Actualités :: L’alternative Opposition-Pouvoir : Un vivifiant pour la démocratie (...)

Aborder la question des rapports opposition-pouvoir n’est pas chose facile dans la mesure où quel que soit ce que vous direz en bien de l’opposition et du pouvoir

Un vivifiant pour la démocratie si...

La tentative présumée de coup d’Etat et les manifestations de colère des commerçants (avec les conséquences que l’on sait) ont entraîné des empoignades entre le pouvoir et l’opposition ; le premier accusant la seconde d’être derrière ces "coups tordus" et la seconde rétorquant que le premier a créé tout ceci de toutes pièces pour mieux la réprimer. Au niveau de l’opinion et particulièrement de ses relais que sont les médias, toutes sortes de littérature orale et écrite ont été entendues et lues. Pour notre part, nous voudrions apporter notre contribution aux débats à travers une approche scolaire, un constat pratique et une interprétation toute personnelle de tout cela.

Aborder la question des rapports opposition-pouvoir n’est pas chose facile dans la mesure où quel que soit ce que vous direz en bien de l’opposition et du pouvoir, l’on vous accusera de ramer pour l’un des camps, chacun affirmant que vous roulez pour son vis-à-vis. Le pire advient dès que vous choisissez de voir à travers la pratique de chacun des deux protagonistes les comportements qui se situe aux antipodes des principes démocratiques.

Mais en ce qui nous concerne, l’intention n’est pas qu’on nous perçoive comme un être divin planant au-dessus de la société, qu’on ne peut pas soupçonner ou accuser d’avoir un parti pris conscient ou inconscient. Le souci qui est le nôtre est de dire ce que nous avons à dire et de laisser à chaque citoyen le droit de nous juger, de nous étiqueter. Autre précision, l’ordre d’écriture des éléments du couple opposition-pouvoir et non pouvoir-opposition vient du fait que d’une part o vient avant p dans l’ordre alphabétique et que d’autre part, l’opposition est perçue à tort ou à raison comme le camp qui "attaque" toujours le premier.

Quelques éléments de définition

D’abord au niveau du titre, nous avons préféré le terme alternative aux mots couple, contradiction, etc., car l’alternative est une perspective qui comporte deux options, deux solutions, deux éléments. Autrement dit, pour le gouverner, le peuple a, en principe, à choisir entre l’opposition et ceux qui sont déjà au pouvoir.

C’est-à-dire que son suffrage ira à un des éléments de l’alternative. Par conséquent dire par exemple, à l’instar du sens commun, que pour la résolution de tel problème on ne dispose que d’une alternative pour signifier qu’on ne peut envisager qu’une et une seule solution est impropre. C’est du fait de la "bidimensionnalité" de l’alternative que l’alternance politique, c’est-à-dire le chassé-croisé entre l’opposition et la majorité, est possible dans le respect des règles constitutionnelles en vigueur.

Quant au pouvoir au sens politique et institutionnel, il est une expression qui sert à désigner soit l’Etat par opposition aux citoyens et à la société civile, soit les gouvernants dans le couple pouvoir-opposition, soit l’ensemble des institutions constitutionnelles dans l’expression : les pouvoirs publics. Sous les tropiques, il est assimilable à l’exécutif et au parti au pouvoir, qui dirigent et contrôlent tout l’appareil d’Etat. Ce faisant, il est le contraire de l’opposition, de la société civile et des gouvernants. Toute chose compréhensible, mais à relativiser : compréhensible parce que dans la pratique de tous les jours, pouvoir et opposition, par exemple, croisent le fer sur le terrain des idées, dans la rue à travers certaines manifestations et parfois dans des combats de rue.

Pour compréhensible qu’elle soit, cette acception est à relativiser parce que l’opposition n’est pas nécessairement le contraire du pouvoir ; elle propose quelque chose de différent de ce que dit et fait le pouvoir, pas forcément quelque chose d’opposé. Elle est un contre-pouvoir, donc pas systématiquement contre le pouvoir et est un alter ego du pouvoir. En d’autres termes, le pouvoir incarné autrement, avec ses différences, ses spécificités (qui peuvent s’opposer à celles de ceux qui gèrent aujourd’hui la cité), mais avec aussi bien de similitudes avec le pouvoir en place. C’est pourquoi, il arrive qu’il y ait des convergences de vues, même si la façon de les exprimer varie selon le camp, le parti et les individus.

S’agissant de l’opposition, elle correspond à la minorité parlementaire (issue d’élections législatives) et aux partis non représentés au Parlement. Cependant, il y a lieu de préciser que l’appellation opposition parlementaire est préférée à la minorité parlementaire, car les élections législatives, baromètre de la popularité des partis, se tiennent à un temps T alors qu’à un temps T’ qui correspond à la période entre deux consultations électorales, la minorité parlementaire peut être la majorité au sein du peuple, sans qu’aucune élection pointe à l’horizon pour confirmer cet état des choses.

Gérer le pouvoir, pas aussi facile qu’on le croit

Dans un pays où les ressources sont rares voire inexistantes, le souci premier des gouvernants est ceci : faire plus avec peu. Dans un pays où la classe politique est essentiellement constituée des animateurs du mouvement étudiant des années 1970 et de la Révolution du 4-Août, la gestion du pouvoir est consubstantielle aux survivances des réflexes rigides alors en vigueur au sein de l’Union générale des étudiants voltaïques (UGEV) et de la Révolution démocratique et populaire. Ce qui n’est pas chose facile malgré la volonté affirmée de s’en défaire.

