Actualités :: Burkina : 62 ans d’indépendance, avons-nous vraiment tiré des leçons de notre (...)

A la lumière des événements survenus au Burkina-Faso ces dernières années, nous pouvons affirmer que nous n’avons rien retenu comme leçon, enseignement et instruction de la grande histoire du peuple burkinabè. C’est la conclusion à laquelle parvient Sidiki Aboubacar Wendin Zerbo, qui cite, dans cette tribune, quelques exemples pour étayer ses dires.

La GRANDE HISTOIRE de chaque peuple est parsemée de douleurs et d’héroïsmes, émaillée d’épisodes ignobles et des scènes de bravoures. Elle s’est forgée dans le sang de la dignité et de la compromission ; s’est écrite dans la sueur des conquêtes et dans les larmes de l’assujettissement ; et s’est édifiée aux files des résistances, des compromis, des déchirures et des rabibochages.

Cette GRANDE HISTOIRE, qui est une articulation de moments de défaites et de victoires, de bassesses et de noblesses, est l’œuvre d’une part d’Hommes exceptionnels, grands par l’esprit et géants par les actes, dont les noms résonnent dans la nuit de l’éternité ; et d’autre part, par des âmes médiocres et bornées, dont les décisions impertinentes et les ambitions perverses ont infligé à leur peuple, ruines, souffrances et malheurs.

Malgré tout, chaque peuple doit accepter, préserver et assumer son histoire, et surtout, la transmettre fidèlement et loyalement à ses générations futures, afin que ces dernières y puisent l’inspiration de leurs actions à travers les faits glorieux de leurs ancêtres. Parallèlement, elles doivent œuvrer farouchement et rigoureusement, à la non reproduction et non répétition des manquements et impertinences de leurs aïeux.

Relativement aux propos susmentionnés, qu’en est-il particulièrement de la GRANDE HISTOIRE du peuple du Burkina Faso, qui vient de célébrer ses 62 d’accession à l’indépendance ? Quelle leçon avons-nous franchement tirée des erreurs, des contre-performances, des bavures et des insuffisances politico-économico-socio-militaires de notre passé ? Avons-nous fait un travail intellectuel sérieux, sur les 100 ans d’existence de la Haute-Volta et les 62 ans d’indépendance du Burkina-Faso, dans une perspective pédagogique, afin d’éviter à la postérité les ratés et les crimes du passé ; et surtout inciter en elle, la perpétuation des actes de bravoure et de vaillance de leurs grands parents ?

A la lumière des événements survenus au Burkina-Faso ces dernières années, nous pouvons affirmer que nous n’avons rien, absolument rien retenu comme leçon, enseignement et instruction de la GRANDE HISTOIRE du peuple burkinabè. Les réalités suivantes entre autres, prouvent notre déclaration ci-dessus.

 Premièrement, le 03 Janvier 1966, le Président Maurice YAMEOGO a été évincé du pouvoir par la rue, et s’exila en République de Côte d’Ivoire. Comme une malédiction, 52 ans plus tard, le Président Blaise COMPAORE est aussi chassé du pouvoir par la rue, et comme le Président Maurice YAMEOGO, il trouva refuge en Côte-d’Ivoire. La plupart des griefs formulés contre le Président Maurice YAMEOGO, furent les mêmes proférés contre le Président Blaise COMPAORE. Ainsi, à part le côté sensationnel et spectaculaire du 03 Janvier 1966, rien n’a été inculqué comme morale aux enfants voltaïco-burkinabè.

 Ensuite, les motifs d’arrogance, de gabegie, de népotisme, de corruption et de clientélisme, furent entre autres à l’origine de la colère populaire contre le Président Blaise COMPAORE. Comment expliquer, que seulement 7 ans plus tard, même pas une décennie après, ces mêmes motifs soient employés pour justifier les coups d’Etat contre le Président Rock Marck Christian KABORE et le lieutenant-Colonel Paul Henri Sandoago DAMIBA ? Donc, sommes-nous incapables de tirer des leçons des déboires du passé, ou n’avons-nous pas toujours compris, et ce, 60 ans après les indépendances, que l’outrecuidance, le clientélisme, la corruption et l’embourgeoisement illicites sont suicidaires et mènent à la vindicte populaire, dans la patrie de Lazare Daniel Ouézzin COULIBALY ?

