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Décentralisation : Les expériences suisse et allemande inspirent les Burkinabè

28 juillet 2019, 17:11, par Mechtilde Guirma

« Au regard des leçons apprises lors du voyage, le chargé d’affaires à la coopération allemande au Burkina Faso Nils Wortmann, a estimé que cela devrait « permettre à la délégation de réfléchir sous des angles nouveaux au processus de décentralisation et de lui permettre d’avoir une influence constructive sur les réformes stratégiques et opérationnelles en cours au Burkina Faso ». Il a dit espérer que les résultats de ces échanges apportent une pierre à la responsabilisation accrue des collectivités territoriales ».

Absolument Monsieur le chargé d’affaires à la coopération allemande au Burkina-Faso, Hern Nils Wortmann.

Bien sûr s’inspirer des autres, c’est bien. Mais il ne faut pas que le Burkina oublie que ces pays vivent des siècles de vraie démocratie. Et qu’avant que le Burkina ait des universités, ses ressortissants ont d’abord fréquenté les universités de ces pays. Et c’était l’époque où, l’Eurocommunisme se démarquait de la radicalité du communisme pur et dur de l’URSS pour se trouver des repères plus européens. Et ces universités, fidèles à leur option du « libre-examen » (l’Université Libre de Bruxelles par exemple) contre le « conservatisme » de l’Église catholique vis à vis des cultures des pays dits « en voie de développement », et face à un féminisme radical de l’Occident, ces Universités se sont inscrites en contre-courant pour prévenir l’Afrique de ce qui pouvait leur arriver dans le futurs. Elles étaient donc des prophètes des temps nouveaux. En effet à chaque discipline (plus de 80 condensées en 4 ans), il y avait un professeur de droite radicale, un du centre et un de gauche radicale.

Pour ce me concerne, ce ne sont pas mes 5 ans en Allemagne, comme épouse de l’ambassadeur de mon pays, ni mon transit d’une semaine à Genève en 2013 en route pour rejoindre le Canada, mais mes études à l’Université Libre de Bruxelles en Sciences Politiques et Relations Internationales qui me poussent à réagir. En effet j’y ai défendu mon mémoire avec distinction parce que j’avais travaillé sur « le rôle de la femme dans la vie politique des sociétés africaines des structures traditionnelles aux les structures modernes », en visant le cas des mossi comme monographie en Afrique de l’Ouest, où le royaume moagha est généralement vu comme féodal. Nos professeurs n’avaient de cesse de nous exhorter, nous les africains surtout africaines à utiliser nos propres repères pour construire notre pays. Pour cela ils avaient fortement appuyé l’idée de l’inculturation et du dialogue inter-religieux émise par le Concile du Vatican II, alors que de grandes congrégations étaient contre et qualifiaient d’hérésie l’introduction de l’inculturation dans l’Église. Ils nous avaient prévenu(e)s que si nous étions venu(e)s à l’Université pour résoudre un problème personnel, ce n’était pas la peine d’y rester. Mais si c’était pour aider à l’équilibre du monde et au développement de nos pays, ils étaient prêts à nous outiller. Ils nous avaient prévenu(e)s encore que nous allions traverser des moments de persécution, car les mentalités mettaient des décennies pour changer. Mais les sciences politiques, affirmaient-ils en revanche, étaient les sciences les plus nobles. Bref c’est pour dire que ce fut avec ces mêmes outils qu’en 1995, j’ai produit le rapport sur le travail qui m’avait été confié pour la décentralisation à savoir : « l’investigation sur les coutumiers et l’église catholique » (et par voie de conséquence l’Islam et le protestantisme) comme « Pouvoirs Politiques locaux ».

C’est ainsi que j’ai posé comme pistes de réflexion, qu’étant donné, que les coutumes et les religions formaient ainsi la trame familiale et nationale de notre pays, il fallait les prendre de façon intégrale dans notre processus de démocratie, puisque c’est de cette base que le développement se tracera à partir des activités économiques et sociales. Pour cela il serait injuste de les écarter des instances où se prennent les décisions politiques et où ils ne sont, pour le moment, que de purs objets et non aussi sujets de droit. Alors pourquoi donc tout confier aux partis politiques ? Pourquoi ne pas confier les collectivités aux terroirs d’où les conseillers municipaux et autres seront issus, mais sans pour autant couper le lien entre la centrale et les régions, en laissant les gouvernerais aux partis politiques pour le dialogue entre la masse et le pouvoir central ?

Presque vingt ans après, à la rencontre de Rougemont en 2013 (une rencontre mondialement connue sur les questions de la démocratie en Afrique précisément), en m’entretenant avec le délégué Suisse, j’ai remarqué qu’à quelques nuances près, mes propositions pour le Burkina avoisinaient le système suisse. Puis en 2015, lors des débats, j’ai renouvelé mes contributions.


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