Enfin, dans un pays où les mentalités, eu égard à la pénurie des ressources et à certains aspects négatifs de l’héritage culturel traditionnel, sont au nivellement de la société par le bas, la gestion du pouvoir est d’autant plus difficile que : en même temps que les membres de la collectivité ne veulent pas que ceux qu’ils ont mandatés pour parler et agir en leur nom soient trop différents d’eux (au plan matériel, cela s’entend) au point de devenir trop étrangers à eux, en même temps ils n’admettent pas qu’un des leurs qui a assumé des fonctions politiques ou administratives se retrouve sans maison, sans voiture, sans oublier les autres commodités.

Tant et si bien que même s’il est mieux, du point de vue des avantages, de tenir les rênes du pouvoir que d’animer la contestation au sein de l’opposition, les dirigeants sont parfois à plaindre, car, comme de Dieu, le peuple attend d’eux des prouesses voire des miracles qu’ils ne peuvent hélas pas produire parce que n’étant pas des demi-dieux encore moins Dieu. Et surtout pas sans le concours des gouvernés.

Certes, on pourrait répliquer que ce sont eux qui ont promis, qui ont dit qu’ils peuvent, afin d’être élus, mais n’oublions pas que dans tous les pays démocratiques, il y a toujours (à des degrés divers) un décalage entre les promesses des hommes politiques et la réalité, pour trois raisons : d’abord nous sommes des hommes, donc des êtres imparfaits. Ainsi, même au niveau individuel, il y a toujours un décalage entre nos projets personnels et la façon de les réaliser et/ou leur délai de réalisation.

Ensuite, entre l’engagement pure et la réalisation de ce que promet l’homme politique, il y a toutes sortes d’impondérables qui interviennent comme des variables parasites, c’est-à-dire des obstacles. Enfin, en cas d’alternance, l’opposition qui arrive au pouvoir s’aperçoit très vite qu’une chose est de proposer autre chose que ce que faisait le gouvernement d’hier, et une autre est de le réaliser.

S’opposer, un sacerdoce

Dans les vieilles démocraties occidentales, on n’entreprend de faire de la politique que lorsque l’on dispose d’un minimum de moyens matériels et financiers ou de généreux donateurs qui croient en la pertinence de vos idées. Quand on choisit de s’opposer au pouvoir en place, les exigences financières et matérielles sont encore plus grandes. Or chez nous, la plupart se lancent dans la politique afin d’acquérir les moyens pour conquérir le pouvoir, le conserver, améliorer leurs conditions de vie et réaliser leur projet de société au profit de la collectivité. Ce qui est tout à fait compréhensible dans un pays où la nature est rarement clémente au regard des besoins de la population et où le sous-sol tarde à nous dire s’il contient ou pas le remède idéal pour combattre notre misère.

Si l’on ajoute à cela le fait que ceux qui ont pris le pouvoir un certain 4 août 1983 sont toujours aux commandes de l’Etat après une reconversion plus ou moins réussie à la démocratie libérale, on mesure la tâche qui est celle de l’opposition. Et puis, n’oublions pas qu’il est plus difficile de s’opposer pour conquérir le pouvoir que de l’exercer en essayant de le conserver. Aussi, faire de l’opposition, c’est faire preuve d’un courage certain quand bien même nombre d’opposants ne savent faire que de l’opposition parce que piètres politiciens excellant plus dans la contestation que dans la gestion de l’appareil d’Etat ou faisant de La cité du soleil de Campanella leur bible.

Les partis d’opposition méritent plus de respect et de considération et ne devraient pas à la moindre occasion faire l’objet de toutes sortes d’injures, d’accusations ; à moins que des preuves formelles soient fournies et les intéressés, reconnus coupables par un tribunal compétent.

Si on considère l’exemple de la tentative présumée de putsch et des manifestations de commerçants, il est malheureux de constater que certains hauts fonctionnaires considèrent certains responsables de l’opposition comme des coupables alors que, pour le moment en tout cas, ce n’est pas l’avis des autorités judiciaires, dans la mesure où les enquêtes ne sont pas terminées et qu’aucun procès n’a eu lieu.

Dans ces conditions, accuser officiellement les partis d’opposition (ou certains d’entre eux) de putschisme (malgré la déclaration maladroite et inopportune de l’UNDD), c’est prétendre faire le travail du pouvoir judiciaire sans en avoir ni les moyens, ni la formation, ni l’expérience et ni le devoir constitutionnel.

Pour notre part, opposition et pouvoir constituent un couple dont un des éléments, en démocratie en tout cas, ne peut se concevoir sans l’autre, car en même temps qu’ils donnent l’impression de s’exclure l’un l’autre, ils sont inséparables. Dans la perspective d’une démocratie vivifiée et fortifiée qui est l’aspiration de la grande majorité des Burkinabè, le respect de l’autre, le bannissement des accusations d’où qu’elles viennent doivent être les maîtres mots.

Les mercredis de Zoodnoma

Kafando L’Observateur

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