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Fada N’Gourma : Deux rois pour le trône du Gulmu

13 mai 2020, 01:27, par Mechtilde Guirma

Pour les observateurs avisés, ce n’est point une surprise au Gourma. La manière dont les deux derniers rois du Gulmu notamment Yoabili et Kupendieli ont dirigé le royaume en dit long. C’est à partir de leur règne qu’il y a eu beaucoup de division au niveau des chefferies des autres localités du Gourma. Kupendieli s’est illustré de façon négative dans la gestion des chefferies de Diabo,

@ Observateur avisé,

Vous avez bien décrit la gestion calamiteuse du Kupiendiéli sur les chefferies de Diabo. Je n’ai pas eu la chance de suivre cela, étant donné que son règne a commencé après que j’aie déjà quitté le Burkina. Mais je me rappelle (et j’ai suivi cela dans la presse) que lors de son intronisation, il avait promis ferme de rester neutre sans aller dans un parti politique. La suite, nous tous on la connaît maintenant. Ce qui est sidérant, c’est que quand un roi manque à sa parole vis à vis de Dieu, des Hommes et des Ancêtre on ne devrait pas mieux attendre que ce qui ce passe au Gouma.
Quant au Yoabli, après l’avoir pointé du doigt, vous vous taisez. Eh bien moi j’ai autre chose à dire :
Comme je l’ai déjà exposé dans d’autres forums, c’est moi qui me suis occupée de l’investigation sur l’Église catholique et la chefferie coutumière pour le service de la décentralisation au temps d’Antoine Raogo Sawadogo. C’est ainsi que j’ai pris rendez-vous avec le Yoabli et voilà ce qu’il m’a dit en résumé :
« Puisque vous me faites l’honneur de me consulter, voilà ce que je pense : Pour une bonne démocratie, il faut l’indépendance totale de la chefferie coutumière. Pour cela, il lui faut un statut. Ainsi le statut leur permettra de se concerté en cas de besoin pour la bonne cause du pays auprès du gouvernement et il y en a beaucoup à faire : la garde territoriale et forestière, éviter l’anarchie de la question de la terre, autrement si la terre nous est confisquée, il n’y plus de patrie. Plus de coutume, plus de tradition. Nous connaîtrons de nouveau le sort qui était le nôtre, lors de suppression du territoire de la Haute-Volta ». Et il a ajouté : « Vous voyez lorsque le blanc a compris que la chefferie traditionnelle était importante alors il l’a utilisée dans ses rôles spécifiques de cohésion et solidarité pour développer notre pays. Mais comme vous l’avez vu aussi, c’était pour la cause du colonialisme, c’est pourquoi il nous a accordé tout au plus un syndicat et non un statut. Aujourd’hui nous revendiquons donc un statut qui nous réunisse pour épauler le gouvernement dans son action du développement du pays ».
Plus tard en m’entretenant avec d’autre Rois du pays notamment le Bobo mandaré et ses confrères régionaux, ce fut les mêmes revendications.
En zone moagha notamment, on m’a donné plus d’information sur la coopération avec le système colonial : « Regardes, m’a-t-on dit, lorsqu’un crime était commis dans le pays, chaque roi réunissait (kunga) ses sujets et donnait l’information afin de retrouver le malfaiteur. Et cela se faisait en un rien de temps et on le remettait au service judiciaire qui était, avouons le, très fort à l’époque. De même dans les questions de grands travaux : Construction, route, maisons etc. c’était dans la cours royale que les tâches étaient reparties entre groupe : les yonyonsé, les saâmba, les peulhs, les yarsé, les marensé, le groupe des princes etc., chacun avait son rôle et sa partition à apporter pour la cause commune ».
Sa majesté Yoabli avait évoqué en effet le sujet et avait conclu de la façon suivante :
« Vous voyez donc l’ironie du sort, si nous avons tant fait pour le blanc pourquoi aujourd’hui sommes-nous incapables d’avoir les mêmes résultats pour nous-mêmes dans la cohésion et la solidarité ? ». Une telle question posée par un roi contient en même temps la réponse que chacun reçoit dans son cœur comme par télépathie avec le roi lui-même : « parce que les parties politiques ont divisé les chefs coutumiers ». Pire d’autres ne veulent pas entendre parler de statut sous prétexte qu’il n’apporte rien d’engagement à la vie politique. Tout en oubliant aussi qu’en cas de désacralisation, le roi doit aussi savoir s’assumer.
En tout état de cause, beaucoup conviendront avec moi, qu’en effet :
Le pays doit approfondir les réflexions et privilégier davantage les espaces de dialogue. Il faut un nouveau contrat social, les Burkinabè doivent se prononcer sur ce qu’ils veulent d’ici cinq à dix ans. Il faut nourrir les relations de confiance pour une relance économique de qualité » (Madame Metsi Makhetha, coordonnatrice du système des Nations-Unies au Burkina-Faso, Ouagadougou, le 9 avril 2020).


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