambaré, DG de la police nationale : "Un P.A. pour chaque policier, (...)

De jeunes filles mutilées à Ouaga, trois policiers tombés à Koupéla sous les balles des bandits au cours du seul mois de février 2004 ; sans oublier les coupeurs de routes qui opèrent, même en plein jour, dans le Burkina profond... en fallait-il plus pour prouver la montée vertigineuse de l’insécurité au pays dit des hommes intègres ? Les familles n’ont pas encore fini d’enterrer leurs morts, le Burkina pleure ses fils victimes des prédateurs des temps nouveaux ; la république est en émoi ; la côte d’alerte est atteinte.

Mais, paradoxe, l’autorité publique semble faire étalage d’une impuissance effroyable à moins qu’elle n’agisse sans tambours ni trompettes comme c’est souvent le cas.

Quoiqu’il en soit, le citoyen a déjà ses explications qui s’appellent pauvreté, déviance de la jeunesse, ruée vers le gain facile mais aussi impunité pour justifier cette descente aux enfers, sans toutefois y apporter des solutions.

Le rêve est grand que demain le Faso redevienne le havre de paix qu’il a toujours été. Mais y parviendra-t-on jamais quand on sait que les forces de l’ordre et de la sécurité se battent souvent à armes égales avec les malfrats au point que doter chaque policier d’un P.A. serait déjà un pas de géant ?

Dans l’entretien-fleuve qu’il nous a accordé le mercredi 3 mars 2004, le commissaire Palguim Sambaré, Directeur général de la police nationale (DGPN), ne désespère pas de ramener l’insécurité au seuil du tolérable. Mais il en appelle, pour cela, à la collaboration de la population, cette collaboration qui a permis de mettre rapidement la main sur l’un des présumés meurtriers des 3 policiers.

En tant que premier policier du Burkina, quel commentaire faite-vous à l’heure actuelle de la recrudescence du grand banditisme dans notre pays ?

•Avant tout commentaire, je voudrais vous remercier pour cette démarche qui me permet d’éclairer l’opinion sur les activités de la Police. Mais je ne parle pas en tant que premier policier, parce que le premier policier est le ministre de la Sécurité ; je suis le premier responsable des hommes de terrain et comme tout le monde, je constate qu’il y a une recrudescence du grand banditisme. Il n’y a pas de commentaire à faire. C’est regrettable que le phénomène prenne une telle ampleur, mais je pense qu’il y aura un changement et il vous appartiendra de l’apprécier dans les mois à venir.

Il y a deux ans de cela, on avait parlé d’un plan pour traquer les bandits. Qu’est-ce qui explique néanmoins le retour en force de ces hors-la-loi qui semblent narguer nos forces de l’ordre ?

• Effectivement, il y a un plan qui a été conçu pour faire face à la montée vertigineuse du grand banditisme et comme tout plan, il nécessite des moyens. D’abord les moyens humains : les hommes sont formés, pas en nombre suffisant, mais il y a quelque chose qui a été fait : les recrutements sont renforcés. Ensuite, il y a les moyens matériels et c’est là que le bât blesse : les moyens font défaut, mais avec ce plan nous pourrons améliorer nos prestations. Par exemple, on pourra passer du ratio actuel qui est d’un agent de sécurité (Police et Gendarmerie) pour deux mille personnes à un agent pour mille à l’orée de 2010 tandis que les moyens de transport et de communication seront à la hauteur de nos attentes. Le retour en force du banditisme est lié aux causes originelles du phénomène de la délinquance : pauvreté, déviance de la jeunesse, etc. Cela est normal au regard de toutes les activités socio-économiques qui ont cours au Burkina. Il n’y a pas lieu d’être exagérément pessimiste parce qu’avec un peu plus de moyens, on pourra endiguer le phénomène, le ramener au seuil du tolérable.

Maintenant, on tue des citoyens dans des bureaux, dans leurs domiciles et dans les coins des rues ; la liste des trucidés est très longue et pourtant on ne voit pas une réaction de grande envergure de votre institution sur le terrain notamment les contrôles nocturnes et autres. Que se passe-t-il ?

