Actualités :: Afrique/Insécurité : « Quand on se noie, on s’accroche à tout... », estime (...)

Dans cette tribune, l’analyste-politique Timbila Jean Sanogo s’est prononcé sur la présence de Wagner sur le continent africain ainsi que les nombreuses exactions commises par les paramilitaires « russes ».

« La présence de Wagner sur le continent africain à travers certains États en crise sécuritaire divise les opinions. « Quand on se noie, on s’accroche à tout ... », coupent court simplement des citoyens africains qui, par-là, traduisent également l’agacement dans lequel se trouvent ces pays meurtris par l’insécurité.

Entre une armée française pointée de doigt, à tort ou à raison, d’être de connivence avec les groupes terroristes ou de faire dans la passivité, et un groupe privé de sécurité russe, Wagner, dont on ne connaît les contours de ses interventions, il va falloir pour ces dirigeants africains une lucidité, loin de l’euphorie et du tintamarre des réseaux sociaux.

Le groupe Wagner s’est révélé à une partie des Africains par le bourbier centrafricain. Là, malgré les tentatives de masquer les réalités en donnant le beau rôle à ce groupe, l’actualité est loin de lui faire luire. « C’est une solution qui se révèle pire que le mal », se désolent des observateurs africains. Les éléments qui pèsent sur lui sont nombreux.

Pas plus tard qu’il y a quelques mois, par exemple, une source à l’ONU confiait qu’une opération militaire conjointe entre l’armée centrafricaine et des mercenaires du groupe russe Wagner a, les 16 et 17 janvier 2022, fait au moins une trentaine de victimes. De nombreux massacres et exactions sont à l’actif du groupe privé russe, dont la présence sur ces théâtres d’opérations est niée par Moscou (quand bien même Wagner est réputé proche de Kremlin). Ici, il est évoqué, et pour la n-ième fois, la possibilité de pillages dans certaines zones du pays.

En clair, les mercenaires russes pillent les mines artisanales en Centrafrique. Ils y auraient tué des dizaines de travailleurs clandestins depuis le mois de mars 2022, relate La Croix. Dans ce pays, l’implication des accords entre les autorités centrafricaines et le groupe restent dans un flou. Quelle sera la contrepartie de cette présence de Wagner ? Boule de mystère ! C’est aussi la même et principale interrogation qui se pose avec le Mali.

Au-delà des soupçons d’exactions qui commencent à peser sur Wagner, des maliens s’interrogent sur le coût de cette intervention et son implication à long terme, notamment par rapport aux ressources naturelles de leur pays. Ce vaste pays du Sahel est réputé abrité d’importantes quantités de richesses naturelles, prisées par les grandes puissances, de sorte à faire l’objet de toutes les convoitises. L’entrée remarquée de Wagner sur ce territoire, au même moment où la junte s’est attelée à repousser Barkhane, pourrait procéder de la politique de positionnement russe. 

« Mieux vaut un partenariat avec une organisation officiellement reconnue, même s’il paraît déséquilibré, que des accords clandestins, qui peuvent rattraper à tout moment et susceptibles de mettre en péril des générations. Je dénonce ces accords entre ces puissances, notamment la France, et des pays africains, dans lesquels ces derniers ne tirent pas grand-chose et je suis carrément contre le fait que tout un pays s’attache les services d’un groupe privé, dont le pays d’origine même décline toute responsabilité », commente un ancien diplomate burkinabè. N’est-ce pas ce côté gênant qui a poussé les autorités maliennes, la junte, à d’abord nier la présence de ce groupe sur son territoire avant d’être rattrapées par le terrain !

Il est clair que dans des pays africains en crise, un travail se fait, surtout à travers des organisations civiles, pour avoir une assise de Wagner. Ce que déplorent citoyens qui ne sont pas du tout favorables à cette installation de Wagner en Afrique. Mais, peut-on en vouloir à cette frange qui trouve un terrain propice pour mener cette campagne en faveur de Wagner ?

En effet, au-delà de l’ignorance d’une grande partie de la population, les forces internationales dans les pays en crise n’ont jamais donné espoir aux âmes meurtries. Ces dernières ont même parfois l’impression d’être assistées dans leur mort. Que ce soit la MINUSCA en Centrafrique, la MINUSMA au Mali ou encore la MINUSCO au Congo, la vocation même de ces missions internationales peine toujours à se justifier. Les récentes et violentes manifestations au Congo contre la MINUSCO témoignent bien cela.

S’il est donc clair qu’il faut se méfier des accords avec les entités dont le caractère mercenariat semble bien affiné et projeté dans le temps, il est aussi vrai que les partenaires classiques doivent revoir certains accords avec des États africains pour qu’ils servent davantage les populations. Ne pas le faire, c’est ouvrir la voie à des coopérations nuisibles à ces pays africains en difficultés, car comme le dit bien cet adage : « Quand on se noie, on s’accroche à tout, même aux serpents ».

Timbila Jean Sanogo

Analyste-politique

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