Actualités :: 24 mois de transition au Burkina : Des acteurs politiques se (...)

C’est désormais chose faite. La durée de la transition burkinabè est fixée à 24 mois et ce à compter de juillet 2022. C’est la décision des chefs d’États de la CEDEAO à l’issue du sommet d’Accra (Ghana) tenu le dimanche 3 juillet 2022. Pour connaître l’avis de la classe politique burkinabè concernant cette décision de la communauté, Lefaso.net a tendu son micro aux acteurs des différents partis politiques.

Lassina Ouattara, secrétaire à l’information et à la communication du MPP

« En ce qui nous concerne, c’est une décision de la CEDEAO et c’est notre institution commune. Donc, je pense que nous nous allons là-dessus et nous sommes toujours engagés à ce que le processus qui va être conduit tout au long de cette transition de 24 mois soit vraiment un processus de dialogue inclusif de l’ensemble des Burkinabè et des parties prenantes de notre société afin que nous sortions encore plus unis au niveau du Burkina Faso sur l’orientation que nous donnons à notre pays.

C’est ce qui est important et surtout la nécessaire action qu’il faut mener ensemble pour sécuriser l’ensemble du territoire. C’est pourquoi, nous disons que c’est une date raisonnable, tenable, parce que l’objectif, c’est de faire en sorte que nous puissions sortir de cette transition qui doit être consacrée par des élections. C’est une question d’organisation, parce que la situation dans laquelle nous sommes, il faut réunir tous les facteurs, toutes les conditions pour pouvoir continuer la lutte pour la sécurisation du territoire et, en même temps, aussi avoir une économie solide qui tienne debout pour que l’effort de guerre soit constant et soutenu.

Lassina Ouattara, secrétaire à l’information et à la communication du MPP

Et cela ne peut arriver que quand vous êtes dans les institutions démocratiques reconnues, acceptées, tolérées par la communauté internationale qui sont des contributeurs dans notre pays et même dans nos relations avec les autres pays et cela est important. Parce que nous sommes dans une situation précaire et il faut sortir le pays de la précarité pour construire une économie fiable et solide qui tienne ses engagements. Voilà pourquoi, il ne s’agit pas d’aller à des élections pour des élections, mais faire en sorte que le pays soit un pays solide, fréquentable et où les affaires reviennent à la normale ».

Yéli Monique Kam, présidente du Mouvement pour la renaissance du Burkina Faso

Nous aurions souhaité le retour de la sécurité en moins d’un an (12 mois). Cependant, le peuple est également conscient de la gravité de la situation et des contraintes militaires. C’est pourquoi, il accepte de souffrir dans la résilience. La résilience est synonyme de mal gouvernance et couve les germes de la guerre civile.

En désespoir de cause, le peuple accepte de souffrir encore et accorde au pouvoir militaire jusqu’à 24 mois tout au plus pour se concentrer sur les actions militaires et humanitaires.

Je salue la clairvoyance de la CEDEAO ainsi que la bonne compréhension et l’engagement du pouvoir militaire à s’inscrire dans un processus de transition inclusif centré sur les actions militaires de pacification de notre pays.

J’appelle l’ensemble de mes concitoyens à soutenir les organes de la transition et surtout à collaborer avec nos FDS pour faire reculer les attaques ennemies.

Yéli Monique Kam, présidente du Mouvement pour la renaissance du Burkina Faso

Abdoul Karim Sango, président du Parti de la renaissance nationale (PAREN)

« Je crois que sur la question du délai évoqué par le médiateur Mamadou Issoufou et le gouvernement de la transition, on peut estimer que c’est un pas de clairement franchi désormais. Jusque-là, on était partagé entre les délais de 36 mois que le gouvernement avait fixé unilatéralement, de 24 mois proposés par l’alliance Ensemble pour le Faso, à laquelle appartient le PAREN. Je crois d’ailleurs que d’autres acteurs souhaitaient qu’on ne parle même pas de délai de la transition avant que le territoire ne soit totalement sécurisé, ce qui constitue une utopie de mon point de vue.

Au lendemain du coup d’État, notre Alliance a suggéré que la transition n’excède pas 24 mois. Au final, le médiateur a procédé à un sage arbitrage en prenant en compte les préoccupations des différentes parties. Mais comme je l’ai indiqué plus d’une fois, je ne suis pas dans le fétichisme des délais. Je me satisfais donc de ce qui a été arrêté surtout que je suis un des premiers acteurs à avoir accueilli favorablement la médiation du Président Issoufou. Le temps court maintenant pour le gouvernement de la transition.

Il faut vite se concentrer davantage sur la situation sécuritaire qui se dégrade à une allure inquiétante. Il était illusoire de croire que si nous avions un délai trop long, nous gagnerons la guerre, ce n’est pas toujours vrai. Peut-être que si nous avons de bons résultats sur le terrain, les 24 mois pourraient être revues à la baisse et c’est ce que je souhaite très sincèrement pour notre pays. Le vrai problème aujourd’hui c’est qu’avec le coup d’État, nous sommes un État en marge de la communauté internationale.

