Actualités :: Nouveau gouvernement burkinabè : Quand un vieux car prend une nouvelle (...)

Rien de nouveau sous le soleil, disent les progressistes ou les rêveurs. On ne change pas une équipe qui gagne, disent les partisans et les inconditionnels de la continuité. Et entre ces deux groupes, la question qui se pose et la plus essentielle est celle-ci : que gagnent les populations burkinabè ? Enfin, l’attente a été longue et l’attentisme est devenu la nature de Roch Kaboré. Cet homme n’est jamais pressé. Le temps lui appartient. Il en est le maître. Presqu’une semaine après la nomination du Premier ministre, Roch Kaboré a dévoilé le 10 janvier 2021 la liste des membres de son gouvernement.

Il n’y a pas de grands changements. Beaucoup de ministres ont conservé leurs postes. Les ministères dits de souveraineté reviennent aux fidèles du président : la Défense, les Affaires étrangères, les Infrastructures, l’Education. Le président Kaboré a reconduit ses fidèles lieutenants dans tous ces ministères pour s’assurer que rien ne va lui échapper. Quelques nouvelles têtes arrivent dans quelques ministères. Et elles sont nombreuses qui sont membres du MPP ou très proches du parti.

En clair, Roch Kaboré étant à son dernier mandat, le parti reprend le contrôle de l’exécutif, et certainement dans le but de préparer le successeur de Roch Kaboré. Rien n’est fait au hasard. Les ministères sont de véritables tremplins pour la conquête du pouvoir. Et le président Kaboré veut préparer un membre de son parti pour sa succession. S’il peut travailler avec des partis politiques comme l’UNIR/PS, l’UPC, le NTD et autres, il ne veut aucunement que le pouvoir tombe dans l’un de ces partis en 2025. Il prépare la relève qui viendrait du MPP et la composition du gouvernement le prouve bien.

Ce qui est aussi remarquable, c’est l’arrivée de Maître Sankara dans le gouvernement. Cet homme quitte donc la première vice-présidence de l’Assemblée nationale pour le ministère de l’Habitat. Il prend un ministère à problèmes qui cristallise les passions, et je pense qu’il mesure tous les enjeux et les défis à relever. Il s’agit pour lui de relever de grands défis ou de tomber dans les méandres des divisions et des luttes de classes. Toutefois, il est difficile de dire que l’UNIR/PS sort perdant dans ce gouvernement.

Zéphirin Diabré et le plus petit morceau de la viande de l’éléphant

S’il y a un homme qui se contentera du plus petit morceau de la viande de l’éléphant, c’est bien Zéphirin Diabré. Après Blaise Compaoré, voilà un autre déçu de la politique burkinabè. Blaise a été trahi par ses fidèles et Zéphirin a été trahi par le peuple burkinabè. Aujourd’hui, il se retrouve dans un gouvernement où il occupe le plus petit poste avec un titre honorifique et à la limite ridicule. Zéphirin, il faut le dire, n’est presque rien dans ce gouvernement.

C’est comme si le MPP a eu pitié de lui, c’est comme s’il s’agit de consoler cet homme qui a beaucoup rêvé et qui voit ses rêves et ses ambitions se fondre comme un château de cartes. Zéphirin se chargera de la réconciliation nationale. Quelle réconciliation nationale ? Il aura toute la journée pour se tourner les doigts dans son cabinet, oisif, rêveur et contemplant les carreaux de son luxueux bureau. Et c’est pratiquement le dernier coup de poignard qu’on donne à Zéphirin et à son parti. Il n’y a pas de pitié en politique.

Ce n’est pas le domaine des sentiments, de la morale et de la droiture. La politique est vulgaire et cynique. Zéphirin se retrouve donc à servir, sinon à ramasser les plats du déjeuner du président Kaboré sans être dans le gouvernement. Son ministère fait figuration. Son personnel est composé de lui-même, de son chef de cabinet et peut-être d’un garde du corps. Roch veut s’assurer que l’UPC, le parti de Zéphirin est bien mort.

Enfin, c’est un gouvernement qui vient tuer l’opposition. C’est le plus grand danger qui nous guette maintenant. L’accord des grandes intelligences, c’est l’accord de la déraison pour la défense des intérêts individuels, égoïstes et mesquins. Que gagnent des hommes qui applaudissent chaque jour ceux qui les gouvernent ? Le mal comme le bien deviennent la norme, la règle, la logique puisqu’il n’y a personne pour dénoncer le mal.

Le Burkina se retrouve dans un consensus qui tue la démocratie, les différences et qui fait reculer l’espoir. Les passions, les amitiés et les émotions prennent ainsi le dessus sur l’intérêt national et l’avenir de la Nation. Espérons que la nature ayant horreur du vide, elle se chargera de réguler tout cela et il se pourrait que dans les années à venir de grandes fractures politiques se font voir dans ce grand corps politique qui semble, pour le moment, avoir les ovations de la majorité des hommes bien.

Personnellement, je préfère la prudence. La route est nouvelle, mais la locomotive est assez vieille et le conducteur bien qu’expérimenté manque de souffle, de vivacité et de dynamisme. Il m’est difficile de croire que ce tacot ainsi bricolé résistera aux intempéries, aux secousses et aux nombreuses tribulations de la part des hommes. Le consensus sans grand bruit est généralement le début latent de la révolte. Se taire, ce n’est pas être d’accord avec les autres.

Adama Amadé SIGUIRE
Écrivain Professionnel
Consultant en relations humaines.

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