• Les week-end on pouvait constater que les grandes villes étaient prises d’assaut par les forces de sécurité pour des contrôles d’éclairage, de vignettes… Aujourd’hui, les choses ont légèrement changé en ce sens qu’au regard du processus démocratique, chacun a pris un peu de liberté, en oubliant que la meilleure sécurité est celle qu’on assure soi-même. Tel est le véritable problème, sinon c’est une nécessité. Mais encore faut-il que les citoyens comprennent que ce n’est pas de gaieté de cœur que les forces de sécurité mènent ces contrôles. Ce n’est pas pour les importuner, mais c’est dans leur propre intérêt. Nous demandons la compréhension de tout un chacun parce qu’à l’allure où vont les chose, on va devoir changer notre fusil d’épaule.

La mode ces dernier temps au Burkina, c’est la formule "wanted". Est-ce dû à une limite de notre police ou alors la population ne coopère pas beaucoup avec les forces de l’ordre ?

• Ce n’est pas une mode parce que pour toutes les infractions commises, il n’y a pas de "wanted" qui ont été émis pour retrouver les auteurs. C’est un procédé policier pour rechercher toute personne s’étant mise en travers de la loi. Les forces de sécurité ne sont pas dépassées parce que même les Etats les plus puissants de ce monde qui ont tous les moyens font recours à ce procédé pour mettre la main sur les bandits de grand chemin. J’avoue que cela porte fruit. C’est un appel à la collaboration de tout un chacun. Il a ses avantages et ses inconvénients. Peut-être cette fois-ci il y a une large diffusion, notamment de la part de la presse, au point qu’on a cette impression. Sinon, c’est une méthode classique des forces de sécurité pour rechercher des individus dangereux.

Une telle formule n’incite-t-elle pas les truands de grand chemin à s’évaporer dans la nature quand ils savent qu’ils ont été identifiés et sont activement recherchés ?

• C’est possible, mais c’est une guerre psychologique entre les délinquants et les forces de l’ordre. Il faut qu’il y ait une grande pression pour que ces bandits de grand chemin sachent que, où qu’ils aillent, un œil peut être à la base de leur interpellation.

Lorsqu’on regarde la puissance de feu et la stratégie utilisée par certains gangs, on se demande si ces derniers n’ont pas des informateurs ou des complices qui sont nécessairement des hommes de tenue.

• C’est une question assez délicate à laquelle on ne peut répondre ni par l’affirmative, ni par la négative. En tant que professionnels, nous sommes, il est vrai, parfois surpris par le modus opérandi des bandits. Est-ce que quelqu’un qui a grandi au village, qui n’a jamais connu une kalach ou un G3, peut avoir une telle maîtrise de ces armes ? Je me pose des questions. Mais si nous remontons dans notre histoire récente, il fut un temps où des gens d’un certain âge ont appris le maniement des armes.

Enfin, il faut savoir que les soubresauts politico-militaires dans la sous-région ouest-africaine ont eu pour conséquence grave la prolifération des armes de guerre. Est-ce que le phénomène peut s’expliquer ainsi ? Je ne franchirai pas le rubicon en disant qu’il y a implication d’éléments des corps habillés, mais la question mérite d’être posée.

Un des suspects qui auraient assassiné récemment les trois policiers aurait déjà déjoué une fois la vigilance de la police, notamment de la DUMAS en prenant la poudre d’escampette. Est-ce qu’il n’aurait pas voulu régler, comme on l’entend, ses comptes avec certains de vos agents ?

• Oui, c’est effectif. Après vérifications, on a su que le sieur Pitroipa a été un de nos "clients" au niveau de la D.U.M.A.S. Avec d’autres délinquants, au nombre de six, il avait réussi à s’enfuir. Les six autres avaient déjà été repris. De là à être animé d’un sentiment de vengeance vis-à-vis des policiers, je pense que ce n’est pas le cas . Quand on connaît le cursus de ce bandit, on voit que ce ne sont pas seulement les policiers qui sont ses victimes. En effet, outre le drame de Zaogo, il y a un certain nombre de choses qu’on lui reproche dont le meurtre du commerçant de Zorgho.