 En outre, il y a 24 ans, le journaliste Norbert ZONGO était assassiné tragiquement, dans la dynamique de son noble combat pour la liberté, la justice, la liberté d’expression et la vérité. Aujourd’hui encore, sur la terre natale de Norbert ZONGO, des activistes sont incarcérés pour avoir simplement parlé et formulé leurs pensées ; internet a été coupé pour empêcher aux burkinabè de s’exprimer ; des marches ont été interdites pour étouffer la colère d’une frange de la population ? Est-ce normal ? N’avons-nous donc rien tiré comme leçon du combat et de la mort du grand, du très grand Norbert ZONGO ?

 Aussi, les guerres fratricides, l’esprit clanique et la politisation de l’armée ont été en grande partie les causes de la chute du Commandant Jean-Baptiste OUEDRAOGO, et de l’assassinat entre autres, du Capitaine Président Thomas SANKARA, du Colonel Gabriel Yorian SOME, du Lieutenant-Colonel Pierre Claver Nézien BADEMBIE, des Commandants Fidèle GUEBRE et Amadou SAWADOGO, du Lieutenant Daniel KERE et de ses petits frères d’armes du BIA de Koudougou, entre autres Abdramane SAKANDE, Elisée SANOGO, KI Bertoa…

Comment comprendre et expliquer, qu’aujourd’hui encore, des jeunes militaires, dont certains sont issus du prestigieux PMK, continuent à s’investir tacitement en politique, à ériger des accointances et copinages souterraines avec des politiciens, à construire des clans dans l’armée, tout en se regardant en chien de faïence ? Conclusion : les officiers d’aujourd’hui, n’auraient rien tiré comme enseignements des erreurs monumentales et gravissimes de leurs devanciers.

 Par ailleurs, dans les temps précoloniaux, une coalition supra-ethniques mit en déroute la puissante armée coloniale française en 1916. Ce fut la fameuse et grande guerre du Bani-Volta. Cent ans plus tard, certaines ethnies cultivent la méfiance, la suspicion et la défiance entre elles. Et pourquoi ? Parce qu’on ne leur a pas appris, qu’il y a un siècle, leurs grands-parents furent des frères et alliés contre le colon, et qu’à leurs yeux d’antan, brillaient la lumière de la fraternité.

 Enfin, en 1932, la France balkanisait et partitionnait la Haute-Volta. Quatre-vingt-dix ans plus tard, en 2022, ce sont certains fils et filles de la même Haute-Volta, dont les grands parents se battirent héroïquement pour sa reconstitution en 1947, qui s’entretuent, s’entre-déchirent et s’entre-dévorent avec acharnement pour sa partition. Et pourquoi ? Parce qu’on ne leur a pas appris à s’accepter comme nation, et surtout, parce que des décisions politiques impertinentes et illégales, et des injustices ont fini par ériger des murs entre eux.

Aujourd’hui, le Burkina-Faso est dirigé par le Capitaine Ibrahim TRAORE, qui s’est fixé pour mission principale de libérer le Burkina-Faso du joug terroriste. Nous lui souhaitons bonne chance, et prions que L’ETERNEL DIEU l’ASSISTE.

Ici, il y a lieu pour le rédacteur de ces lignes de formuler ce conseil à l’endroit du Capitaine TRAORE. « Lutter contre le terrorisme est une bonne et noble action. En même temps que se mène la guerre des armes, que nous remporteront sûrement, il serait important de préparer concomitamment la guerre des esprits. Pour cela, le Capitaine TRAORE devrait réunir autour de lui, un Etat Major d’intellectuels, de penseurs et d’esprits éclairés, constitué notamment de Sociologues, d’Anthropologues et d’Historiens, en leur assignant la grande mission de reconfectionner les manuels scolaires, et faire émerger un dispositif et un système éducatif national nouveau, afin de faire naître un burkinabè décomplexé, fier de lui, patriote, qui ne vénèrera pas l’argent, n’adorera pas le matériel et ayant le sens de l’Honneur et de la Dignité.

Capitaine Ibrahim TRAORE, si ce travail n’est pas fait, vous aurez certes aujourd’hui la victoire militaire sur le terrorisme, vous reconquérez 100% du territoire national burkinabè. En revanche, dans 20, 30 ou 40 ans, d’autres personnes se constitueront en bandes armées, feront leur levée de boucliers, et voudront estomper la quiétude et la sérénité de leurs compatriotes burkinabè, car, comme l’a démontré pertinemment et avec éloquence notre GRANDE HISTOIRE, « les mêmes causes, produisent toujours les mêmes effets ».

QUE DIEU GARDE ET BENISSE le Burkina-Faso.

Sidiki Aboubacar Wendin ZERBO.
Ressortissant du Pays des Hommes Intègres

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