Actualités :: Matériaux de construction au Burkina Faso : Il est temps de faire un grand (...)

A peine la saison des pluies a commencé à s’installer au Burkina Faso, entrainant la joie des agriculteurs, que malheureusement l’installation de cette nouvelle saison inquiète et pour cause. Des constructions, notamment les écoles réalisées à coût de millions voire milliards de F CFA s’écroulent comme des châteaux de cartes. Comment cela peut-il s’expliquer, quelle est la qualité du matériel, quelles sont les structures habilitées à contrôler la vente de ce matériel et la réalisation des ouvrages ? Ce sont autant de questions que l’on pourrait se poser à travers les recherches entreprises par notre équipe, afin de comprendre les causes de ces chutes. La découverte d’un secret de polichinelle dans le milieu du BTP, celui notamment de la qualité du fer à béton au Burkina Faso qui met en danger des milliers de citoyens et le développement du pays.

Qu’est-ce que le fer à béton ?

La réalisation d’ouvrage de tous types nécessite un apport en matériaux de constructions comme le ciment, le bois, le fer particulièrement le fer à béton.

Le fer à béton, également appelé barre d’armature est, comme son nom l’indique, principalement utilisé pour le renforcement du béton, lui donnant un caractère « armé ». Il est essentiel au renforcement du béton pour des constructions solides et durables. Il est produit à différents diamètres (6-8-10-12-14-16-20-25-32 mm) selon les normes internationales et nationales qui régissent les propriétés chimique et physiques du fer, tel que la tolérance du poids par mètre d’une barre et donc son diamètre réel et sa longueur.

La situation au Burkina Faso

Au Burkina Faso, les récentes pluies qui se sont abattues sur le pays ont mis à nu les infrastructures réalisées à coup de millions, voire milliards F CFA aux frais du contribuable. Ainsi, on dénombre 170 bâtiments publics dont les cas du collège de Soala, avec les images qui ont fait le tour de la toile présentant le toit décapé. Dans la région des Hauts-Bassins, une école s’est effondrée tuant des élèves en pleine composition. Au regard de tous ces drames à qui la faute ?

Au pays des hommes intègres la réalisation d’ouvrage est régie par une règlementation très rigoureuse, mais avec une application qui laisse à désirer. En effet, l’utilisation des matériaux de construction répond à des exigences mises en application par l’Agence Burkinabé de Normalisation, de la Métrologie et de la Qualité (ABNORM) avec son département normalisation et certification. Cette direction est sensée contrôler, vérifier et autoriser la présence de tout produit sur le marché public destiné à la grande consommation comme le lait, l’huile, le sucre et le fer à béton.

Cependant l’on constate que le produit sur le marché pose de graves préoccupations. En effet, les analyses pratiquées sur les différentes qualités de fer présents et vendus au Burkina Faso révèlent que la quasi-totalité du fer trouver sur le marché est dangereusement illégal. Les diamètres sont bien inférieurs aux normes en vigueurs. Ainsi, le fer de 6mm est en réalité du fer de 4.2mm, le fer de 8mm est égal à 5.6mm, celui de 10 à 7mm ; le 12mm à 8.5mm ; etc. Cet état de fait permet aux commerçants et producteurs de diminuer leurs coûts c’est-à-dire, en réduisant la masse linéaire du fer et donc de faire du profit sur le dos du client. Cette situation constatée sur le terrain doit interpeller au regard du non-respect des normes.

Qu’est ce qui peut expliquer cela ? En effet, en permettant aux commerçants ayant importé le fer à béton de mauvaise qualité à prix réduit du Ghana et du Togo, afin de concurrencer celui issu de la production nationale, ne crée-t-on pas un phénomène de spéculation incontrôlée sur le marché du fer à béton au Burkina Faso ? A-t-on le droit de mettre en danger des vies au profit du gain ? Sinon comment comprendre que le fer à béton qui est importé au Burkina Faso ne soit pas interdit. Qualifié de fer dit « économique » par les revendeurs sur la place publique, celui-ci ne doit-il pas être aussi soumis à la législation nationale ? Alors pourquoi un tel silence, une négligence ou absence de réaction des acteurs de contrôle de l’Etat par rapport à ce phénomène. N’est-il pas la conséquence de la production du fer de mauvaise qualité par les entreprises et sociétés locales poussées de suivre ces importateurs dans la baisse des prix, mais surtout de la qualité du fer afin de rester compétitif sur le marché.

Les dernières chutes ou dégradation de bâtiments se chiffrent à 170 selon le ministère des infrastructures. Un constat qui semble étonné plus d’un dans certains salons feutrés de notre pays. Cependant, comment peut-on l’être, si l’on se retrouve avec la quasi-totalité des infrastructures publiques ou privées du pays qui ont été construites avec du fer à béton de qualité alarmante. L’effondrement des édifices ne devient alors qu’une question de temps, mettant ainsi en danger des millions de vies humaines comme nous l’avons constaté avec l’écroulement des différentes écoles ces derniers temps.

Fer à béton

La solidité des infrastructures carton : A qui la faute ? interpelle comme a su le relever Sayouba Traoré dans sa réflexion parue à lefaso.net. En outre, cette inondation du marché local de fer à béton de mauvaise qualité n’entraine-t-elle pas sérieusement un ralentissement du développement économique du pays des hommes intègres. En effet, comment les entreprises locales pourront-elles rester compétitives et faire faces aux exigences fiscales si les règles sont biaisées au départ. Comment le Burkina Faso pourra-t-il amorcer son développement si des infrastructures de mauvaise qualité doivent être reconstruites régulièrement à l’image de ces écoles, et routes délabrées avant réception des ouvrages ?

Infrastructures de mauvaise qualité, à qui la faute ?

Premiers acteurs d’une longue chaine qui ne doit laisser personne indifférent, les commerçants et producteurs sont la partie visible de l’iceberg. En effet, s’ils ne font que s’adapter aux conditions du marché, le recours à l’application de la mauvaise pratique pour la recherche effrénée du gain ne doit pas être au détriment de la vie des clients. Cependant, les vrais responsables de cette situation ne sont-ils pas les structures de règlementation, de contrôle de l’Etat pour n’avoir pas réagi aux importations frauduleuses de produits de mauvaise qualité. Ne doit-on pas avoir plus de rigueur, de célérité de la part des services compétents pour réprimander toutes tentatives de fraudes.

Que fait l’ABNORM dans le suivi et l’application des produits intervenants sur le sol burkinabè. Le laboratoire des travaux publics ne devrait-il pas être plus impliqué dans le processus des constructions d’ouvrage. Le gouvernement notamment le ministère des infrastructures et celui du commerce doivent réagir pour mettre fin à un tel phénomène. En outre, la ligue des consommateurs ne devrait-elle pas également s’impliquer sur un tel sujet pour l’intérêt de ses membres.

Face à l’ampleur d’un tel phénomène, la sonnette d’alarme mérite d’être sonnée si l’on ne veut pas se retrouver chaque année avec des effondrements de bâtiments entrainant des pertes en vies humaines. Ainsi le gouvernement devrait passer à l’action en étant plus ferme et en accordant aucune tolérance à la commercialisation illégale au niveau nationale du fer à béton et de tous d’autres produits. L’Etat devrait instaurer des contrôles et sanctions adéquates à tous contrevenants, particulièrement aux produits importés. Dans le cas du fer, sanctionner tous les acteurs de la chaine, des commerçants aux producteurs, pour la mise en circulation du fer de mauvaise qualité et obliger ces derniers au marquage du fer, afin d’assurer sa traçabilité.

Daoud Ouédraogo

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