Cela pose le problème des grands bandits qui, une fois qu’ils ont purgé leur peine, au lieu de s’intégrer dans la société comme il faut, reprennent du service. Que faut-il faire à votre avis ?

• Pour nous les forces de sécurité, ce sont des gens qu’il faut mettre à l’ombre pendant un certain temps, jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus être opérationnels. Mais est-ce la solution ? Le problème est complexe et il faut un ensemble de conditions pour le résoudre. Nos maisons d’arrêt sont conçues pour quelques centaines de détenus, mais en accueillent le double, voire le triple. Comment faire ? Il y a nécessité d’"élaguer" un peu avec le risque que de gros "poissons" retrouvent la liberté et reprennent allègrement leurs activités. C’est un problème transversal dont la solution n’incombe pas seulement aux forces de sécurité. Nous avons une contribution à y apporter, mais d’autres partenaires aussi doivent s’y consacrer.

Le sieur Pitroipa Yemdaogo, alias Issaka, selon certaines sources, détenait un gilet pare-balles pour ses opérations. Un civil peut-il se procurer facilement un tel équipement ?

• Cette information n’est pas avérée au niveau de la police. C’est une simple rumeur qui n’est pas fondée.

Au fait, que deviennent les autres "wanted" ?

• Ils sont toujours en cavale et nous sommes en train de jouer au chat et à la souris. Nous comptons sur la collaboration de tout un chacun, surtout avec les avis de recherche que nous avons lancés, pour pouvoir les interpeller dans un délai raisonnable.

Si l’un des "wanted" a déjà été arrêté, c’est parce que ce sont des policiers et non de simples citoyens qui ont été abattus, entend-t-on dire…

• On me demande d’être juge et partie. C’est un peu difficile, mais c’est la première fois qu’un acte ignominieux a produit de tels effets sur l’opinion nationale. L’élément déterminant dans cette action des forces de sécurité est que les victimes ont collaboré spontanément avec description à l’appui, ; et avec l’album photos des grands délinquants que nous détenons au niveau de Koupéla, le sieur Pitroipa a été formellement identifié..

Ce qui n’est pas le cas dans tous les crimes qu’on a connus. La coopération des populations, les témoignages très précis des victimes ont permis de l’identifier, de le localiser et de l’interpeller.. Si d’aventure des langues s’étaient déliées pour d’autres cas et qu’on avait bénéficié de la même collaboration, les forces de sécurité auraient enregistré des succès aussi francs que celui-ci.

Récemment la Compagnie républicaine de sécurité (CRS), en voulant disperser les commerçants de l’ex-marché Rood-Woko, a blessé grièvement des participants lors de l’assemblée générale de ces derniers. Qu’est-ce qui explique une telle intervention musclée ?

• Lors de la conférence de presse animée par le ministre du Commerce et celui de la Sécurité, des explications claires ont été données, à savoir simplement que la force publique n’intervient qu’à la demande, voire parfois sur réquisition, pour mettre fin à une situation donnée. En ce qui concerne le cas d’espèce, le meeting n’était pas autorisé, pire, il était devenu un attroupement armé.

Dès lors, l’usage de la force s’imposait. Du reste, il y a eu des situations qui ont nécessité des interventions toutes aussi vigoureuses. Je pense notamment aux différentes marches que nous avons connues dans les grandes villes et surtout à la prise d’otages à l’usine Faso Fani à Koudougou où le risque était plus grand parce qu’il y avait des substances inflammables et explosives qui entouraient les otages.

Cela a donné l’occasion, actualité oblige, à certains de dire que tout ce que sait faire notre police c’est de charger les manifestants pacifiques et de faire tête basse face à la montée de la criminalité. Qu’en dites-vous ?

• Ce sont des jugements et j’en prends acte. Si nous arrivons à rétablir l’ordre c’est déjà quelque chose de bien . En ce qui concerne la lutte contre la grande criminalité, elle ne fait pas l’objet de tapage comme le maintien d’ordre où c’est au vu et au su de tout le monde. Dans ce genre d’action, la discrétion est la meilleure arme pour nous. Voilà pourquoi c’est exagéré de dire qu’on est incapable devant les grands bandits. Si tel est le cas, je vous le concède et je souhaite qu’il y ait plus de compréhension à l’avenir.

