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Alternance... vous avez dit « alternance au Burkina Faso » ? Non merci !

4 décembre 2015, 15:13, par BMF

Intérêt de l’article :
Cette posture analytique de ce qui passe (ou entrain de se passer) au Burkina a juste le mérite de contribuer à alimenter le débat, mais tout esprit critique peut déceler que les postulats et questions posés ne permettent de tirer des conclusions pertinentes ou utiles pour le problème burkinabè (je suis burkinabè, je n’ai pas voté pour M Kaboré, j’appelle de tous mes vœux des changements profonds dans la gouvernance de mon pays).

Des questions et postulats à revoir :
Votre postulat de base qui veut qu’on soit d’accord avec vous que l’alternance démocratique (pas la rotation démocratique) souhaité par les burkinabè ne puisse pas être portée par des personnes comptables d’une manière ou d’une autre du système Compaoré est fort discutable (pour être plus courtois, sinon chaque postulat on le sait est discutable). Partagé ce point de point de vue, c’est accepter qu’il n’existait aucune contradiction, aucune divergence d’opinion entre les acteurs du système. Ceci est difficilement concevable, les arrangements ou concessions qui font fonctionner les partis politiques ici comme ailleurs ne signifiants absence de divergence. Au Burkina Faso, ces divergences au sein du système Compaoré se sont exprimées ouvertement entre les ténors en 2008 avec Salif Diallo (n°2 ou 1 du MPP, c’est selon). La césure importante intervint en 2014.

S’il faut donc critiquer ou réfuter la thèse que les évènements des 30 et 31 octobre 2014 sont une soif du peuple burkinabè à l’alternance démocratique, ce n’est pas par les individus, mais par les systèmes et pour cela, il faut que l’analyse porte, après le programme que M Kaboré a proposé aux Burkinabè, sur le système qu’il mettra en place. Y’aura-t-il une rupture avec le mode de gouvernance (corruption, fraude, favoritisme, crimes, impunité, ...) que les burkinabè ont décrié et refoulé ? Cette posture aurait eu le double mérite d’accorder à M Kaboré le bénéfice du doute et d’aller dans le sens de baisser la tension actuelle pour aider la nécessaire réconciliation nationale. C’est peut être au delà des considérations ethniques (M Kaboré n’était d’ailleurs pas le seul mossi en liste et il n’est arrivé en tête seulement en zone moaga), ce bénéfice du doute que les burkinabè ont accordé à M Kaboré après son mea-culpa. Ils peuvent s’être trompés, mais cela ne signifie pas qu’ils ne savent pas ce qu’ils veulent ou qu’ils n’ont pas soif de réels changements. Rien ne dit que ce changement était assuré avec un autre candidat.

Pour une analyse tenant compte de la globalité et de la complexité du contexte burkinabè :
Pour analyser en profondeur ce qui s’est pas au Burkina Faso et se poser de bonnes questions, il faut éviter toute démarche ou attitude réductionniste des évènements des 30 et 31 octobre 2014 et tout ce qui s’en est suivi, y compris les changements apportés dans le code électoral. Faire l’économie d’une analyse plus globale d’un contexte complexe, dont l’ambition du régime Compaoré de modifier la clause limitative des mandats présidentiels n’a été que le goutte d’eau qui a fait déborder le vase, ne peut qu’aboutir à des conclusions tronquées. Dans ce sens qu’il ne faut pas très vite remettre en cause le génie du législateur intérimaire (ne rabaissons pas le débat avec les questions de légitimité). Le politique comme vous le soulignez doit gérer des intérêts contradictoires et aboutir à un équilibre, qui reste dynamique mais défini à chaque moment. Entre des intérêts individuels (les personnes exclues et non leurs partis politiques) et la paix sociale, le législateur a pris des mesures qui ont abaissé la tension de la révolte populaire (le refus par deux fois des décisions de la CEDEAO par les burkinabè argumente plus tôt en faveur de la pertinence de ces mesures). Qu’elles aient été instrumentalisées, ce qui est concevable, elles ont répondues à une volonté populaire, qui peut se tromper, mais elles ont prévenu, du reste pour l’instant, le chaos et restaurer des conditions du dialogue.


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