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La nouvelle devise de « sages » du Burkina : la repentance ou la mort !

11 février 2020, 03:08, par caca

Le Vigilent,
Tant pis si le groupe des sages de manéga regrettent, la feuille de route n’est pas un préalable à salut. La réconciliation nationale est bien vitale et la survie de notre pays. Mais la paupérisation du sacramentel est une profanation. Qu’il y a des groupes multi-conformes qui demandent la réconciliation est une chose, mais des individus se réclamant sagesse imposent leur point de vue est une autre affaire. Dans sa Philosophie du droit, Hegel parle de réconciliation. Il assigne à la philosophie politique la mission de « la réconciliation » ; « philosophie comme réconciliation ». Mais il utilise le terme « réconciliation » (Versöhnung, en allemand) dans d’un contexte d’une critique qu’il adresse à Emmanuel Kant sur la dichotomie que la pensée de ce dernier crée entre l’autonomie (liberté) individuelle et le bien de l’État (au sens moral du terme : Sittlichkeit).
La tâche de la philosophie politique, selon Hegel, consisterait à montrer que la véritable liberté de l’individu ne se réalise dans l’État que par le biais de ses structures politiques, économiques et autres. C’est ce processus d’intégration de la liberté de l’individu dans l’État que Hegel appelle « Versöhnung ».
Philosophiquement, et comme on peut en remarquer chez Hobbes et Hegel, le thème de la réconciliation est abordé dans un sens qui est loin des préoccupations des débats actuels sur la réconciliation dans notre société post-insurrectionnel conflit /violence, quand bien même il y aurait moyen de tirer, par exemple, de la notion de la « réconciliation hégélienne » des conséquences utiles sur les rapports individu-État dans la société moderne.
Même du côté de la philosophie morale que l’on peut considérer comme la philosophie ancillaire à la philosophie politique, l’on aboutit à un même constat : la réconciliation est un thème rare dans les grands traités classiques de philosophie morale. Considérons, à titre d’exemple, deux auteurs classiques : Aristote et David Hume. Dans son Éthique à Nicomaque, Aristote établit une liste des vertus morales qui doivent aider les individus à mener une vie bonne dans la polis. Parmi les douze vertus morales mentionnées dans le livre V de l’Éthique à Nicomaque, nulle part n’apparaît le mot réconciliation. Il en est de même de David Hume dans son Enquête sur les principes de la morale. Le thème de la réconciliation n’apparaît nulle part dans le catalogue qu’il présente d’environ dix-huit « qualités immédiatement utiles à nous-mêmes et aux autres » pour bien vivre dans la société.
Ainsi, la philosophie politique classique reste silencieuse sur le thème de la réconciliation. Pourquoi donc ce silence ?
Une des explications plausibles de ce silence tiendrait à la nature du thème lui-même. En effet, le sujet de la réconciliation est un thème qui est empreint d’une forte connotation religieuse, et surtout lorsqu’on parle de réconciliation sont également sous-entendues les notions de pardon et de conversion des cœurs. Cependant, en philosophie politique, la question de la réconciliation est étroitement liée à celle de la justice. Celle-ci est le moyen par excellence pour réconcilier les individus entre eux et aussi les peuples ou les nations entre eux.
Dans un autre ouvrage, « Le droit des gens », Rawls développe les principes de justice devant réconcilier les nations du monde. C’est dans ce contexte que Rawls déclare que la justice est la « première vertu des institutions sociales » si l’on veut promouvoir la paix et la stabilité sociales. On comprend aussi sans doute pourquoi Aristote et, à sa suite, St. Thomas d’Aquin avant Rawls ont déclaré que la justice est la « mère de toutes les vertus » ; en elle, se résume toutes les autres vertus. Autrement dit, sans justice, toute autre vertu n’aura pas de sens, y compris la réconciliation. Par contre, grâce à la justice, les autres vertus sont données par surcroît.
En outre, la proposition des "sages de Manéga" n’apparait aucune notion de justice. J’ai des préférences de la position de la coder avec sa justice transitionnelle que celle des sages. La justice me semble cet « ingrédient » qui donne confiance pour bâtir des relations stables. Voilà pourquoi la réconciliation peut être considérée comme la fille de la justice. Celle-ci fonde celle-là en amont et en aval. Mais la justice classique a aussi montré ses limites au Faso avec le procès du putsch manque.
Au Burkina, nous avons certainement un besoin vital de réconciliation, mais une réconciliation de cœur d’abord et non financière. La proclamation de la journée nationale du pardon avait l’objectif du vivre ensemble entre burkinabé dans une société avec des valeurs démocratiques. Les démarches de pardon avaient été effectués dans les familles victimes des règlements de compte depuis les indépendances. Hélas, cette réconciliation avec le pardon et une contrition publique avec les présidents vivants de l’époque n’a pas non plus empêche l’insurrection avec ses violences. Le gouvernement de la transition avait sa commission de réconciliation nationale comme politique ainsi que le pouvoir actuel. Pour ce pouvoir actuel cette réconciliation nationale doit passer le case de la justice classique que l’état même n’est pas responsable pour la prise en charge financière des victimes.
Aujourd’hui avec le terrorisme dont l’implication des burkinabé contre des burkinabé. La stigmatisation des ethnies des communautés facteurs des divisions raciales, les règlements de compte politique qui continuent en beauté, cette réconciliation nationale qui attelle une contrition publique des acteurs insurgés et le gouvernement déchu ne peut ramener aucun grain de paix.


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