Selon vous que faut-il à notre police pour ramener au minimum l’insécurité grandissante ?

• Nous parlons toujours des moyens humains et matériels. Mais la police a beau être équipée, si les citoyens ne considèrent pas la sécurité comme leur propre affaire, il y aura toujours des problèmes. On aura beau recruter le maximum d’hommes, on aura beau équiper les services de sécurité de matériels techniques et scientifiques, tant qu’on aura pas réussi à faire la jonction entre les forces de sécurité et les citoyens, ce sera peine perdue. Il faut, pour qu’on ait des résultats probants, travailler en partenariat avec les citoyens, pour que la sécurité, ne reste pas la chasse gardée des forces de sécurité, mais de toute la communauté. C’est seulement dans ce cas que nous pourrons dire que nous avons atteint notre objectif principal, à savoir la quiétude des populations.

Vos compagnons d’armes, qui ont été froidement abattus par des bandits, ont été décorés. En plus de cela, est-ce que quelque chose est prévu pour soutenir les différentes familles éplorées ?

• Ils ont été décorés, mais il faut aller au-delà. Ce n’est pas la première fois que nous connaissons ce genre de situation. Des initiatives ont toujours été prises au niveau de l’Etat, ou des collègues de service pour venir en aide aux veuves et aux orphelins en attendant que l’administration prenne le relais. Sans vous en dire plus, j’affirme que cet aspect est une de nos préoccupations principales.

Certains parlent également d’une initiative de soutien, à la sécurité nationale alors que d’autres prônent une guerre totale contre les bandits à travers des opérations "coups de poings" ; quel est votre point de vue ?

• Les opérations "coups de poings", nous les menons, mais elles ne sont pas la solution durable. Ce sont des interventions ponctuelles qui ne résolvent pas le problème sur le long terme. Il faut aller au-delà des opérations coups de poings . "Initiative de soutien" et "opérations coups de poings" ne sont pas antagoniques. Ce sont deux propositions à la limite complémentaires. Une initiative nationale pour soutenir la sécurité, à travers laquelle tous les citoyens se retrouvent en partenariat pour gérer la sécurité ne fait pas obstacle à des opérations ponctuelles "coups de poings" aux périodes de pic, pour ramener la situation au seuil du tolérable. L’initiative peut être un moyen ou une solution à long terme.

L’un dans l’autre, on peut parvenir à un bon résultat. Seul le long terme peut nous amener à avoir une situation de sérénité et de sécurité dans notre pays. Nous nous acheminons vers la mise en œuvre d’une police de proximité, et lorsque cette police sera une réalité vécue au quotidien par les populations, nous pourrons dire que le mal sera contenu, voire éradiqué.

Les militants des droits de l’homme et l’opposition politique accusent souvent les forces de l’ordre de procéder à des exécutions extrajudiciaires voire des liquidations d’opposants, sous prétexte de lutter contre le banditisme. Qu’en dites-vous ?

• C’est un point sur lequel je ne polémique pas souvent. Quand des situations de droit pénal sont élevées au stade de la chose politique, on y perd son latin. Avec le cas du 18 février 2004, le Burkina se retrouve avec quatre veuves et dix-sept orphelins, du fait de deux ou trois individus. En tant que responsable de la sécurité, si je devais opérer un choix entre la vie de ces trois individus par rapport à la situation des veuves et orphelins, ce choix ne serait pas cornélien.

Comment lutter contre l’insécurité en respectant les droits de la personne humaine qui concernent également les bandits ?

