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Réformes du système éducatif burkinabè : « Faiblesse du niveau d’instruction, et inefficacité de notre système éducatif… »

22 août 2016, 18:38, par Sidpawalemdé Sebgo

Bel article. Cependant, si nos élus, après avoir été vagues et pratiqué la langue de bois dans les discours et programmes, se décident à passer à des actes forts, il faut je crois s’en féliciter et non revenir sans cesse sur le fait qu’il n’ont pas "annoncé" ces actions.
Cependant, sur la base de ce que nous avons vu ces dernières années avec nos anciens-nouveaux dirigeants, les actions d’envergure ont toujours nécessité de réunir deux conditions : Un "porteur de projet" fort politiquement et un processus immuable, pas toujours précédé de "grands-messes" médiatiques.

1°) Le coton OGM de MOSANTO a été introduit au Burkina parce qu’une personnalité forte du pouvoir l’a voulu. Le projet de développement du primaire PDEB a été possible parce que les premiers responsables le voulaient. La SONABEL et la SONABHY sont dans leur situation actuelle parce que de hautes personnalités ont décidé de bloquer les prix pour des raisons politiques sans proposer de modèle économiques pour la survie de ces sociétés. Les polices municipales sont devenues une réalité et celle de Ouagadougou une force parce qu’un certain tout-puissant maire l’a voulu. Il en est de même du découpage actuel des régions, des provinces et des arrondissements. Bref, si vous voulez qu’une initiative ou une réforme aboutisse, il fut lui trouver un "parrain" politique "fort".

2°) Quand une chose a été décidée en "haut lieu", on élabore rapidement un projet, dans ses grandes lignes. Le plus souvent les détails sont complétés au fur et à mesure. Ce projet est présenté aux bailleurs de fonds comme une priorité du pays, et évidement les financements sont acquis. Vient ensuite la période des grands travaux d’infrastructures et l’acquisition d’équipements à coup de centaines de milliards, puis le recrutement massif d’agents. A ces stades, bien sûr, le politique ne peut s’empêcher de privilégier ses "amis" dans les marchés et ses "petits" dans les recrutements, sans compter les "je retiens" pour "renforcer la base économique" et "financer les activités du parti". Mais passons...
Pour illustrer ce processus, on peut donner des exemples récents :
i) Le projet de réforme de la fonction publique dans les années 80/90 n’a pas eu besoin "d’états généraux". Une fois la décision prise, (avec pour objectifs bien clairs de pouvoir contenir la masse salariale en se séparant des contractuels en cas de difficulté de trésorerie de l’état !) la conception de ce qui est devenu la loi 013 a été confiée à des experts consultants qui ont rendu leurs devoirs. Les amendements politiques faits, c’est passé à l’assemblée pour "enregistrement" et le travail "d’explication" aux travailleurs et syndicats est venu bien après !
ii) Les projets successifs de renforcement de la justice depuis les années 90 qui ont permis de construire des dizaines de palais de justice et de maisons d’arrêt, de recruter plus de magistrats et de former plus d’avocats ne sont connus à ce jour que de quelques initiés et n’ont pas eu besoin de tapage médiatique préalable.
iii) Le projet de renforcement des force de l’ordre, déployés pendant les cinq à sept années précédant 2015 a vu un équipement et un recrutement de policiers et gendarmes inégalé. Malheureusement les éternels détournements n’ont pas manqué, et l’essentiel de ces efforts, au lieu d’aller à la sécurité des personnes et des biens, a été orienté vers les priorités des décideurs et bailleurs, c’est à dire la sécurité du régime, la répression des manifestations et la lutte contre le terrorisme.

Toutes les grandes actions au Burkina de ces dernières décennies ont suivi ce processus, et souvent c’est à un stade avancé que le grand public a découvert le projet.

Or, que constatons-nous pour l’enseignement post primaire, secondaire et supérieur ? L’absence de "parrain" politique qui s’engage fortement et obtienne que l’appareil d’état, le ministère des finances, la coopération, les affaires étrangères etc se mettent en branle pour réaliser la réforme. Une navigation à vue, faite de micro-projets financés et exécutés ponctuellement, des actions de recrutement ponctuelles et de faibles effectifs, des crises à répétition "gérées" par des concessions à minima et des promesses rarement tenues, des séminaires, assises, états généraux et autres réunions nombreuses, longues et prolifiques finissant sur des propositions peu réalistes, minimalistes et jamais mises en œuvre. Cette dernière manifestation ressemble plus à une action pour montrer au grand public l’existence du groupe des "universitaires et experts associés" du MPP qu’à un début d’action.

En conclusion donc, Si Roch Kaboré, Salif Diallo, Paul Tiéba, Filiga Sawadogo ou le MPP décident VRAIMENT de réformer le système éducatif, ce ne sera pas en commençant par de grandes réunions comme celle de ce week end. Ni en obtenant quelques ordinateurs ou Amphi de tel ou tel partenaire. Ils feront un gros projet pluriannuel comme celui de l’aéroport de Donsin ou le barrage de Samandéni ou encore la réforme du système judiciaire, et rechercheront les financements qui vont avec. Leurs "experts" seront consultés en interne, généralement avec contrat de prestation intellectuelle. A quand donc le début de ce processus ?


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