Nous avons été suspendus des instances de la CEDEAO et de l’Union africaine. Tant que votre pays est géré par des militaires, vous n’êtes pas un État crédible au regard des normes internationales et régionales actuelles. Cela a des implications terribles sur le plan économique, politique, social et culturel, voire psychologique. Je dois rappeler que depuis le renouveau démocratique en 1990, le seul militaire en Afrique qui a réussi brillamment la transition, c’est l’ancien président ghanéen Jerry John Rawlings qui a doté le Ghana d’une des meilleures constitutions et des meilleures institutions en Afrique.

Abdoul Karim Sango, président du PAREN

Maintenant que nous connaissons le délai, ce qui est important, c’est la situation sécuritaire. Aucun Burkinabè honnête ne souhaiterait que sur le plan sécuritaire il y ait un échec, ce serait un chaos. Il faudrait que les militaires prennent conscience de l’ampleur de la responsabilité qui leur est accordée. Allons à l’essentiel. Je les encourage à mettre en place un cadre de dialogue inclusif, franc et sincère, en dehors de tout calcul politicien comme savent le faire les politiciens professionnels, pour discuter de ce que nous faisons jusqu’à la date des élections. Quelles sont les grandes réformes pour la refondation politique et électorale de notre pays ?

Comment faire pour ne plus organiser des élections à 56 milliards sur le pauvre budget de l’Etat et qui se terminent par un coup d’Etat, un an plus tard ? Ce n’est pas à la transition seulement de répondre à cette question mais c’est tous ensemble que nous devons le faire. Le temps passe rapidement. Il y a beaucoup à faire en matière électorale, de réformes politiques et institutionnelles. A ce niveau, on a besoin de ressources humaines compétentes au double plan technique et moral.

Ce ne sont pas les bavardages. Que faire pour éradiquer par exemple la fraude et la corruption électorale ? Quel mode de scrutin ? Il faut rationnaliser les collectivités territoriales et renforcer leur autonomie ? Par exemple, il faut arrêter de faire dépenser l’Etat en produisant des cartes d’électeurs inutiles alors qu’il est prouvé que la CNIB suffit pour voter etc. Il faut subventionner l’accès gratuit à la CNIB pour ceux qui ne l’ont pas jusque-là, ça revient moins cher que de produire les anciennes cartes d’électeurs. J’ai entendu dire qu’il faut faire un référendum et après les élections.

Ce n’est pas une bonne idée pour un pays qui n’a pas suffisamment de ressources. En un seul jour, les électeurs peuvent voter pour le référendum qui est un exercice très facile, et pour les scrutins présidentiel et législatif. Un mois après, on organise les municipales. Tout cela requiert du savoir et du savoir-faire, c’est une science. Il faudrait que le gouvernement actuel ait la modestie de se tourner vers les personnes qui maîtrisent tout cela pour inscrire notre pays dans une stabilité durable. Et tout cela peut se faire dans le temps recommandé par la CEDEAO ».

Moussa Zerbo, porte-parole par intérim de l’Union pour le progrès et le changement (UPC)

« Au niveau de l’UPC, nous avons trouvé la durée de 24 mois assez raisonnable pour la simple raison qu’au départ, nous-mêmes avons souhaité que ces mois courent à partir de la date du coup d’Etat, maintenant que ça commence en juillet, dans tous les cas, nous nous disons que c’est toujours raisonnable, mais que les autorités en place sachent raison garder pour se conformer à cet agenda-là.

Deuxièmement, il faut saluer aussi la magnanimité de la CEDEAO qui n’a pas eu la main lourde concernant le Burkina et qui a trainé aussi pour ne pas prendre des sanctions contre un pays déjà en difficultés. Parce que le pays est très fragile en matière de sécurité et d’économie. Là où nous sommes, nous vivons d’énormes crises (économique, sanitaire, etc.), donc vous imaginez un instant si la CEDEAO avait eu la main lourde, je pense que ça aurait été pour asphyxier le pays.

Moussa zerbo de l’UPC, secrétaire général national par intérim et porte parole de l’UPC.

En tout cas pour nous, il est plus que temps qu’au bout de 24 mois, l’accent soit mis sur l’aspect sécuritaire, parce que c’est ce qui a justifié le coup d’Etat et pour nous, il n’y a pas de raison qu’au bout de ces 24 mois, on n’ait pas la sécurité, toute chose qui pourrait nous permettre de renouer avec l’ordre constitutionnel normal en allant aux élections.

Certains semblent dire que les politiques ont des yeux rivés sur les élections, non, loin sans faut, il faut justifier un ordre constitutionnel normal pour qu’on puisse fonctionner. La différence, c’est quoi ? Aujourd’hui, nous sommes dans un Etat d’exception, mais quelle est la différence d’avec la période dite constitutionnelle ? Moi je ne vois pas, parce que nous avons toujours les lots de morts, les mêmes catastrophes humanitaires que nous vivons, donc il y a lieu vraiment d’un recadrage des choses pour que nous puissions aller de l’avant ».

Yvette Zongo
Erwan Compaoré
Lefaso.net

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