• Nous avons pour mission de protéger, promouvoir les droits humains, mais, à un moment donné, lorsque vous avez à choisir entre les droits d’une victime impuissante et ceux des bandits, on ne peut que privilégier les droits de celle-ci. Cependant, au fur et à mesure que nous avançons, les forces de sécurité agissent selon les règles de l’art, avec comme souci majeur le respect des droits humains. Il arrive parfois qu’on soit acculé et qu’on entende lancés à tout vent des propos du genre : "On l’a envoyé à la MACO, mais il n’a pas fait deux mois ! Non seulement on l’a libéré, mais encore il vient me narguer". Quand de tels propos sont tenus, on ne sait plus où donner de la tête. Néanmoins, il faut faire l’effort de lutter contre l’insécurité tout en préservant les droits humains.

La police est qualifiée de parent pauvre des forces de l’ordre. Est-ce que des dispositions sont prises pour mieux équiper vos éléments et les motiver davantage ?

• Effectivement, je constate que la police est le parent pauvre des forces de sécurité, mais à la gendarmerie, ce n’est pas non plus le paradis. Il faut reconnaître que vu l’ampleur du phénomène aujourd’hui, les forces de sécurité méritent d’être mieux équipées. Pratiquement, on se bat à armes égales avec les malfrats. Les moyens des forces de l’ordre sont fonction de ceux de l’Etat, lequel a plusieurs priorités, et privilégier par exemple la sécurité au détriment de la santé ou de l’éducation serait trop demander, mais des efforts méritent d’être faits. Nous avons espoir que dans les deux prochaines années, la police et la gendarmerie seront bien équipées et plus aptes à faire face aux bandits. D’ores et déjà, les hommes sont convaincus et déterminés, et ceci est l’élément fondamental qui fait notre force.

Sous-équipement, sous-effectif, sous-rétribution, absence de prime de risque… Pour quelle raison, un policier irait s’offrir en holocauste aux bandits ?

• Vous ne faites que décrire une réalité, mais lorsqu’on choisit de venir à la police ou à la gendarmerie, c’est pratiquement un serment que l’on fait. Serment de servir, de garantir la sécurité des personnes et de leurs biens. Il y a cette situation de sous-équipement qui peut décourager, mais on est lié par cet engagement pris d’aller jusqu’au bout. Cela me donne l’occasion de féliciter tous les éléments des forces de sécurité qui, chaque jour que Dieu fait, donnent un peu plus d’eux-mêmes pour que la sécurité soit le bien le mieux partagé.

Est-ce que la police dispose de l’armement qu’il faut pour faire face aux brigands ?

• Oui, mais pas en quantité suffisante. Si chaque policier ou gendarme pouvait, comme dans les pays développés, disposer de son pistolet automatique (P.A.) qu’il rend au moment de son départ à la retraite, ce serait déjà un pas de géant. Ensuite, lorsqu’on va pour des opérations à risque, il est souhaitable que chaque élément dispose d’un fusil d’assaut et de moyens de protection.

Si apercevoir le gendarme, comme on dit, est le début de la sagesse, les policiers par contre semblent ne susciter aucune crainte, surtout pas chez les bandits. Comment y remédier ?

• C’est un vieil adage dédié à la gendarmerie, mais il faut l’élargir à toutes les forces de sécurité, à la police notamment. Je puis vous dire que la gendarmerie aussi a connu des coups durs comme nous en avons connu récemment. D’une manière générale, les forces de sécurité n’inspirent pas la peur à certaines catégories de bandits. Ce qui est survenu le 18 février 2004 en est l’illustration.

Actuellement, il est plus que temps qu’on prenne le taureau par les cornes afin que la peur soit toujours du côté des bandits. Nous pourrons nous en sortir avec la compréhension et la collaboration des populations. Des efforts importants sont consentis pour rendre opérationnelles les forces de sécurité. C’est une question de temps.

Selon vous quelles sont les zones les plus redoutées au Burkina Faso dans le domaine de l’insécurité ?

• Le terme redouté est trop fort, mais il y a ce que nous appelons les zones rouges, où on n’est pas à l’abri de surprises désagréables de la part des malfrats. Je citerais entre autres l’Est, le Centre-Est et le Nord.

Quand pourra-t-on s’attendre à une baisse sensible du grand banditisme dans notre pays ?

• Comme je l’ai dit plus haut, les causes sont socio-économiques. Tant que ces causes-là ne sont pas enrayées, il faut s’attendre à ce que le phénomène persiste. Avec le redéploiement des forces de sécurité, la création de nouvelles unités dans les zones sensibles, nous allons pouvoir endiguer le phénomène. Il est vrai qu’on peut se faire surprendre dans n’importe quel coin du Burkina Faso, mais nous ne sommes pas un "pays rouge" où en un clin d’œil on peut se faire agresser. Je ne puis vous dire qu’en telle année x nous pourrons nous en sortir, mais j’avoue que l’espoir est permis parce qu’il y a une prise de conscience de tous les acteurs sociaux au Burkina Faso. On aura des résultats palpables et le Burkina Faso va retrouver son appellation d’antan de havre de paix. J’en suis convaincu.

Aux Etats-Unis, on communique le montant de la prime sur les personnes dont les têtes sont mises à prix. Peut-on avoir une idée d’une telle prime au Burkina ?

• C’est exact ce que vous dites. Aux Etats-Unis on publie les montants, même dans certains pays en Afrique on le fait. L’Etat burkinabè dispose de peu de ressources et partant, la police n’a que des moyens limités. On fait avec ce qu’on a. Sans pouvoir vous donner de montant, je crois que ce qui est proposé à l’échelle du Burkina est intéressant.

On assiste ces derniers temps à des meurtres de jeunes filles, souvent égorgées. Est-ce de simples crimes crapuleux ou des meurtres rituels comme d’aucuns l’affirment ?

• Nous avons en effet enregistré deux cas des plus ignominieux au secteur 15 et à Sâaba. Les indices que les professionnels de la sécurité ont entre leurs mains indiquent qu’il s’agirait plus de crimes crapuleux que rituels. Parce que lorsqu’on emporte les engins et les portables, c’est bien autre chose que quand on enlève des organes.

Certains de nos compatriotes avaient vite fait d’indexer des communautés particulières. Est-ce également la piste des policiers ?

• Non, je le pense pas. Ce n’est pas la police qui mène l’enquête concernant le meurtre des jeunes filles ; c’est plutôt la gendarmerie. Mais, la communauté à laquelle on fait allusion ne s’intéresse pas souvent à ce genre de chose. Elle excelle plutôt dans la cybercriminalité, c’est à dire l’utilisation des NTIC pour se faire de l’argent. Il peut y avoir des cas exceptionnels, mais je ne pense pas qu’elle y soit pour quelque chose.

Vous venez de recevoir des autorités policières ghanéennes. Cela est-il lié aux meurtres de ces derniers jours au Burkina ?

• Non, ce sont les mêmes partenaires, mais ils sont là dans le cadre d’une situation dont a été victime un de leurs compatriotes. Ils sont venus s’enquérir des circonstances exactes et procéder aux démarches qui s’imposent. Cela a été l’occasion pour nous de réitérer nos remerciements à la partie ghanéenne et de réaffirmer notre volonté de poursuivre et de renforcer la coopération.

Quel message avez-vous à l’endroit des populations ?

• Comme je l’ai dit au début, l’exemple qui nous convainc que la population a un rôle à jouer dans notre mission de sécurité publique, c’est le cas du 18 février 2004 dans le Kourittenga. C’est grâce au témoignage des victimes et à la coopération des populations que les auteurs ont été identifiés. Lorsqu’il y a un crime et qu’on dit à l’officier de police judiciaire : "Nous savons qui a fait cela, voilà les preuves", 50% du travail est déjà fait. Il ne reste plus aux services de sécurité qu’à faire les 50% restants. Avec interpol, à travers la coopération transfrontalière avec le Ghana, nous avons réussi. Le forfait a eu lieu le mercredi 18 février 2004 et c’est le mercredi suivant qu’on a pu mettre la main sur le sieur Pitroipa en territoire ghanéen. En d’autres termes, prétendre à la sécurité sans un partenariat de confiance avec la population est illusoire : j’invite la population à jouer pleinement sa partition et la presse aussi, la sienne.

Interview réalisée par
Bernard Zangré
D. Evariste Ouédraogo
L’Observateur

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